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Page:Dickens - L'embranchement de Mugby, 1879.djvu/46

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avait dans l’air d’étranges idiomes qui semblaient conspirer en caractères rouges, verts ou blancs, tandis qu’un tremblement de terre, doué de mouvement et accompagné de tonnerre et d’éclairs, passait comme un tourbillon et se rendait express à Londres.

Tout à coup, le silence se faisait, tout redevenait calme et sombre, les lampes s’éteignaient et la station morne et déserte semblait avoir relevé sa toge sur sa tête, comme César prêt à mourir.

Le vent et la pluie reprenaient alors possession du lieu et régnaient sans conteste.

Tandis que le voyageur attardé continuait sa marche monotone, un autre train, un train fantôme, passa près de lui dans la nuit sombre ; celui-là, c’était le train de sa propre existence. Sortait-il de la tranchée profonde ? Émergeait-il du tunnel ? Je ne sais ; mais il n’en arrivait pas moins sur notre homme, d’une allure furtive et voilée par les ténèbres du passé. On y voyait un jeune enfant orphelin, qui n’avait jamais connu d’enfance ; près de lui, et comme s’il en était inséparable, se tenait un jeune homme chez qui le sentiment amer de son isolement était visiblement empreint. Lié à lui se trouvait un homme qu’on avait lentement façonné au joug d’un travail antipathique à sa nature, et sous le fardeau duquel ses