Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 1.djvu/258

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haitait ardemment que son hôte s’étouffât avec le morceau de rôtie qu’il portait dans ce moment à sa bouche, et terminât ainsi ses visites. J’espère que non.

— Vous êtes bien bon, répondit M. Winkle ; mais, ce matin, j’ai trouvé à la porte de ma chambre à coucher une note de M. Tupman, pour m’annoncer que M. Pickwick nous écrit de le rejoindre aujourd’hui à Bury. Nous devons partir par la voiture de midi…

— Mais vous reviendrez ? dit mistress Pott.

— Oh ! certainement.

— En êtes-vous bien sûr ? continua la dame en jetant à la dérobée un tendre regard à son hôte.

— Certainement, répondit M. Winkle. »

Le déjeuner se termina en silence, car chacun des assistants ruminait sur ses chagrins : mistress Pott regrettait la perte de son cavalier ; M. Pott, son imprudente promesse de cravacher l’Indépendant ; M. Winkle, les galanteries qui l’avaient placé dans une si embarrassante situation. L’heure de midi approchait, et après beaucoup d’adieux et de promesses de retour, M. Winkle s’arracha de cette famille, où il avait été si bien reçu.

« S’il revient jamais, je l’empoisonne ! pensa M. Pott en se retirant dans le petit bureau où il préparait les foudres de son éloquence.

— Si jamais je reviens m’empêtrer parmi ces gens-là, pensa M. Winkle en se rendant au Paon d’argent, je mérite d’être cravaché moi-même ; voilà tout. »

Ses amis étaient prêts, la voiture arriva bientôt, et au bout d’une demi-heure les trois pickwickiens accomplissaient leur voyage, par la même route que M. Pickwick avait si heureusement parcourue avec Sam. Comme nous en avons déjà parlé, nous ne croyons pas devoir extraire la belle et poétique description qu’en donne M. Snodgrass.

Sam Weller les attendait à la porte de l’Ange et les introduisit dans l’appartement de M. Pickwick. Là, à la grande surprise de M. Winkle et de M. Snodgrass, et à l’immense confusion de M. Tupman, ils trouvèrent le vieux Wardle avec M. Trundle.

« Comment ça va-t-il ? dit le vieillard en serrant la main de M. Tupman. Allons ! allons ! ne prenez pas un air sentimental. Il n’y a pas de remède à cela, vieux camarade. Pour l’amour d’elle je voudrais qu’elle vous eût épousé, mais dans