Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 1.djvu/404

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il échouait complétement dans ses efforts pour paraître tranquille et gai. Excepté deux ou trois favorites, demeurées en haut, et honorées d’une vue particulière de la mariée et des demoiselles d’honneur, toutes les jeunes personnes étaient en larmes et en robe de mousseline. Les pickwickiens avaient également revêtu des costumes appropriés à la circonstance. Enfin l’on entendait sur le gazon, devant la grande porte, de terribles hurlements, poussés par tous les hommes, jeunes gars et gamins, dépendant de la ferme, et portant chacun une cocarde blanche à leur boutonnière. C’était Sam qui dirigeait leurs cris, du précepte et de l’exemple ; car il était déjà parvenu à se rendre fort populaire, et se trouvait là aussi à son aise que s’il avait été conçu et enfanté sur les terres de M. Wardle.

Un mariage est un sujet privilégié de plaisanteries ; et cependant après tout, il n’y a pas grande plaisanterie dans l’affaire. Nous parlons simplement de la cérémonie, et demandons qu’il soit bien entendu que nous ne nous permettons aucun sarcasme caché contre la vie maritale. Aux plaisirs, aux espérances qu’apporte le mariage, est mêlé le regret d’abandonner sa maison, sa famille, de laisser derrière soi les tendres amis de la portion la plus heureuse de la vie, pour en affronter les soucis avec une personne qu’on n’a pas encore éprouvée et qu’on connaît peu. Mais en voilà assez sur ce sujet : nous ne voulons pas attrister notre chapitre par la description de ces sentiments naturels, et nous regretterions encore bien plus de les tourner en ridicule.

Nous dirons donc brièvement que le mariage fut célébré par le vieil ecclésiastique, dans l’église paroissiale de Dingley-Dell ; et que le nom de M. Pickwick est inscrit sur le registre, conservé jusqu’à ce jour dans la sacristie ; que la jeune demoiselle aux yeux noirs ne signa pas son nom d’une main ferme, coulante et dégagée ; que la signature d’Émily et celle de l’autre demoiselle d’honneur sont presque illisibles ; que d’ailleurs tout se passa très-bien et d’une manière fort agréable ; que les jeunes demoiselles trouvèrent, généralement, que la cérémonie était bien moins terrible qu’elles ne se l’étaient imaginé ; et que si la propriétaire des yeux noirs et du sourire malicieux jugea convenable d’informer M. Winkle, qu’assurément elle ne pourrait jamais se soumettre à une chose aussi odieuse, nous avons, d’autre part, les meilleures raisons pour supposer qu’elle se trompait. À tout cela nous pouvons ajouter que M. Pickwick fut le premier qui embrassa la mariée, et qu’en