Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 2.djvu/65

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sant les erreurs de sa jeunesse, avait écrit cette chanson pour montrer les avantages de l’abstinence. « C’est une chanson de tempérance (tourbillon d’applaudissements). La propreté du costume de l’intéressant jeune homme, son habileté, comme rameur, la désirable disposition d’esprit qui lui permettait, suivant la belle expression du poëte, de ramer tout le jour en ne pensant à rien ; tout se réunit pour prouver qu’il devait être buveur d’eau (applaudissements). Oh ! quel état de vertueuses jouissances (applaudissements enthousiastes) ! et quelle fut la récompense du jeune homme ! que tous les jeunes gens présents remarquent ceci :

« Les jeunes filles s’empressaient d’entrer dans son bateau (bruyants applaudissements, surtout parmi les dames). Quel brillant exemple ! Les jeunes filles se pressant autour du jeune batelier et l’escortant dans le sentier du devoir et de la tempérance. Mais étaient-ce seulement les jeunes filles de bas étage, qui le soignaient, qui le consolaient, qui le soutenaient ? Non !

Il était le rameur chéri
Des plus belles dames du monde.

(immenses applaudissements). Le doux sexe se ralliait comme un seul homme… Mille pardons, comme une seule femme… autour du jeune batelier, et se détournait avec dégoût des buveurs de spiritueux (applaudissements). Les frères de la Branche de Brick-Lane sont des bateliers d’eau douce (applaudissements et rires). Cette chambre est leur bateau ; cette audience représente les jeunes filles, et l’orateur, quoique indigne, est leur rameur chéri (applaudissements frénétiques et interminables). »

« Sammy, qu’est-ce qui veut dire par le doux sexe ? demanda M. Weller à voix basse.

— La femme, répondit Sam du même ton.

— Pour ça, il n’a pas tort ; faut qu’elle soit joliment douce pour se laisser plumer par des olibrius comme ça. »

Les observations mordantes du vieux gentleman furent interrompues par le commencement de la chanson que M. Anthony Humm psalmodiait, deux lignes par deux lignes, pour l’instruction de ceux de ses auditeurs qui ne connaissaient point la légende. Pendant qu’on chantait, le petit homme chauve disparut, mais il revint aussitôt que la chanson fut