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en conversation, c’est qu’ils croiroient mal soutenir le caractère de Savans, s’ils s’abaissoient à parler de bagatelles. Bell. On ne conçoit que de l’horreur pour un Ecclésiastique qui abuse de la dignité de son caractère. Vill. En se moquant des Prêtres, on cherche aux dépens de leur caractère le ridicule de leur personne. Flech. On dit, cet homme soutient bien son caractère ; c’est-à-dire, il est constant à faire la même chose ; il ne se dément point.

On dit d’un homme qui n’a point de mission, d’autorité, ni de pouvoir pour faire quelque chose, que c’est un homme qui n’a point de caractère, qui parle sans caractère. Acad. Fr.

Caractère en Théologie, se dit d’une marque qui ne s’efface point, & que quelques Sacremens laissent dans l’ame de ceux qui les reçoivent. Caracter. Il n’y a presque point de Théologiens qui ne disent que le caractère des Sacremens est quelque chose de physique. Les Sacremens qui impriment un caractère sont le Baptême, la Confirmation & l’Ordre. Les Sacremens qui impriment un caractère, ne se réitèrent point. Le caractère est un effet que les Sacremens produisent toujours dès qu’ils sont valides, lors même qu’ils ne produisent pas la grâce à cause des mauvaises dispositions du sujet. Ainsi par exemple, lorsqu’un adulte reçoit en péché mortel la Confirmation ou l’Ordre, il ne reçoit pas la grâce, mais il reçoit le caractère.

Caractère se dit aussi de certains billets que donnent des Charlatans ou Sorciers, qui sont marqués de quelques figures talismaniques, ou de simples cachets. Caracter magicus. Ils font accroire au sot peuple qu’ils ont la vertu de faire des choses merveilleuses & incroyables, comme de faire cent lieues en trois heures, d’être invulnérables à l’armée, &c. Quand on raconte quelqu’un de ces prétendus effets, on dit qu’il faut que cet homme ait un caractère, qu’il ait fait un pacte avec le Diable.

Caractère se dit aussi des plantes. C’est ce qui les distingue si bien les unes d’avec les autres, qu’on ne sauroit les confondre, quand on fait attention à leurs marques essentielles.

☞ On appelle caractère générique, celui qui convient à tout un genre, & spécifique, celui qui ne convient qu’à une espèce. Linnæus distingue quatre espèces de caractère. Caracter essentialis, factitius, habitualis & naturalis.

Caractère, en Peinture, se dit des ☞ qualités qui constituent l’essence d’une chose & qui la distinguent des autres. Caractère des objets, caractère des passions. La pierre, les eaux, les arbres, le poil, la plume & enfin tous les animaux, demandent des touches différentes pour conserver l’esprit de leur caractère. De Piles.

Caractère se dit aussi des talens & du génie que le Peintre fait paroître, dans ses ouvrages, & de la manière dont il les traite. Le caractère de l’esprit s’annonce par la noblesse & l’élévation dans les idées, par la beauté & la magnificence dans l’invention, par le bon sens & l’intelligence dans la disposition. Le caractère de la main s’annonce par l’exécution & le coloris. Ce dernier caractère est ce qu’on appelle manière.

CARACTÉRISER. v. a. Décrire si bien le caractère de quelque chose, qu’on la reconnoisse, & qu’on la distingue de tout autre. Adumbrare, exhibere, describere, ad vivum exprimere. Ce Peintre, ce Poëte, caractérisent bien les passions qu’ils veulent représenter. Le Prédicateur en censurant, ne doit point se donner la liberté de désigner ni de caractériser les personnes. De Vill.

Caracterisé, ée. part.

CARACTÉRISME. s. m. Terme de Botanique, dont on se sert pour expliquer certaines ressemblances & conformités que les plantes ont avec quelque partie du corps humain. C’est ce caractérisme qui fait croire à quelques-uns que ces sortes de plantes sont spécifiques pour guérir les parties du corps qui leur ressemblent lorsqu’elles sont affligées. Emmanuel Konig, dans son Royamme des Végétaux, a adopté le système des caractérismes : ce qui a fait dire à M. Bernard que cet Auteur n’étoit nullement Cartésien à l’égard des caractérismes des plantes.

