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CAR

On appelle aussi Carême, le Recueil des Sermons qu’a fait un Prédicateur pendant un carême. Collectaneœ Conciones sacrœ per quadragesimam habitœ vel habendœ. Parmi les Sermonaires, il y en a quantité qui ont fait des Carêmes & des Avents. Le Carême du P. Bourdaloue est admirable.

On dit proverbialement, qu’un homme nous a prêché sept ans pour un Carême ; pour dire, qu’il nous a souvent enseigné, rebattu la même chose. On dit, que pour trouver le Carême court, il faut faire une dette payable à Pâques. On dit aussi, qu’on nous donne le Carême bien haut, quand on nous promet quelque chose qui ne viendra de long-temps.

On dit aussi figurément qu’on met le Carême bien haut, pour dire qu’on exige des choses trop difficiles. Acad. Fr. On dit aussi, que cela vient comme Mars en Carême ; fort à propos, ou bien qu’une chose revient au même temps tous les ans. On dit aussi, qu’un homme a jeûné le Carême, quand on lui veut reprocher qu’il est bien maigre, ou bien pâle.

Plus défait & plus blême,
Que n’est un pénitent à la fin du Carême, Boil.

Les Turcs ont aussi leur Carême, qu’ils appellent Ramazan ou Ramadan. Voyez ce mot.

CARÊME-PRENANT, s. m. On appelle ainsi le jour du Mardi qui précède le Carême, & quelquefois tous les trois jours gras qui précèdent le Mercredi des Cendres. Geniales ante quadragenarium jejunium dies. On disoit autrefois carême-entrant. Les Gascons disent Carmentran ; & dans la basse latinité on a dit Carmentranus. Du Cange. On a aussi appelé carniprivium, le Carême ; & carnivora le Mardi gras, à cause que ce jour-là on consume tout ce qui reste de chair ; & carnicapium, en espagnol Carnes tollendas. Carême-prenant est du style familier.

On appelle aussi des Carêmes-prenans, des gens du peuple qui se masquent de cent façons ridicules, & qui courent les rues. Plebecula larvata.

On dit aussi des personnes mal mises qui mettent des habits extraordinaires, qu’ils sont habillés en vrais Carêmes-prenans. On dit que vous voulez donner votre fille à un Carême-prenant. Mol. Vous voilà fait comme un Carême-prenant.

On dit proverbialement, qu’il faut faire son Carême-prenant avec sa femme, & Pâques avec son Curé. On dit aussi populairement, tout est de Carême-prenant : pour excuser certaines libertés que l’on croit plus permises ce jour-là.

CARENAGE, s. m. & par corruption, CRAN, & CRANAGE. C’est un endroit sur le bord de la mer, commode pour donner carène aux vaisseaux. Locus carinandis navibus, reficiendœ navi, idoneus.

Carenage se dit aussi de l’action de caréner un vaisseau, ou de l’effet de cette action.

CARENCE, s. f. Défaut, terme de pratique, qui se trouve dans l’Ordonnance des Eaux & Forêts, qui veut que les exploits de carence de biens ou d’insolvabilité, ne soient valables, s’ils ne sont fortifiés de bonnes preuves. Faire un procès verbal de carence de biens. Un procès verbal de carence de biens équipolle à un inventaire, lequel on ne peut pas faire quand il n’y a rien à inventorier. On fait un procès verbal de carence de biens pour n’être point soupçonné de recelé. ☞ Exploit, procès-verbal de carence, par lesquels on constate qu’on n’a trouvé aucun effet à inventorier.

Ce mot vient du Latin carentia.

CARÈNE, s. f. Terme de Marine. C’est la quille d’un vaisseau, qui est une longue & grosse pièce de bois, ou plusieurs mises bout à bout l’une de l’autre de proue en poupe, pour servir de fondement au navire, & sur laquelle se fait l’assemblage. Trabs.

Ce mot vient du Latin carina.

