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BAA

similis, semblable ; camera, chambre ; cucumer, concombre ; rememorari, remembrer ; cumulus, comble, humilis, humble. J’ai dit que le M se change en B ; car le M qui s’écrit dans ces mots n’est pas le M des mots latins, ni proprement une consonne ; mais elle fait une voyelle avec celle qui précède, selon les principes de M. l’Abbé Dangeau, qui sont très-vrais, & dont nous parlerons en temps & lieu. Tout ceci est extrêmement à remarquer pour la connoissance de l’origine des mots, & des étymologies.

Le B en François se trouve au commencement & au milieu des mots après toutes les voyelles & toutes les diphtongues, comme dans battre, befroi, bille, bon, bulbe, courbaton, courbe, corbillon, jambon, courbure, oublier, aubeine, aubier, bouline, &c. mais il ne se trouve jamais à la fin des mots, s’il n’est suivi au moins d’un e muet, comme dans aube, bulbe, &c. Car dans les mots étrangers même, que l’usage a conservés tout entiers sans y faire aucun changement, & dans lesquels nous n’écrivons point d’e après le b final, tels que sont ceux-ci Aminadab, Caleb, Eliasib, Jacob, Béelsebub, nous ne laissons pas d’en prononcer un, ainsi qu’on vient de le dire.

B. Nom subst. qu’il faut prononcer . C’est le nom propre de cette seconde lettre de l’Alphabet.

B, chez les Anciens, étoit une lettre numérale qui signifioit 300, suivant ce vers.

Et B tercentum perse retinere videtur.

Quand on mettoit une ligne par-dessus, elle signifioit trois mille. Le B chez les Grecs ne signifie que deux. Il se trouve souvent sur les médailles pour marquer des époques. On s’en est servi aussi pour marquer 200, en ajoutant une espèce d’accent dessous. Chez les Hébreux il se prenoit aussi pour deux. C’est pour cela que dans les médailles hébraïques frappées du temps du Grand-Prêtre Simon, on trouve en ancien caractère hébreu שב ; c’est-à-dire, שנת השבי ; anno secundo.

On dit d’un homme ignorant, qu’il ne sait ni A ni B. Voyez la lettre A. On dit aussi d’un homme malin, qu’il est marqué au B ; pour dire, qu’il est borgne, ou bossu, ou boiteux ; parce que ceux qui sont tels, sont ordinairement malins. Mais cela se doit mettre au rang des proverbes.

B. En termes de Calendrier, la seconde des sept Lettres dominicales.

B sur les monnoies. C’est le caractère par lequel on distingue les monnoies fabriquées dans la ville de Rouen. Le double BB est la marque de la monnoie de Strasbourg.

B, dans l’Alphabet chimique, désigne le mercure suivant Raymond Lulle.

B quarre, & B mol, sont des termes & des marques de Musique. Voyez Bécarre & Bémol.

BAA.

☞ BA. Bourgade d’Afrique (qu’il plaît aux Vocabulistes de décorer du nom de ville) dans le royaume d’Arder, (& non pas d’Ardes) au dedans du pays. La Compagnie des Indes Occidentales, établie dans les provinces unies, y a un magasin.

BAAILLEMENT. s. m. Voyez Bâillement.

BAAILLER. Voyez Bâiller.

BAAL. s. m. Idole des Samaritains & des Moabites. Les Grecs croient que c’étoit leur Dieu Mars. C’est le sentiment de Jean d’Antioche, de Cedrenus & de Suidas. S. Augustin croit que c’étoit Jupiter. Lightfoot veut que Baal, & son pluriel Baalim, soient des noms communs à toutes les idoles, parce que Baal veut dire Seigneur : c’est apparemment pour cette raison que Saint Augustin, qui avoie quelque connoissance de la langue punique, qui étoit la même que la Phénicienne, ou qui en étoit un dialecte, a cru que Baal étoit Jupiter, c’est-à-dire, le maître des Dieux & des hommes, comme l’appeloient les Grecs & les Romains. Il y a plus : au IIIe Liv. des Rois, ch. XVI, v. 31, & au IVe, ch. X, v. 18 & 19, il est dit, qu’Achab avoit honoré Baal ; il lui avoit bâti un temple que Jehu détruisit. Achab ne l’avoit fait qu’en considération d’Ethbaal, Roi de Sidon, son beau-pere ; ainsi Baal étoit un Dieu des Sidoniens. Or le Dieu des Sidoniens, au rapport d’Hésichius, étoit Jupiter, auquel, à cause de leur situation & de leur port, ils donnoient l’épithète de θαλάσσιος, Marin, ou Maritime, ce qui montre que le Baal de l’Orient étoit appelé Jupiter en Occident. Quelques-uns ont cru que Baal étoit le même que Moloch, parce qu’il signifie Roi, ce qui est à peu-près la même chose que Baal, c’est-à-dire. Seigneur.

