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conçu de nous, ou la réputation, ils ont tous leur idée propre qui les caractérise.

Célèbre ne se dit que de celui qui a acquis de la réputation, fondée sur un mérite de talent ou de science, qui sans le placer dans le grand, & sans emporter l’idée de dignité, fait néanmoins honneur au sujet. Il y a des Auteurs célèbres, qu’il n’est pas permis de blâmer, même dans ce qu’ils ont de blâmable, sans faire courir beaucoup de risque à sa propre réputation.

Illustre marque une réputation fondée sur un mérite accompagné de dignité & d’éclat, qui fait non-seulement connoître, mais encore estimer le sujet, & le place dans le grand. Les Princes brillent pendant leur vie, mais ils ne sont illustres dans la postérité que par les monumens de grandeur, de sagesse & de bonté qu’ils laissent après eux. Les hommes illustres : on comprend sous cette dénomination les Ministres, les Capitaines, les Magistrats distingués, même les Gens de lettres qui joignent des dignités au mérite littéraire.

Fameux ne désigne que l’étendue de la réputation, fondée sur une simple distinction du commun qui fait parler du sujet dans une vaste étendue de contrées Se de siècles, soit que cette distinction se prenne en bonne ou en mauvaise part. Erostrate brûla le temple d’Ephèse pour se rendre fameux. Il y réussit, par la défense que les Juges firent de prononcer son nom.

Renommé offre l’idée d’une réputation, fondée sur la vogue que donne le succès ou le goût public, qui sans procurer beaucoup d’honneur au sujet, rend son nom connu dans le monde. Il seroit presque synonyme à fameux, s’il se prenoit en bonne & en mauvaise part. Il paroît outre cela marquer une réputation moins étendue. Les Gobelins ont été des teinturiers si renommés que leur nom est demeuré au lieu où ils travailloient & aux ouvrages que d’autres ont continué après eux. Les vins de Champagne, Bourgogne, sont renommés. Il suffit d’être renommé dans un art, pour faire fortune.

Fameux, célèbre & renommé se disent des personnes & des choses. Illustre ne s’applique qu’aux personnes, du moins quand on veut être scrupuleux sur le choix des termes,

Illustre, célèbre, renommé se prennent toujours en bonne part. Fameux en bonne ou mauvaise part. Un fameux Capitaine, un fameux Voleur, si l’on dit un homme célèbre par ses crimes, comme on le trouve dans le Dictionnaire de l’Acad. Fr. & même ailleurs, c’est un abus de terme. Fameux est le vrai mot. voyez les Synonymes de M. l’Abbé Girard.

Célèbre se dit aussi de ce qui se fait avec cérémonie & solennité. On fit une célèbre fête au sacre, au mariage du Roi.

CÉLÉBRER, v. a. Honorer quelqu’un par des louanges, par des monumens, fêtes, inscriptions, ou trophées qu’on fait en son honneur. Celebrare. Les Anciens ont célébré la gloire de leurs Héros par tous les moyens qu’ils ont pu imaginer. Alexandre envioit le bonheur d’Achille, qui avoit trouvé un excellent Poëte pour célébrer ses louanges. Vaug.

CÉLÉBRER, signifie aussi, solenniser. Festa colere, diem festum agere. Il faut célébrer les grandes fêtes avec plus d’éclat que les ordinaires. Les Payens célébroient les jeux Olympiques tous les cinq ans. Ludos celebrare.

CÉLÉBRER se dit plus ordinairement des cérémonies Ecclésiastiques ; & on dit sur-tout, célébrer la Messe, ou absolument célébrer, pour signifier, dire la Messe. Facere, rem divinam facere. Célébrer la Messe dans le VIIIe siècle, signifioit souvent y assister, & se disoit des Laïques. Ainsi Sigebalde, Roi d’Westsex en Angleterre, dit dans une lettre à S. Boniface, qu’en célébrant la Messe il fait réciter son nom comme celui des Evêques d’Angleterre. C’est qu’en latin, d’où cette expression est prise, Celebrare, signifie, hanter, fréquenter, se trouver en quelque lieu. Ainsi dans les bons Auteurs celebrare silvas, celebrare templa, celebrare alicujus domum, potentum limina, signifie, aller dans les forêts ; être assidu au temple ; hanter la maison de quelqu’un, fréquenter les Palais des Grands. Mais ce sens n’a point passé dans notre langue, ou n’est point venu jusqu’à nous. On dit pareillement, célébrer un Concile ; pour dire, tenir un Concile.

