Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 2.djvu/196

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Wemmick prit un air très-sérieux :

« Je ne puis pas vous assurer cela d’après ce que j’en sais. Je veux dire que je ne puis pas vous affirmer qu’il en a été ainsi d’abord ; mais, ou cela est, ou sera, ou est en grand danger d’être. »

Comme je voyais que sa position à la Petite Bretagne l’empêchait d’en dire davantage, et que je savais (et je lui en étais très-reconnaissant) combien il sortait de sa voie ordinaire, en me disant ce qu’il me disait, je ne pus pas le presser ; mais je lui dis, après un moment de méditation, que j’aimerais bien lui faire une question, le laissant juge d’y répondre ou de n’y pas répondre, comme il le voudrait, certain que j’étais que ce qu’il ferait serait bien. Il posa son déjeuner et croisant les bras et pinçant ses manches de chemise (il trouvait commode de rester chez lui sans habit), il me fit signe aussitôt de faire ma question.

« Vous avez entendu parler d’un homme de mauvaise conduite, dont le vrai nom est Compeyson ? »

Il me répondit par un autre signe.

« Vit-il encore ? »

Un autre signe.

« Est-il à Londres ? »

Il me fit encore un signe, comprima excessivement sa boite aux lettres, me fit un dernier signe, et continua son déjeuner.

« Maintenant, dit Wemmick, que les questions sont faites, ce qu’il dit avec emphase et répéta pour ma gouverne, j’arrive à ce que je fis après avoir entendu ce que j’avais entendu. Je me rendis à la Cour du Jardin pour vous trouver. Ne vous trouvant pas, je fus chez Clarricker, pour trouver M. Herbert.

— Et vous l’avez trouvé ? fis-je avec inquiétude.

— Et je l’ai trouvé. Sans prononcer un seul nom,