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Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 2.djvu/268

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— Rester ici ! répéta M. Pickwick.

— Rester ici, mon cher monsieur, répliqua Perker en s’appuyant sur le dos de la chaise et en regardant fixement son client.

— Pourquoi me demander cela à moi ? Cela dépend de Dodson et Fogg, vous le savez très-bien.

— Je ne le sais pas du tout, rétorqua M. Perker avec fermeté. Cela ne dépend pas de Dodson ni de Fogg ; vous connaissez les personnages aussi bien que moi, mon cher monsieur. Cela dépend entièrement et uniquement de vous.

— De moi ! s’écria M. Pickwick en se levant par un mouvement nerveux, et en se rasseyant à l’instant même.

Le petit homme frappa deux fois sur le couvercle de sa tabatière, l’ouvrit, prit une grosse pincée de tabac, referma la boîte et articula ces paroles : « de vous seul. »

« Je dis, mon cher monsieur, poursuivit l’avoué, à qui sa prise semblait donner, plus de confiance, je dis que sa libération prochaine, ou son éternelle réclusion, dépendent de vous, et de vous seul. Écoutez-moi jusqu’au bout, s’il vous plaît, mon cher monsieur ; et ne dépensez pas tant d’énergie, car cela n’est bon à rien du tout, qu’à vous mettre en transpiration. Je dis, continua le petit homme, en établissant chaque proposition sur chacun de ses doigts ; je dis qu’il n’y a que vous qui puissiez la retirer de cet abîme de misère, et que vous ne pouvez faire cela qu’en payant les frais du procès, ceux de la demanderesse et ceux du défendeur, entre les mains de ces requins de Freeman’s Court. Allons, mon cher monsieur, soyez calme, je vous en prie. »

Pendant ce discours, le visage de M. Pickwick avait subi les changements les plus extraordinaires, et il était évidemment sur le point de laisser éclater sa foudroyante indignation. Cependant il calma sa rage comme il put, et Perker, renforçant son argumentation par une autre prise de tabac, poursuivit ainsi qu’il suit :

« J’ai vu cette femme ce matin. En payant les frais, vous pouvez obtenir une décharge pleine et entière des dommages, et ce qui sera pour vous, j’en suis sûr, un motif beaucoup plus puissant, une confession volontaire, écrite par elle, sous la forme d’une lettre à moi adressée, et déclarant que, dès le commencement, cette affaire a été imaginée, fomentée, et poursuivie par ces individus, Dodson et Fogg ; qu’elle regrette profondément d’avoir servi d’instrument pour vous tourmenter, et