Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 1.djvu/165

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même quelques-uns en moins de temps que cela : où est ce drôle de Smike ? »

Nicolas jeta un regard rapide autour de lui sans répondre.

« Smike, criait à tue-tête M. Squeers.

— Smike ! est-ce que vous voulez encore vous faire casser la tête ? » demanda son aimable épouse, mettant sa voix à l’unisson avec celle de son mari.

Pas de réponse encore ; seulement Nicolas ouvrait de grands yeux, ainsi que la plupart des enfants qui venaient de se lever.

« Que le diable confonde le coquin ! murmura Squeers en exerçant sa canne avec impatience contre la rampe de l’escalier. Nickleby !

— Eh bien, monsieur ?

— Envoyez-moi ce drôle, vous ne m’entendez donc pas ?

— Il n’est pas ici, monsieur, répliqua Nicolas.

— Pas de mensonges : je sais qu’il y est.

— Il n’y est pas, riposta Nicolas avec colère.

— Nous allons bientôt voir cela, dit M. Squeers en montant avec précipitation. Je saurai bien le trouver, je vous en réponds. »

Sur cette assurance, M. Squeers tomba comme une bombe dans le dortoir, et, brandissant sa canne dans les airs, toute prête à s’abaisser sur quelque victime, il la plongea dans le coin obscur où le corps chétif du pauvre souffre-douleur s’étendait tous les soirs, mais la canne retomba sur le carreau sans faire de mal à personne : les oiseaux étaient dénichés.

« Qu’est-ce que cela veut dire ? dit Squeers se retournant pâle comme un mort, où l’avez-vous caché ?

— Je ne l’ai seulement pas vu depuis hier au soir, répondit Nicolas.

— C’est bon, dit Squeers, évidemment mal à son aise, malgré ses efforts pour dissimuler son inquiétude. Ce n’est pas comme cela que vous lui rendrez service. Où est-il ?

— Au fond de la mare, je suppose, reprit Nicolas à voix basse, les yeux fixés en plein sur la face du maître.

— Sacré nom !… Qu’est-ce que vous entendez par là ? » s’écria Squeers dans un grand trouble ; puis, sans attendre de réponse, il demanda aux enfants s’il y en avait parmi eux qui pût donner quelque renseignement sur la disparition de leur camarade.

Au milieu d’un bourdonnement général qui signifiait : « je n’en sais rien, » on entendit une voix perçante qui cria plus franchement que les autres :