— Oui ! » murmurèrent les lèvres d’Edith.
Florence la regarda encore avec un sentiment croissant de surprise et de crainte, jusqu’au moment où ses larmes la dérobèrent à sa vue et inondèrent ses joues.
« Florence ! ma chérie ! dit Edith vivement, écoutez-moi ! Je ne puis supporter votre douleur. Remettez-vous. Vous voyez que j’essaye d’être calme, et croyez-vous que cela me soit facile ? »
Sa voix et ses manières avaient repris toute leur fermeté, quand elle prononça ces derniers mots, et elle ajouta :
« Nous ne sommes pas tout à fait étrangères l’une à l’autre. Nous ne le sommes qu’en apparence seulement, Florence, car au fond de mon cœur je suis toujours la même pour vous, et je ne changerai jamais ! Mais ce que je fais, ce n’est pas pour moi.
— Est-ce donc pour moi, maman ?
— N’en demandez pas davantage, dit Edith après un moment de silence, il ne vous servirait de rien de savoir pourquoi ? Oui, ma chère Florence, il vaut mieux, il est nécessaire, il faut même absolument que nos rapports soient moins fréquents. La confiance que nous avions l’une pour l’autre doit être rompue.
— Quand donc ? s’écria Florence, oh ! quand donc, maman ?
— Dès à présent, dit Edith.
— Pour toujours ? demanda Florence.
— Je ne dis pas cela, répondit Edith, car je n’en sais rien. Je ne veux pas dire non plus que notre attachement ne fût pas une amitié pure et sainte, dont je reconnaissais l’avantage ainsi que la douceur. La voie où je suis entrée jusqu’ici est inconnue à vos pas, et celle que je dois suivre désormais… Dieu la connaît, ma fille, mais moi je ne la connais pas. »
Sa voix expira dans un triste silence et elle resta dans son fauteuil à regarder sa fille, avec cet air de terreur étrange et d’embarras involontaire que Florence avait une fois déjà surpris dans ses yeux égarés. Puis ses traits et toute sa personne exprimèrent cet orgueil indomptable, cette sourde colère et tout son être frémit comme frémit la corde irritée d’une harpe sous une main en proie à la fureur. Mais cet accès ne fut pas suivi de transports de tendresse et d’humilité. Elle ne baissa pas la tête pour pleurer et pour dire à Florence qu’elle n’avait plus d’espoir qu’en elle. Elle releva la tête au contraire comme une Méduse superbe, et semblait le regarder, lui fixe--