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CAE

plus caduc, où l’on a perdu, & où l’on perd plus de ses forces, quoique cela ne soit pas vrai dans tous les cas.

On le dit aussi en style de Palais. Caducité d’un legs, c’est lorsqu’un legs devient caduc.

CADURCIEN, ENNE. s. Nom d’un Ancien peuple de l’Aquitaine. Cadurcus. Les Cadurciens occupoient le pays que nous nommons aujourd’hui le Quercy, & étoient, selon Strabon, un des quatorze peuples qui habitoient entre la Loire & la Garonne. Les Cadurciens furent les inventeurs des lits, ou matelas, culcitæ. Liv. XIX, c. 1. De Cadurci, on a fait dans la suite Catursi, Catorsi & Cadorsi, qui se trouve, dans des Auteurs de la basse Latinité, & de-là Cahorsin & Caorsin, qui s’est dit autrefois, & ensuite Caursin, & puis enfin Querci. Voyez Valois. Not. Gall.

CAE.

CÆADE. s. m. Gouffre ou abyme où les Lacédémoniens jetoient les criminels. Καιάδας (Kaiadas). On en attribue l’ouverture immense à un tremblement de terre. Pausanias rapporte, Liv. IV, ch. 18 que le Messénien Aristomène, y ayant été précipité, appercut un renard qui rongeoit un cadavre, & que l’ayant saisi, (apparemment par la queue) il le suivit par toutes les routes obscures de ce gouffre, que quand cet animal vouloit se jeter sur lui, il lui présentoit sa robe à mordre, qu’il arriva enfin à une ouverture par où cet animal avoit passé, & l’ayant élargie, il se sauva de la sorte.

CÆCALE. adj. Epithète qu’on donne à une veine qui reporte le sang dans l’intestin cæcum dans le tronc mésentérique.

CÆCILIA. s. f. Petit serpent dont parle Jonston, qui tire son nom de ce qu’il paroît aveugle. Sa peau brune, parsemée de tâches noirâtres & purpurines, est noire sous le ventre. À peine peut-on discerner ses dents, tant elles sont menues. Il a la langue fourchue, & rampe d’une grande vitesse. Sa morsure est dangereuse, si on n’y applique les mêmes remèdes qu’à la piquure de vipère. Dale fait mention d’après Gesner d’une thériaque préparée avec ce Serpent, & d’une eau thériacale qu’il donne pour un sudorisque dans la peste. Dict. de James.

CÆCILIUS. s. m. Nom d’homme. Ce mot est purement Latin, mais on le retient en françois, & il faut l’écrire ainsi, & non par Cécilius. Les Cæcilius étoient une des plus illustres familles de Rome. La famille des Cæcilia. Voyez Cécile.

CÆLESTIEN, ENNE. s. Nom d’hérétiques. Cælestianus, a. Les Cælestiens sont les mêmes que les Pélagiens. Voyez l’Epître de S. Jérôme à Alypius & à S. Augustin, où il appelle cette hérésie, Hæresis Cælestina, par où il semble qu’il faudroit dire Cælestin, & non pas Cælestien, mais ce pourroit être une faute de copiste, & le nom de Cælestius, l’un des principaux chefs du parti Pélagien, duquel ils ont pris ce nom, demande que l’on dise Cælestien, & non pas Cælestin. Aussi S. Augustin, de hæres. c. 41, & c. 88, les appelle-t-il Cælestiani, Cælestiens.

