Page:Dickens - Magasin d Antiquités, trad Des Essarts, Hachette, 1876, tome 2.djvu/270

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sa mère et mistress Nubbles, de peur qu’elles n’eussent l’idée de remarquer comme elle avait les joues rouges, et de la questionner là-dessus. Ô la maligne petite Barbe !

Quand les premiers transports de tout le monde furent passés, lorsque Kit et sa mère, Barbe et sa mère, avec le petit Jacob et le poupon, eurent soupé, sans se presser, car ils fussent volontiers restés ensemble la nuit entière, M. Garland appela Kit, et le menant à part dans une salle où ils étaient tout seuls il lui annonça qu’il avait à lui faire une communication qui le surprendrait étrangement. Kit parut si inquiet et devint si pâle-en entendant ces paroles, que le vieux gentleman s’empressa d’ajouter que cette surprise serait d’une nature agréable, et il lui demanda s’il serait prêt le lendemain matin pour entreprendre un voyage.

« Un voyage, monsieur ? … s’écria Kit.

— Oui, en ma compagnie et celle de mon ami qui est à côté. Devinez-vous le motif de ce voyage ? »

Kit devint plus pâle encore et secoua la tête comme s’il ne s’en doutait pas.

« Oh ! que si, je suis sûr que vous le devinez déjà, lui dit son maître. Essayez. »

Kit murmura quelques mots vagues et inintelligibles. Cependant il dit distinctement : « Miss Nell ! » Il le dit trois ou quatre fois, et chaque fois il secouait la tête, comme s’il eût voulu ajouter : « Mais non, ce n’est pas ça. »

Mais M. Garland, au lieu de lui dire : « Essayez, » puisque Kit avait satisfait à sa question, dit très-sérieusement qu’il avait deviné juste.

« Le lieu de leur retraite est enfin découvert, poursuivit-il. Tel est le but de notre voyage. »

Kit multiplia en tremblant des questions comme celles-ci : Où était le lieu de leur retraite ? Comment l’avait-on découvert ? Depuis quand ? Miss Nell était-elle bien portante ? Était-elle heureuse ?

« Nous savons qu’elle est heureuse, dit M. Garland. Bien portante, je… je pense qu’elle ne tardera pas à l’être. Elle a été faible et souffrante, à ce qu’on m’a dit ; mais elle était mieux, d’après les nouvelles que j’ai reçues ce matin, et l’on était plein d’espoir. Asseyez-vous, que je vous dise le reste. »

Osant à peine respirer, Kit obéit à son maître. M. Garland