Les Chaldéens regardoient Baal comme le Créateur du monde. Ils appelèrent ensuite de ce nom le Soleil, que les Phéniciens regardoient comme le seul Dieu du ciel. Enfin, il est vraisemblable qu’ils donnèrent ce même nom à plusieurs astres, & à des Rois, ou des Héros, en les déifiant. C’est là probablement la cause du grand nombre de Baalim qu’il y avoit dans la Chaldée & aux environs ; car c’étoit aussi un Dieu des Samaritains, des Moabites & de plusieurs Chananéens, ou Phéniciens, comme il paroît par l’Ecriture, Nombres XXII, 41. Il le mena sur les hauts lieux de Baal, & il lui fit voir de-là l’extrémité de l’armée du peuple d’Israël. Saci. Liv. des Jug. VI, 25, 3. Liv. des Rois XVI, 31, 32. Liv. 4. des Rois X, 18, 19. C’est aussi dans S. Augustin un Dieu des Carthaginois, qui étoient une colonie des Phéniciens. Mais tous ces Baalim étoient différens ; le Baal des Phéniciens n’étoit point celui des Babyloniens, non plus que le Jupiter des Grecs n’étoit point le Jupiter Ammon de la Lybie ; l’un & l’autre sont des noms communs à plusieurs Divinités. Voyez Jérém. II, 28, & S. Paul 1. Cor. VIII.

Jean d’Antioche dit que le Baal des Babyloniens est le successeur de Ninus ; mais communément on le prend pour son père & son prédécesseur, c’est-à-dire, Nemrod. Voyez le P. Pétau, De Doctr. Temp. & Ration. Temp. P. 1, Lib. cap. 2, & le P. Kirker, Œdip. T. I. Syntagma IV, c. 4, p. 262 & suiv. Le Baal ou Bel d’Egypte, est Mitsraïm, selon le P. Kirker au même endroit ; & dans son Latium, p. 5, Il dit que Baal est Cham.

Ce nom vient de l’hébreu בעל, Baal, qui signifie dominer, être maître ; d’où se fait le nom בעל, Baal, Dominus. Les Phéniciens, dont la langue étoit la même que celle des Hébreux, prononçoient aussi Baal, comme eux. Les Chaldéens, si l’on en croit Servius & d’autres anciens, prononçoient Bel ; car il faut lire dans cet Auteur Bal, & Bel, & non pas hal, & hel, comme portoient quelques exemplaires corrompus, que Giraldus & d’autres ont suivis. C’est surr le premier Liv. de l’Enéide, v. 733, 734. De ce Bel des Chaldéens, les Grecs ont fait Βῆλος, Belus. Le P. Kirker, Œdip. Ægypt. T. I. Synt. 4, cap. 4, p. 264, prétend que ce nom donné aux deux premiers Auteurs de l’idolâtrie, & qui les premiers ont reçu des honneurs divins, Mitsraïm & Nemrod, signifie celui qui est si parfait, que l’homme ne peut rien concevoir de plus grand, ni de meilleur, c’est-à-dire, Dieu entant qu’il peut, & qu’il est prêt à secourir les hommes dans leurs nécessités. Si c’est là l’idée que les peuples y ont attachée dans la suite, ce n’est pas celle que fait ce mot, à raison de son origine.

Les Orientaux donnèrent à Baal différentes épithètes, comme les Grecs & les Romains en donnèrent à Jupiter qu’ils appelèrent Olympius, Capitolinus, Latialis, Pluvius, &c. On dit de même Baal Peor, ou Beel Phegor, Beel Sephon, Béelzebub, Beelberith, soit à cause des lieux où il étoit honoré, soit à cause des bienfaits dont on croyoit lui être redevable, soit pour quelqu’autre raison, que nous expliquerons sur ces mots, ou que nous ignorons, comme a remarqué Godwin, Liv. IV, ch. 3, de son Moses and Aaron ; soit pour distinguer ces faux Dieux les uns des autres.

Au pluriel nous ne disons point Baals, comme nous le devrions dire en suivant les règles de notre langue ; mais nous prenons le pluriel hébreu, comme en fait aussi en grec & en latin. Si vous revenez au Seigneur