CAEN. Ville de Basse-Normandie, dont elle est capitale. Ce mot est monosyllable, prononcez Can, Cadomum. Caen est sur l’Orne, à trois lieues de la mer. Caen n’est pas une ville ancienne ; mais elle est belle, grande, & bien peuplée. M. Huet a fait les Antiquités de Caen, où il montre que Caen n’est point l’Otlinga ou Autlinga, dont il est fait mention dans les Capitulaires de Charles le Chauve, & dans la vie d’Aldric, Evêque du Mans, parce que l’Otlinga Saxonia est appelée pagus & pagellus, c’est-à-dire, un pays, un petit pays, & que Caen n’étoit guères alors qu’un village. Quelques Poëtes ont donné à Caen des Fondateurs illustres, comme Cadmus, Caius César, qui, à ce que l’on a prétendu, l’appeloit en raillant Caii domum, d’où s’est fait Cadomum ; ou bien un autre Caius, Maître d’Hôtel du Roi Arrus. C’est le sentiment de Guill. le Breton. Paul Emille & quelques autres Historiens ont débité ces fables comme des vérités. Le Président Fauchet a cru que Quentovicum où Charles le Chauve permet la fabrique de la monnoie dans ses Capitulaires, est Caen ; il ne savoit pas que c’étoit une ville de l’Artois à l’embouchure de la Quanche. M. de Bras veut que Caen soit le Corocotinum de Ptolomée ; mais c’étoit un port de mer, & immédiatement après avoir marqué Corocotinum, il met à l’embouchure de l’Orne. M. Huet dit que Caen paroît avoir été ville sous les premiers Normands qui s’établirent en Normandie vers le commencement du Xe siècle ; mais que l’on ignore quand elle a commencé de l’être, & qu’elle semble avoit été l’ouvrage du hazard, comme beaucoup d’autres villes, dont la situation & d’autres avantages ont obligé des hommes à s’y établir. Il croit au reste qu’il faut remonter au temps de Saxons, qui vers le VIe siècle occupèrent presque toute la côte Septentrionale des Gaules, peut-être jusqu’aux Romains ou même jusqu’aux Gaulois. Car qui peut savoir, dit-il, quand la première maison, la première hutte été bâtie à Caen ? Quoi qu’il en soit, Caen n’a eu aucune réputation avant les premiers Ducs de Normandie ; mais dès-lors ce fut une ville importante, & selon Guillaume le Breton, qui a vécu vers le milieu du XIIIe siècle, Caen étoit alors une ville si peuplée & si bien bâtie, qu’elle pouvoit presque aller de pair avec Paris.

Caen a une Université. Elle fut fondée d’abord par Henri VI, Roi d’Angleterre, en 1431, confirmée par Eugène IV en 1437, & érigée en second lieu par Charles VII, Roi de France, en 1450, quand il eut chassé les Anglois de Normandie. Il y a aussi une Académie de belles-lettres & de Physique commencée en 1652, par M. Brieux, continuée par M. Segrais, & après sa mort, érigée par lettres-patentes du Roi en compagnie réglée l’an 1705 par les soins de M. Foucault, alors Intendant de Caen. Il y a aussi à Caen une Vicomté, un Bailliage, un Presidial, un Bureau des Finances, une Election, un Grenier à sel, une Amirauté, & une Chambre des Monnoies.

Selon Messieurs de l’Académie des Sciences, Caen est au 17° 15′ de longitude, & au 49° 11′ de latitude septentrionale. Selon les astronomiques de M. Cassini, la latitude de cette ville est 49° 10′ 50″, sa longitude 17° 6′ 20″, ayant pour différence de la longitude de Paris 2° 45′ 0″ occidentale. Caen portoit autrefois de gueules au château donjonné d’or, & j’ai vu des sceaux portant ces armes. C’est visiblement une peinture de Caen, lorsque Charles VII reprit cette ville sur les Anglois, pour reconnoître sa fidélité, il changea ses armes, & lui fit porter coupé d’azur & de gueules aux trois fleurs de lys d’or ; apparemment pour être le symbole de la fortune de Caen, qui avoit été long-temps sujette aux Anglois ; car le rouge est la couleur de leur écu ; mais la ville retournant sous la domination françoise, l’azur & les fleurs de lys avoient repris le dessus. Huet. Voyez les recherches & antiquités de Caen par De Bras in-4°, à Caen 1688, ou plutôt celles de l’illustre M. Huet, qui sont beaucoup plus exactes & plus savantes. Du Chesne parle aussi de Caen dans ses antiquités des villes de France, Liv. VII, ch. 10.

Le nom ancien de Caen étoit Cathim. Il est ainsi nommé dans la charte de donation de Richard III, Duc de Normandie, datée de l’an 1026. M. Valois a cru qu’il falloit lire Cathem ; mais Cathim, Catheim, Cathem & Cathom, sont différentes prononciations d’un même mot. Cathim & Cathem étant donc la même chose, de Cathem s’est formé Cahem ; le t & le th souffrant souvent élision dans le milieu des mots, comme dans ceux de pere, mere, frere, qui sont formés de patre, matre, fratre, & comme du mot ἐσθλὸς (esthlos), les Doriens faisoient ἐσλὸς ; de Cahem s’est fait celui de Caen, le mot Cahem, se trouvant écrit dans les augmentations faites à Sigebert par Robert de Torigni, Abbé du Mont S. Michel, &