☞ CARACTÉRISTIQUE. adj. de t. g. Qui se dit de ce qui sert à caractériser quelque chose, ce qui marque son caractère, ce qui la distingue de toutes les autres choses. Voyez Caractère. Signe caractéristique.

☞ On le dit en Littérature de ce qui sert à caractériser les Auteurs. L’élévation & la véhémence sont les traits caractéristiques de Corneille.

☞ En Grammaire on appelle lettre caractéristique, celle qui dénote la formation d’un temps, & qui se trouve la même dans les mêmes temps. Littera designans. C’est ainsi que la Lettre R est la caractéristique de tous nos futurs françois. Les caractéristiques sont de grand usage dans la Grammaire grecque pour la formation des temps ; elles sont les mêmes dans les mêmes temps de tous les verbes d’une même conjugaison : il n’y a que le présent qui a différentes caractéristiques, & le futur, l’aoriste premier, les prétérits parfaits & plus que parfaits de la quatrième conjugaison, qui ont deux caractéristiques.

☞ On le dit encore en Grammaire, des lettres qui se conservent dans les dérivés d’un mot ; Comme le P dans nos mots dérivés de corps, de temps, corporel, temporel ; le G dans long, sang, rang, à cause de longueur, sanguin, ranger, &c.

CARADH. s. m. Feuilles d’un arbre que les Arabes appellent Selem, lesquelles servent à préparer ces beaux cuirs que nous appelons maroquins du Levant. L’Iemen, ou l’Arabie heureuse, est fertile en cette espéce d’arbres. Quelques-uns veulent que l’écorce de cet arbre, qui ressemble au tamarik, serve à tanner les maroquins, & que les feuilles s’emploient seulement à leur donner la dernière perfection. D’Herr.

CARAFE. s. f. Petite bouteille de verre de forme ronde, plus large par le bas que par le haut, propre pour verser à boire, & qu’on sert sur une soucoupe. Ampulla. On s’en sert aussi pour faire rafraîchir du vin.

☞ On dit une carafe de vin, d’orgeat, de limonade, pour dire pleine de vin, d’orgeat, &c.

☞ CARAFON. s. m. Vaisseau dans lequel on met un flacon, plein de quelque liqueur avec de la glace, pour le faire rafraîchir.

☞ On donne aussi ce nom au flacon qui contient la liqueur qu’on met rafraîchir dans le vaisseau où est la glace.

CARAGACH. s. m. Sorte de coton qui vient de Smyrne par la voie de Marseille.

☞ CARAG. Voyez Carache.

CARAGI. s. m. se dit des Commis Turcs des bureaux où se perçoivent certains droits du Grand-Seigneur. Le Douanier général ou Directeur de la Douane se nomme Caragi-Bachi. Ce mot caragi signifie aussi dans les mêmes Etats du Grand Seigneur, les droits d’entrée & de sortie qui se payent pour les marchandises.

CARAGNE. s. f. Espèce de résine qui nous est apportée de Cartagène dans l’Amérique méridionale. Elle est un peu dure, tenace, sans beaucoup de viscosité & sans se fondre, semblable à la tacamahaca, mais plus brillante, plus liquide, plus compacte, plus épaisse, & d’une odeur plus forte. Elle est très-bonne pour les tumeurs & pour toutes sortes de douleurs. En latin caragna, ou caranna.

☞ On apporte du même endroit une espèce de caragne plus pure, & claire comme le crystal, beaucoup plus excellente, & de meilleure odeur que la précédente.

CARAGROUCH. s. m. Monnoie d’argent de l’Empire, qui ne revient pas tout-à-fait à l’écu de France de 3 livres.

CARAGUATA. s. m. Sorte d’aloës qui vient du Brésil. Ses feuilles sont semblables à celles de l’aloës