Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 2.djvu/139

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ciel aussi bien que celles de l’homme, avaient toutes subi le même sort et présentaient le même aspect.

Une partie de l’édifice avait servi de chapelle baronniale ; on y voyait les images des guerriers couchés sur leurs lits de pierre, les mains jointes, les jambes croisées. Ces chevaliers qui avaient combattu en Palestine, étaient encore ceints de leur épée et couverts de leur armure comme de leur vivant. Les armes de quelques-uns, leur casque, leur cotte de mailles étaient suspendus près d’eux, à la muraille, à des crochets rouillés. Tout brisés et mutilés qu’étaient ces débris, ils conservaient encore leur ancienne forme et une partie de leur antique splendeur.

Ainsi les traces de la violence survivent à l’homme sur la terre, et les vestiges de la guerre et du carnage se mêlent aux emblèmes funéraires, longtemps après que ceux qui répandirent la désolation sont devenus des atomes de poussière.

L’enfant s’assit dans ce lieu vénérable et silencieux, parmi les figures roides et immobiles des tombes qui, pour Kelly, donnaient à ce côté de l’église encore plus de tranquillité et de majesté ; promenant autour d’elle des regards pleins d’un respect craintif mélangé d’un plaisir calme, elle se trouva heureuse : elle sentit qu’elle jouissait du repos. Elle prit une Bible sur un banc et se mit à lire ; puis, posant le livre, elle s’abandonna à la pensée des jours d’été, du brillant printemps qui reviendrait ; des rayons de soleil qui tomberaient obliquement sur la nature endormie ; des feuilles qui trembleraient à la fenêtre et projetteraient sur le pavé leur ombre lumineuse ; des chants d’oiseaux ; des boutons et des fleurs s’épanouissant autour des portes ; de la douce brise qui se jouerait dans l’espace et ferait flotter les bannières déchirées. Peu importait que ce lieu éveillât des idées de mort ! Quand on mourrait, il resterait toujours le même ; ces objets, ces sons se présenteraient avec le même charme ; il n’y avait rien de pénible à penser qu’on dormirait au milieu d’eux.

Nelly quitta la chapelle, lentement et se retournant souvent pour regarder en arrière. Elle arriva à une porte basse qui donnait sur la tour, l’ouvrit, gravit dans l’ombre l’escalier tournant ; parfois seulement elle apercevait, par le demi-jour d’étroites meurtrières, les degrés qu’elle venait de quitter, ou entrevoyait le reflet métallique des cloches chargées de poussière. Enfin, elle termina son ascension et atteignit le sommet de la tour.

Oh ! quelle explosion éclatante et soudaine de lumière ! La