Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 2.djvu/189

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« Dans le chapeau ? … s’écria Brass avec une sorte de glapissement.

— Sous le mouchoir, et caché dans la doublure, » dit Richard, frappé d’horreur à cette découverte.

M. Brass regarda successivement Richard, miss Sally, les murs, le plafond et le plancher, tout enfin, excepté Kit qui était demeuré stupéfié et incapable de faire un mouvement.

« Et voilà, s’écria Brass enjoignant ses mains, voilà donc ce que c’est que ce monde qui tourne sur son axe, soumis aux influences de la lune et aux révolutions qui s’opèrent autour des corps célestes et ainsi de suite ! … Voilà donc la nature humaine ! … Ô nature, nature ! … Voilà le malheureux que je voulais faire profiter des ressources de ma petite industrie, et pour qui, même en ce moment encore, j’éprouve une compassion telle, que je le laisserais volontiers partir ! … Mais, ajouta M. Brass d’un accent plus ferme, avant tout je suis homme de loi, et par conséquent mondevoir est de donner l’exemple en mettant à exécution les lois demon heureuse patrie. Pardonnez-moi, ma chère Sally, et tenez-le ferme de l’autre côté. Monsieur Richard, ayez la bonté de courir chercher un constable. Le temps de la faiblesse est passé, monsieur ; la force morale est revenue. Un constable, monsieur, s’il vous plaît ! »






CHAPITRE XXIII.


Kit était comme plongé dans un sommeil léthargique, les yeux tout grands ouverts et fixés sur le sol, sans prendre garde à la main tremblante de M. Brass qui le tenait par un des bouts de sa cravate, ni à la serre beaucoup plus solide de miss Sally qui en avait étreint l’autre bout ; cependant les précautions de la vieille fille n’étaient pas pour lui sans inconvénient : car miss Sally, cette femme enchanteresse, outre qu’elle lui enfonçait de temps en temps les phalanges de ses doigts dans la gorge un peu plus qu’il ne fallait, avait dès le premier moment appréhendé si fortement ce malheureux, que même dans le désordre et l’égarement de ses pensées, il ne pouvait s’empêcher de se sentir suf-