Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 1.djvu/209

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trois tours dans son jardin ; s’approcher ensuite de la porte et regarder du côté de la pelouse, puis reprendre sa pipe en soupirant et s’asseoir de nouveau dans la même attitude pensive.

Comme aucune autre personne ne paraissait et que la nuit commençait à tomber, Nelly s’arma enfin de résolution ; et lorsque le maître d’école eut repris sa pipe et son siège, elle s’aventura à s’approcher en tenant son grand-père par la main. Le bruit qu’ils firent en levant le loquet de la porte, attira l’attention du maître d’école. Il les considéra avec bienveillance, mais cependant comme un homme désappointé, et agita doucement la tête.

Nelly fit une révérence et lui dit qu’ils étaient de pauvres voyageurs qui cherchaient pour la nuit un abri qu’ils payeraient volontiers, selon leurs faibles moyens. Le maître d’école la regarda avec attention pendant qu’elle parlait ; il mit sa pipe de côté et se leva aussitôt.

« Si vous pouviez nous indiquer un endroit, dit l’enfant, nous vous en serions bien reconnaissants.

— Vous venez de faire un long chemin ? dit le maître d’école.

— Très-long, répéta Nelly.

— Vous commencez de bonne heure à voyager, mon enfant, dit-il en posant amicalement la main sur la tête de Nelly. C’est votre petite-fille, mon brave homme ?

— Oui, monsieur, s’écria le vieillard ; c’est l’appui et la consolation de ma vie.

— Entrez ici, » dit le maître d’école.

Sans autres préliminaires, il les mena dans une petite classe qui servait indifféremment de salle à manger et de cuisine, en leur disant qu’ils étaient les bienvenus et pourraient rester chez lui jusqu’au lendemain matin. Avant même qu’ils l’eussent remercié, il étendit sur la table une grosse nappe bien blanche, y posa des couteaux et des assiettes ; et mettant sur la table du pain, de la viande froide et un pot de bière, il les invita à manger et à boire.

L’enfant jeta un regard autour d’elle tout en s’asseyant. Il y avait deux bancs entaillés et tout tachés d’encre ; une petite chaire perchée sur ses quatre pieds, où sans doute le maître était assis pendant la classe ; quelques livres rangés sur une tablette haute, avec des coins au haut des pages ; en outre, une collection bigarrée de toupies, de balles, de cerfs-volants, de lignes