Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 1.djvu/207

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que vous n’êtes pas en sûreté ! Pourrais-je donc être si tranquille, et le serais-je si vous aviez à craindre quelque danger ?

— Oh ! oui ! oh ! oui ! dit-il en lui pressant la main, mais sans cesser de regarder au loin avec anxiété. — Quel est ce bruit ?

— Un oiseau, dit l’enfant ; un oiseau qui voltige à travers le bois et nous indique le chemin que nous avons à suivre. Vous vous rappelez quand nous disions que nous irions par les bois et les champs et le long du bord des rivières, et que nous serions bien heureux… Vous vous le rappelez ? … Mais ici, tandis que le soleil brille au-dessus de nos têtes, et que tout est lumière et bonheur, nous restons tristement assis, à perdre notre temps ! — Voyez, quel joli sentier ! l’oiseau nous y mène, — le même oiseau ; — le voilà qui se pose sur un autre arbre et qui s’arrête pour chanter. Venez ! »

Lorsqu’ils se levèrent et prirent l’allée ombreuse qui devait les conduire à travers les bois, Nelly s’élança en avant ; imprimant ses petits pieds sur la mousse qui se relevait après, souple et élastique sous ces pieds légers, gardant pourtant l’empreinte de ses pieds mignons comme une glace fidèle. Puis alors elle appela le vieillard de ce côté, tant du regard que de son geste gai et pressant. Elle lui montrait d’un signe furtif quelque oiseau solitaire se balançant et gazouillant sur une branche qui s’égarait au-dessus de l’allée ; ou bien, elle s’arrêtait pour écouter les chants qui rompaient l’heureux silence ; ou bien elle contemplait le rayon de soleil qui tremblait parmi les feuilles, et, se glissant le long des troncs énormes des vieux chênes couverts de lierre, projetait au loin des traits lumineux. Comme ils cheminaient en avant, écartant les buissons qui bordaient l’allée, la sérénité que Nelly avait feint d’éprouver d’abord pénétra véritablement dans son cœur ; le vieillard cessa de jeter derrière lui des regards d’effroi, il montra même plus d’assurance et de gaieté : car plus ils s’enfonçaient dans le sein de l’ombre verte, plus ils sentaient que l’esprit de Dieu était là et répandait la paix sur eux.

Enfin le sentier devint plus clair ; la marche, plus libre ; ils atteignirent la limite du bois et se trouvèrent sur une grande route. Ils la suivirent quelque temps et entrèrent bientôt dans une ruelle ombragée par deux rangées d’arbres si serrés et si touffus que leurs cimes se rejoignaient en berceau et formaient