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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, I.djvu/963

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BOH

gomilii. Noms de certains hérétiques qui parurent dans le XIIe siècle. Leur chef, appelé Basile, fut pris & brûlé par ordre de l’Empereur Alexis Comnène. Les Bogomiles étoient une espèce de Manichéens, ou plutôt une branche des Pauliciens. Ils nioient le mystère de la sainte Trinité, & disoient que Dieu avoit une forme humaine ; que le monde avoit été créé par les mauvais Anges ; que l’Archange Michel s’étoit incarné : ils rejetoient les livres de Moyse, & ne reconnoissoient que sept livres de la sainte Ecriture. Le culte des images leur paroissoit être une idolâtrie : ils méprisoient la Croix, parce qu’elle avoit été l’instrument de la mort du Sauveur. Ils assuroient que l’Oraison dominicale étoit l’Eucharistie ; que le Baptême de l’Eglise Catholique étoit celui de Saint Jean, & que le leur étoit celui de Jésus-Christ ; que tous ceux de leur secte concevoient le Verbe comme la sainte Vierge ; enfin, qu’il n’y avoit point d’autre résurrection que la pénitence. Voyez Euthymius Zigabéne dans sa Panoplie dogmatique, Baronius & Sponde à l’an 1118.

Du Cange dit que le nom de Bogomile vient de deux mots de la langue des Bulgares, Bog, Deus, Dieu ; & milui, en latin miserere, ayez pitié ; ainsi Bogomile veut dire celui qui implore la miséricorde de Dieu.

☞ BOGOTA. Pays de cette partie de lAmérique méridionale, qu’on nomme la Terre ferme, dans la nouvelle Grenade.

☞ BOGRAS, Pogræ portæ, Pylæ amanicæ. Ville de la Turquie, en Asie, dans la Syrie, sur les frontières de la Natolie.

☞ BOGUE. s. f. Ce terme est usité en quelques provinces, particulièrement en Bretagne, pour désigner la première bourse ou coque couverte de piquans qui enveloppe la châtaigne. Echinus. Voyez Chataigne.

Bogue. s. m. Poisson de mer. Box. Rondelet dit qu’on l’appelle en grec βόηξ, parce qu’il a de la voix. Il vit près des rivages. Sa chair est d’un bon goût.

☞ Il y a un autre poisson qui ressemble beaucoup au précédent, qu’on nomme Bogue-ravel, parce qu’on le vend avec tous les autres petits poissons qu’on appelle Ravaille à Montpellier. Encyc.

☞ BOGUSLAW. Petite ville d’Ukraine, au Palatinat de Kiovie, sur la rivière de Rass.

BOH.

BOHADE. C’est en quelques provinces une corvée que le sujet doit au Seigneur, de deux bœufs, ou d’une charrette, pour aller pour lui au vin, ou en son vignoble. Ragueau.

BOHÉ. Voyez Bou.

BOHÈME. Pays d’Allemagne, qui a pour bornes au nord la Misnie, la Lusace, & une partie de la Silésie ; au levant une autre partie de la Silésie & la Moravie ; au midi l’Autriche & la Bavière, & au couchant le haut Palatinat. Bohemia. La Bohème est toute environnée de montagnes. Ceux du pays l’appellent en leur langue Cezezkazeme, qu’il faut prononcer Chezhazem, c’est-à-dire, Terre de Czechi leur premier Gouverneur ; & les Allemands Behaim, ou Boehaim. Froissard la nomme Béhaigne. Cosmas, dans les chroniques de Bohème, tire ce nom de je ne sais quel ancien Bohemus ; mais ce qu’il dit es un roman.

Quelques-uns croient que ce nom, Bohème, est sclavon, & qu’il signifie prédiction,prophétie ; que les Sclavons s’étant emparés de ce pays lui donnèrent, parce qu’il y avoit là je ne sais quelle fameuse Prophétie de Lybie. Cela sent encore bien la fable. D’autre prétendent que ce nom s’est fait de celui de Boïens, Boii, peuples de l’ancienne Gaule ; car les uns disent que les Boïens ou habitans du Cap de Buchs, en Gascogne, ayant suivi Segovèse en Germanie, au temps du vieux Tarquin, s’établirent en ce pays, auquel leur nom fut donné. C’est le sentiment de M. Cordemoy dans son Histoire de France, & celui qui paroît le plus vrai. Les autres ne remontent qu’au temps de César, & disent que ces Boïens sont les anciens habitans de ce que nous appelons aujourd’hui le Bourbonnois, qui, chassés par ce Général Romain, passèrent le Rhin, & s’établirent dans la Bohème, qui fut d’abord appelée Bojohème, en latin Bojohemus, c’est-à-dire, demeure, habitation des Boïens, & que de Bojohème s’est fait Bohème. Je trouve cependant encore entre deux Bevehem. Ademar l’appelle ainsi dans sa chronique. Ce sentiment n’a point d’apparence. César ne chassa point les Boïens du bourbonnois ; il les y plaça à la prière des Æduens. Voyez César de Bello Gall. Lib. I. & ci-après au mot Boien, ou au mot Bourbonnois.

