Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 2.djvu/218

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lieu si remarquable ? Pourraient-ils croire qu’un homme tel que M. Brass pût résider dans un lieu comme Bevis-Marks, et n’être pas un cœur vertueux, un esprit élevé ? »

Après avoir ressassé cet argument vigoureux, l’avocat ajouta, en manière de conclusion, qu’insister sur un fait si bien apprécié déjà par MM. les jurés, serait faire injure à leur intelligence, et en conséquence il appela tout d’abord Sampson Brass au banc des témoins.

M. Brass se présente. Il est vif et frais. Il salue le juge en homme qui a eu déjà le plaisir de le voir et qui espère bien avoir conservé son estime depuis leur dernière entrevue, croise ses bras et regarde son avocat comme pour dire : « Me voici. Je suis plein de preuves jusqu’à la gorge. Un petit coup seulement sur la bonde, et je vais déborder ? » L’avocat se met aussitôt à la besogne, mais avec une grande réserve, tirant peu à peu les preuves pour en faire ressortir la netteté et l’éclat aux yeux de tous les assistants. Alors le conseil de Kit provoque un contre-interrogatoire ; mais il ne peut rien tirer du procureur qui soit utile à la cause de son client. Après avoir subi un grand nombre de longues questions auxquelles il ne fait que de courtes réponses, M. Sampson Brass descend du banc dans toute sa gloire.

Sarah lui succède. Elle est jusqu’à un certain point d’humeur coulante avec l’avocat de M. Brass, mais très-rétive avec celui de l’accusé. En résumé, l’avocat de Kit ne peut obtenir d’elle que la répétition de ce qu’elle a déjà énoncé, seulement cette fois en termes plus violents contre son client ; aussi un peu confus, s’empresse-t-il de la renvoyer. Alors l’avocat de M. Brass appelle Richard Swiveller : Richard Swiveller paraît.

On a secrètement averti l’avocat de M. Brass que ce témoin éprouve des dispositions favorables au prisonnier ; et, à dire vrai, il n’est pas fâché de le savoir, car ledit avocat passe pour être très-fort dans l’art de coller son homme, comme on dit vulgairement. En conséquence, il commence par requérir l’huissier de s’assurer si le témoin a baisé l’évangile, puis il se met à entreprendre Richard des pieds et des mains, des dents et des griffes.

Quand celui-ci a fini sa déposition dans laquelle il a mis une contrainte visible et trahi son désir de la rendre le moins défavorable possible à l’accusé :