Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 1.djvu/355

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serais attendu à voir occuper le poste de portier chez miss Havisham.

« Orlick !

— Ah ! c’est que voyez-vous, il y a des changements de position encore plus grand que le vôtre. Mais entrez, entrez ! j’ai reçu l’ordre de ne pas laisser la porte ouverte. »

J’entrai ; il la laissa retomber, la ferma et retira la clef.

« Oui, dit-il en se tournant, après m’avoir assez malhonnêtement précédé de quelques pas dans la maison, c’est bien moi !

— Comment êtes-vous venu ici ?

— Je suis venu ici sur mes jambes, répondit-il, et j’ai apporté ma malle avec moi sur une brouette.

— Êtes-vous ici pour le bien ?

— Je n’y suis pas pour le mal, au moins, d’après ce que je suppose ? »

Je n’en étais pas bien certain ; j’eus le loisir de songer en moi-même à sa réponse, pendant qu’il levait lentement un regard inquisiteur du pavé à mes jambes, et de mes bras à ma tête.

« Alors vous avez quitté la forge ? dis-je.

— Est-ce que ça a l’air d’une forge, ici ? répliqua Orlick, en jetant un coup d’œil méprisant autour de lui ; maintenant prenez-le pour une forge si cela vous fait plaisir. »

Je lui demandai depuis combien de temps il avait quitté la forge de Gargery.

« Un jour est ici tellement semblable à l’autre, répliqua-t-il, que je ne saurais le dire sans en faire le calcul. Cependant, je suis venu ici quelque temps après votre départ.

— J’aurais pu vous le dire, Orlick.