Célébrer se dit encore du mariage qu’on fait avec toutes les solennités du Droit Civil & Ecclésiastique. Célébrer des noces, les faire avec beaucoup de magnificence & d’éclat. Agere solennem nuptiarum diem.

Célébré, ée. part.

CÉLÉBRITÉ, f. f. Solennité, cérémonie qui rend une action célèbre. Celebritas. La célébrité des jeux, La célébrité des noces. La célébrité des funérailles. Ludorum, nuptiarum, funerum solennia. L’entrée des Légats se fait avec beaucoup de célébrité. Il se dit aussi des personnes, & alors il signifie, grande réputation. Il a toujours eu beaucoup de célébrité, La célébrité que donne l’Histoire à ceux qui ont cultivé la vertu, & l’infamie dont elle note les scélérats, sont de puissans moyens pour inspirer l’amour de la vertu, & l’horreur du vice. Boss. Voyez Célèbre.

CÉLÉEMENT. adv. Vieux mot, qui veut dire, en secret. Clàm, secretò, celanter. Il vient de celare, celer, cacher, Crétion est un accroissement de ce qui vient céléement. Traduct. des Instit. de Justin. C’est-à-dire, sans qu’on s’en apperçoive, insensiblement.

CELENO. s. f. est le nom d’une des Pleyades, filles d’Atlas,

☞ C’est aussi le nom d’une des Harpies, fille de Jupiter & de la terre, dont Virgile a donné la description dans le troisième livre de l’Eneïde, Voyez Harpies.

CELEP. s. m. Liqueur, breuvage des Orientaux. Ils le trouvent délicieux. Il est sucré & ambré. Les Turcs appellent cette liqueur ou plutôt cette boisson saleb. On la boit chaude, & la racine de satyrion en fait la base.

CELER. v. a. Tenir une chose cachée, & secrète, ☞ n’en pas donner connoissance, la taire, & non pas la déguiser, comme le disent les Vocabulistes. Celare, occultare, tegere. Un bon Capitaine doit celer ses desseins à tout le monde. La nature a bien des secrets qu’elle a celés aux hommes. La plus grande discrétion d’un Amant est de celer son bonheur.

Soupirs d’autant plus doux qu’il les fallait celer.
Racine.

La coutume des Perses est de celer le secret avec une fidélité merveilleuse. Vaug.

On dit aussi qu’un homme se fait celer, quand il fait dire qu’il n’est pas chez lui, quoiqu’il y soit effectivement.

Celé, ée. part.

CELÈRES. s. m. pl. Celeres. Les Célères étoient un Corps ou Régiment de la garde des Rois Romains établi par Romulus, & composé de trois cens jeunes gens, choisis parmi les plus illustres familles de Rome, approuvés par les suffrages des Curies du peuple dont chacune en fournissoit dix. Ils étoient toujours auprès de la Personne du Roi, pour le garder & pour recevoir ses ordres & les exécuter. A la guerre ils étoient à l’avantgarde quand il faloit donner le combat qu’ils commençoient toujours les premiers, & dans la retraite ils faisoient l’arrière-garde. Quoique ce fût un corps de cavalerie, ils mettoient pied à terre, & combattoient à pied, par-tout où la cavalerie ne pouvoit agir. Leur Commandant s’appeloit Tribun des Célères. Tribunus Celerum. Il faisoient trois compagnies de cent maîtres chacuoe, qui avoit un Capitaine nommé Cen-