Carène, se prend encore en termes de Marine, pour la partie du vaisseau qui est depuis la quille jusqu’à la ligne de l’eau. Carina, imus alveus. C’est le creux du vaisseau, ou le fond de cale, ☞ toute la partie du vaisseau qui est sous l’eau quand il est en état de faire voile ; on la nomme aussi œuvres vives.

Carène, signifie aussi le radoub d’un vaisseau ou des parties basses d’un vaisseau. On dit en ce sens, Donner la carène à un vaisseau, mettre un vaisseau en carène. On dit donner carène, quand on met le navire sur le côté pour le calfater, pour fermer les voies d’eau, pour lui donner le suif, pour le radouber dans ses œuvres vives. Les vaisseaux de guerre reçoivent la carène, ou les œuvres de marée de trois en trois ans.

Carène (Demi), se dit, lors qu’en voulant caréner un vaisseau, on ne peut travailler que sur la moitié de son fond par dehors, & qu’on ne peut aller jusqu’à la quille. Carène entière se dit lors qu’on peut travailler sur tout le fond jusqu’à la quille.

CARÈNE, s. f. En fait de coquillages, est le fond d’une coquille, tel que celui de l’Arche de Noé, ou du Nautille.

CARÉNER, v. a. Donner carène au vaisseau, le mettre sur le côté ; l’appuyer sur le ponton, afin qu’il présente aux Calfateurs la partie qui a besoin d’être carénée, en lui donnant radoub, ou le suif. Carinare, navem reficere. On dit autrement, le mettre à cran, par corruption de carène.

Caréné, ée, part. passif. Vieux vaisseau caréné.

CARENTAN, s. m. Carentonium. Ville de France dans la basse Normandie au Confluent de la Douvre & du Carentey, ou Carentan, qui lui a donné son nom.

CARESSANT, ANTE, adj. Qui a coutume de caresser. Blandus. Vous n’êtes ni trop caressante, ni trop flatteuse. Le Ch. de M. Remarquez dans Térence un vieillard avare & rébarbatif, qui s’avise tout d’un coup de devenir caressant & libéral. P. le Boss. Les petits chiens sont des animaux fort caressans.

CARESSE, s. f. Démonstration d’amitié, ou de bienveillance, qu’on fait à quelqu’un par un accueil gracieux, par quelque parole obligeante, par ses actions ou par ses discours. Blanditiœ, amoris significatio. Il se dit des hommes, & de quelques animaux. Ce Prince a fait bien des caresses à cet Envoyé. Les caresses des femmes sont trompeuses. Les chiens font des caresses à leurs maîtres. Remarquez le rire forcé, & les caresses contrefaites d’un Courtisan. La Bruy.

Je vous vois accabler un homme de caresses. Mol.

On dit figurément qu’il ne faut pas se fier aux caresses de la fortune.

CARESSER, v. a. Faire des caresses. Blanditiis lenire, permulcere. La foiblesse de l’homme c’est d’aimer qu’on le caresse. On dit aussi caresser un cheval, un chien.

Quel avantage a-t-on qu’un homme vous caresse,
Lorsqu’au premier faquin il court en faire autant ?

Molière.

Le P. Bouhours remarque que faire des caresses, ne se dit guère que sérieusement, & ne signifie que traiter les gens d’un air qui marque qu’on les aime, ou qu’on les estime, & que caresser se dit plus en badinant & au regard des enfans, à qui on fait de petites amitiés. Il faut nous flatter & nous caresser comme des enfans, pour nous tenir en bonne humeur. Essais de Mor. Le Roi lui fit beaucoup de caresses, (Artabaze) à cause de l’amitié qu’il avoit eue avec le Roi Philippe son frère. Vaug. Voyez le II. Tome des Remarques du P. Bouhours sur la Langue Françoise, p. 423. in-12.

Caresser le nu, chez les Peintres, c’est travailler, jeter les draperies de manière à faire ap-


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