Les Boïens établis en bohème par Segovèse, en furent chassés dans la suite par les Marcomans, peuple d’Allemagne, & ceux-ci par les Sclavons, venus de la Croatie, sous la conduite de Zechus, ou Czechus. C’est pour cela que l’on trouve quelquefois la Bohème appelée Esclavonie. Sclavonia. Voyez Acta SS. Bened. Sæc. V. p. 873.

Bohème. Royaume, Bohemiæ Regnum. Les Sclavons établis en Bohème vécurent quelque temps dans l’anarchie après la mort de leur chef ; ensuite ils se choisirent des Ducs : & ce ne fut que l’an 1086, que la bohème fut érigée en Royaume, & que Vratislas I, l’un de ses Ducs, reçut de l’Empereur Henri IV le tire de Roi dans un Concile tenu à Maïence. Ce titre ne passa point à ses successeurs, mais fut redonné à Ladislas II par l’Empereur Frédéric Barberousse : & enfin Primislas, surnomme Ortocare I, obtint de l’Empereur Philippe, que la bohème auroit le droit de s’élire des Rois. Ils en ont joui jusqu’au commencement du XVIIe siècle, que la Maison d’Autriche s’est attribué ce Royaume, & l’a rendu héréditaire. Maty, & Hoffman. C’est depuis 1620, que Ferdinand II vainquit Frédéric, Comte Palatin, élû Roi de Bohème.

Le Royaume de Bohème comprend non-seulement la bohème propre, mais encore la Moravie, la Lusace & la Silésie, qui, dans ces derniers temps, a été cédée au Roi de Prusse. Il parut, il y a quelques années, une Dissertation en forme de lettre, pour montrer que le Royaume de Bohème est électif, ou héréditaire. Goldast a fait un livre exprès pour prouver non-seulement que le Royaume de bohème est héréditaire, mais successif mâle & femelle, avec le droit de primogéniture. Plusieurs filles ont porté la Couronne de Bohème dans des Maisons étrangères. Elisabeth, fille de Sigismond, la porta à Albert d’Autrcieh. Anne, fille d’Uladislas, l’a portée à Ferdinand. Iladislas avoit des freres, & entre autres Sigismond, Roi de Pologne ; cependant Anne est préférée à ces oncles ; la Couronne de Bohème passe par son moyen pour la troisième fois dans la Maison d’Autriche. Le Royaume de Bohème est divisé en douze Provinces qu’on appelle cercles. Hoffman. Maty n’attribue cette division qu’à la Bohème propre ; & il a raison. C’est Charles qui fut élu Roi & Empereur en 1346, qui fit cette division. Nous avons l’Histoire de Bohème par Æneas Sylvius, qui fut depuis, Pie II Pape ; une autre par Dubravius, Evêque d’Olmutz, imprimée à Bâme en 1575 in-fol., Georg. Pontanus a fait Bohemia Pia.

☞ BOHÈME, ou BOHÉMIEN, ENNE. adj. & subst. Qui est du Royaume de Bohème. Bohemus, ou Bohëmus. tous les Ecrivains se servent indifféremment de ces deux mots pour désigner les peuples de Bohème. Le P. Bouhours voudroit, malgré cela, qu’on dît les peuples de Bohème, en parlant des habitans, parce que les noms de Bohème & de Bohémiens lui paroissent attachés aux coureurs de profession, dont nous allons parler : je crois qu’on feroit bien de suivre le sentiment du P. Bouhours, pour éviter l’équivoque.

Sur la Bohème & sur les Bohèmes, ou Bohémiens, Voyez Æneas Sylvius, l’Historia Bohemica de Le Mire, Cluvier, Liv. III, Geogr. ch. 13. Cromer, Liv I. Rerum Polonicarum. Nous avons une Histoire de Bohème par Dubravius. Nous avons encore en latin des mélanges historiques du Royaume de Bohème, Miscellanea historica, &c. par le Pere Bohuslas Balbin, Jésuite, imprimés à Prague en 1680, qui contiennent