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NICOLAS NICKLEBY.

remplie d’étrangers, et qu’ils n’ont pas eu le temps de s’y préparer. Y a-t-il des dames ? — Non ; je n’en connais aucune. — Faut-il entrer de suite ? demanda Catherine en faisant un pas rétrograde. — Comme il vous plaira, dit Ralph en haussant les épaules. Tout le monde est arrivé et l’on va dîner.

Catherine se laissa entraîner.

Sept ou huit messieurs se tenaient autour du feu, et faisaient tant de bruit qu’ils ne s’aperçurent pas de l’arrivée de l’oncle et de la nièce. M. Ralph Nickleby toucha l’un d’eux par la manche, et dit d’une voix rauque, emphatique, pour attirer l’attention générale :

— Lord Frédéric Verisopht, ma nièce miss Nickleby.

Le groupe se dispersa, et lord Verisopht montra en se retournant un habit d’une coupe élégante au superlatif, une paire de favoris de même qualité, des moustaches, un toupet et un jeune visage.

— Eh ! dit-il, quoi… que…

En émettant ces incohérentes exclamations, il appliqua son lorgnon à son œil droit, et contempla miss Nickleby avec une vive surprise. Puis il se retourna vers un autre cavalier, non moins superlatif, un peu plus âgé, un peu plus fort, un peu plus coloré.

— Présentez-moi, Nickleby, dit ce second personnage, qui tournait le dos au feu et avait les deux coudes sur le manteau de la cheminée. — Sir Mulberry Hawk, dit Ralph. — Autrement le plus fameux de la bande, dit lord Frédéric Verisopht. — Ne m’oubliez pas, Nickleby, s’écria un homme à figure en lame de couteau, qui était assis sur un fauteuil bas et lisait le journal. — M. Pyke, dit Ralph. — Ni moi, Nickleby, dit un individu à la face rouge et à l’air impertinent, placé à côté de sir Mulberry Hawk. — M. Pluck, dit Ralph.

Puis, se retournant vers un autre qui avait le cou d’une cigogne et les jambes d’un animal quelconque, Ralph le présenta, comme étant l’honorable M. Snobbs. L’individu à cheveux blancs installé près de la table s’appelait le colonel Chauser. Le colonel s’entretenait avec quelqu’un qui semblait être là pour faire nombre, et ne fut pas présenté du tout.

Deux circonstances frappèrent Catherine et lui firent monter le rouge au visage : l’une était le mépris évident avec lequel les hôtes traitaient son oncle, et l’autre l’insolente aisance de leurs manières envers elle.

Quand Ralph eut achevé la cérémonie de la présentation, il fit asseoir sa nièce,