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NICOLAS NICKLEBY.

nous demander notre concours. Monsieur Nickleby, Frank a pensé juste, Madeleine vous aime, elle vous est destinée ; nous approuvons son choix et celui de Frank, qui épousera votre sœur en dépit de tous les refus de celle-ci. Comme vous ignoriez nos sentiments, vous avez noblement agi ; mais maintenant que vous les connaissez, nous espérons que vous vous y conformerez. N’objectez point votre manque de fortune ; il y a eu un temps, Monsieur, où mon frère et moi allions presque nu-pieds, et grâce à Dieu la prospérité et les années ne nous ont point changés. Oh ! Edwin, quel heureux jour pour vous et pour moi ! Edwin, qui venait d’entrer avec madame Nickleby, pressa son frère dans ses bras.

— Amenez-moi ma petite Catherine, il y a longtemps que j’ai envie de l’embrasser, et j’en ai le droit, maintenant. Eh bien ! ma belle, avez-vous trouvé la lettre ? Avez-vous trouvé Madeleine elle-même, qui vous attendait ? Avez-vous reconnu qu’elle n’avait pas oublié son amie et sa douce compagne ? — Finissez, mon frère, dit Edwin, Frank va être jaloux, et vous serez obligé de vous couper la gorge avant le dîner. — Eh bien ! qu’il emmène Catherine dans la chambre où est Madeleine, et que tous les amoureux s’en aillent causer de l’autre côté, s’ils ont quelque chose à se dire.

Nicolas avait déjà disparu, et Frank ne tarda pas à le suivre. Charles conduisit Catherine à la porte, et la fit entrer. Madame Nickleby et miss la Creevy sanglotaient de joie, et Tim, la figure radieuse, distribuait des poignées de main à droite et à gauche.

— Eh bien ! Tim, reprit le frère Charles, qui était toujours l’orateur, voilà ces jeunes gens heureux. — Vous aviez dit que vous les feriez languir une éternité. — Avez-vous jamais vu, Edwin, un vilain comme ce Tim ? Il m’accuse de précipitation, et il nous a tourmentés pendant toute la journée pour lui permettre de faire connaître nos plans à Frank et à M. Nickleby ? — C’est un traître, on ne saurait avoir la moindre confiance en lui.

De semblables plaisanteries étaient en quelque sorte de fondation entre Tim et ses patrons. Ceux-ci en auraient ri pendant très-longtemps s’ils ne s’étaient aperçus que madame Nickleby éprouvait le besoin d’exprimer ce qu’elle ressentait. Ils l’emmenèrent donc dans une autre chambre, sous prétexte de la consulter sur des dispositions importantes, et Tim se trouva seul avec miss la Creevy. Tous deux avaient toujours été très-bien ensemble ; il était donc naturel que Tim, la voyant pleurer, essayât de la consoler ; et comme elle était assise sur un canapé tout près de la fenêtre et qu’il y avait place pour deux, il était également naturel que Tim allât