Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 2.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lablement avis de son départ, était sans doute en ce moment dans une mortelle anxiété, en proie au plus vif chagrin.

Cette gracieuse perspective était si bien d’accord avec les goûts du nain, et si agréable pour lui, que, tout en marchant, il en riait à cœur joie jusqu’à en avoir les larmes aux yeux. De plus en plus joyeux, quand il atteignit la rue voisine de sa demeure, il exprima son plaisir par un cri rauque qui n’effraya pas médiocrement un passant paisible qui marchait devant lui sans s’attendre à cette surprise. Nouvelle jouissance pour Quilp, et qui augmenta d’autant sa satisfaction.

Telle était l’heureuse disposition d’esprit de M. Quilp lorsqu’il atteignit Tower-Hill. Là, s’étant arrêté à regarder la croisée de son logis, il la trouva plus splendidement éclairée qu’il n’est d’usage dans une maison en deuil. Il s’approcha plus près encore, écouta attentivement et put entendre plusieurs voix se livrant à une conversation animée, et dans le nombre il reconnut, outre celles de sa femme et de sa belle-mère, des organes masculins.

« Ah ! s’écria le nain jaloux, qu’est-ce que c’est que ça ? … Est-ce qu’elles reçoivent des visites en mon absence ? »

Une toux étouffée qui venait de l’intérieur fut la réponse qu’il reçut.

M. Quilp chercha dans ses poches son passe-partout ; mais il l’avait oublié. Il n’avait d’autre ressource que de frapper à la porte.

« Il y a de la lumière dans le couloir, se dit-il en mettant son œil au trou de la serrure. Frappons un léger coup ; et avec votre permission, madame, je vais vous prendre à l’improviste. Holà ! … »

Il appliqua à la porte un tout petit coup avec précaution : pas de réponse. Mais, ayant de nouveau fait jouer le marteau sans plus de bruit, il vit s’ouvrir tout doucement la porte et aperçut le jeune gardien de son débarcadère. D’une main, il le saisit au collet ; de l’autre, il le traîna jusqu’au milieu de la rue.

« Vous m’étranglez, maître, murmura le jeune garçon, lâchez-moi, s’il vous plaît.

— Qui est-ce qui est là-haut, chien que vous êtes ? dit Quilp sur le même ton. Parlez, et parlez bas, ou je vous étranglerai pour tout de bon. »

Le jeune garçon ne put qu’indiquer la fenêtre, et répondre