Aller au contenu

Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 1.djvu/357

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Que je sois brûlé si je le sais ! répondit-il en s’étendant et en se secouant. Mes ordres ne vont pas plus loin. Je vais frapper un coup sur cette cloche avec le marteau, et vous suivrez le couloir jusqu’à ce que vous rencontriez quelqu’un.

— Je suis attendu, je pense.

— Qu’on me brûle deux fois, si je puis le dire ! » répondit-il.

Là-dessus, je descendis dans le long couloir qu’autrefois j’avais si souvent foulé de mes gros souliers, et il fit résonner sa cloche. Au bout du passage, pendant que la cloche vibrait encore, je trouvai Sarah Pocket, qui me parut avoir verdi et jauni à cause de moi.

« Oh ! dit-elle, est-ce vous, monsieur Pip ?

— Moi-même, miss Pocket. Je suis aise de vous dire que M. Pocket et sa famille se portent bien.

— Sont-ils un peu plus sages ? dit Sarah, en secouant tristement la tête. Il vaudrait mieux qu’ils fussent sages que bien portants. Ah ! Mathieu ! Mathieu !… vous savez le chemin, monsieur ?

— Passablement, car j’ai monté cet escalier bien souvent dans l’obscurité. »

Je le gravis alors avec des bottes bien plus légères qu’autrefois et je frappai, de la même manière que j’avais coutume de le faire, à la porte de la chambre de miss Havisham.

« C’est le coup de Pip, dit-elle immédiatement ; entrez, Pip. »

Elle était dans sa chaise, auprès de la vieille table, toujours avec ses vieux habits, les deux mains croisées sur sa canne, le menton appuyé dessus, et les yeux tournés du côté du feu. À côté d’elle était le soulier blanc qui n’avait jamais été porté, et une dame élégante que je n’avais jamais vue, était assise, la