Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 1.djvu/304

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loppé d’une flanelle sale, vêtu de vieux habits noirs, qui avaient l’air d’avoir été cirés, se tenait penché sur son travail, qui consistait à faire de belles copies et à remettre au net les notes des deux autres employés, pour servir à M. Jaggers.

C’était là tout l’établissement. Quand nous regagnâmes l’étage inférieur, Wemmick me conduisit dans le cabinet de M. Jaggers, et me dit :

« Vous êtes déjà venu ici.

— Dites-moi, je vous prie, lui demandai-je, en apercevant encore les deux bustes au regard étrange, quels sont ces portraits ?

— Ceux-ci, dit Wemmick, en montant sur une chaise et soufflant la poussière qui couvrait les deux horribles têtes avant de les descendre, ce sont deux célébrités, deux fameux clients, qui nous ont valu un monde de crédit. Ce gaillard-là… — mais tu as dû, vieux coquin, descendre de ton armoire pendant la nuit, et mettre ton œil sur l’encrier, pour avoir ce pâté-là sur ton sourcil — a assassiné son maître.

— Cela lui ressemble-t-il ? demandai-je en reculant devant cette brute, pendant que Wemmick crachait sur son sourcil et l’essuyait avec sa manche.

— Si cela lui ressemble !… mais c’est lui-même, le moule a été fait à Newgate, aussitôt qu’il a été décroché. — Tu avais de l’amitié pour moi, n’est-ce pas, mon vieux gredin ? » dit Wemmick, en interpellant le buste.

Il m’expliqua ensuite cette singulière apostrophe, en touchant sa broche, et en disant :

« Il l’a fait faire exprès pour moi.

— Est-ce que cet autre animal a eu la même fin ? dis-je. Il a le même air.

— Vous avez deviné, dit Wemmick, c’est l’air de