son habit, retroussa ses manches, mit sur sa tête son chapeau de toile cirée, sans lequel il était incapable de se tirer jamais avec succès d’une difficulté.
Après avoir calmé sa tête malade et rafraîchi sa figure brûlante dans l’eau que le capitaine avait eu soin de lui apporter pendant son sommeil, Florence se mit devant la glace pour rattacher ses cheveux flottants. Puis elle s’aperçut que sa poitrine portait la noire empreinte d’un coup porté par une main courroucée, mais elle en détourna les yeux immédiatement.
À cette vue, ses larmes coulèrent en abondance ; elle ressentit de la honte et de l’effroi, mais aucune colère contre lui. Quoique sans asile et sans père désormais, elle lui pardonnait tout. Il ne lui vint pas à l’idée qu’elle eût quelque chose à pardonner à son père et ne s’avouait pas qu’elle lui pardonnait ; mais elle fuyait son image et son souvenir, comme elle s’était enfuie loin de la réalité : pour elle il était perdu sans retour ; pour elle, cet être qu’on appelle un père n’existait plus dans le monde.
Que faire ? où demeurer ? Florence, la pauvre jeune fille sans expérience ne le savait guère. Dans ses rêves vagues et confus, elle se figurait trouver bien loin, bien loin, plusieurs petites sœurs qu’elle instruirait, plusieurs petites sœurs qui seraient bonnes pour elle et auxquelles elle s’attacherait sous un nom supposé : elle se figurait déjà les voir grandir au milieu d’une heureuse famille, se marier, se montrer pleines de bonté pour leur vieille gouvernante, et lui confier plus tard l’éducation de leurs propres filles. Elle pensait ensuite au sort bizarre et triste, qui la condamnerait, vieille et fille, avec ses cheveux blancs, à emporter son secret dans la tombe, lorsque Florence Dombey serait déjà depuis longtemps oubliée. Mais elle ne voyait encore tout cela qu’à travers d’épais nuages. Tout ce qu’elle savait, c’est qu’elle n’avait pas de père sur la terre ; et elle se le répétait souvent dans le secret de son cœur, cachée à tous les regards, excepté à ceux du Père qu’elle avait dans le ciel.
Sa petite fortune ne se montait guère qu’à quelques louis d’or. Il fallait avec une partie de cet argent acheter des vêtements, car elle n’avait que ceux qu’elle portait sur elle en ce moment. Elle était trop désolée pour songer que cet argent serait bientôt parti ; eût-elle eu moins de chagrin, elle était encore trop innocente dans les affaires du monde pour s’en inquiéter. Elle essaya de calmer sa pauvre tête et de sécher