Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 1.djvu/139

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grimper quand il était tout petit… C’est ce qu’on a fait, mon pauvre fils ! ses désirs ont été remplis. Vous pouvez voir d’ici la place où il repose… Nous y avons toujours depuis entretenu du gazon frais. »

Il secoua la tête, et, regardant sa fille avec des yeux humides. « N’ayez pas peur, lui dit-il, je ne parlerai plus de cela. » Car il ne voulait affliger personne ; et si ses paroles avaient fait de la peine à quelqu’un, il en demandait pardon, après tout.

Le lait arriva, et Nelly, ouvrant son petit panier, y choisit les meilleurs morceaux de pain pour son grand-père. Ils firent ainsi un bon repas. Les meubles qui garnissaient la chambre étaient naturellement très-simples : quelques chaises grossières et une table ; un buffet placé dans un coin, avec sa garniture de faïence et de terre jaune ; un plateau à thé de couleurs éclatantes, représentant une dame en robe rouge, avec une ombrelle bleue ; sur les murs, et au-dessus de la cheminée, un petit nombre de cadres offrant des sujets coloriés, tirés de l’écriture sainte ; une étroite armoire à habits, une horloge marchant huit jours, quelques casseroles bien luisantes, et un chaudron, voilà tout le mobilier. Mais tout y était propre et en bon état ; et Nelly, en regardant autour d’elle, trouvait un air de tranquillité, d’aisance et de satisfaction, auquel depuis longtemps elle n’était plus accoutumée.

« Combien y a-t-il d’ici à la ville ou au village le plus prochain ? demanda-t-elle au mari de la paysanne.

— Il y a bien cinq bons milles de distance. Mais je pense que vous ne voulez pas y arriver ce soir ?

— Si, si, Nell ! … dit vivement le vieillard en faisant des signes à l’enfant. Plus loin, plus loin ! Quand nous devrions marcher jusqu’à minuit ! …

— Il y a tout près d’ici, mon brave homme, reprit le paysan une bonne grange… ou bien encore il y a, j’en suis sûr, de quoi vous loger à l’auberge de la Charrue et de la Herse. Excusez-moi, nais vous me semblez un peu fatigués, et à moins que vous n’ayez besoin de partir…

— Oui, oui, dit brusquement le vieillard, nous sommes pressés. Plus loin, ma chère Nell, je t’en prie, allons plus loin.

— C’est cela, partons ! dit l’enfant, se soumettant à ce vœu impatient… Nous vous remercions bien, mais nous ne saurions nous arrêter sitôt. Grand-papa, je suis prête. »