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copermutant. De même si le Bénéfice est requis par un Indultaire ou par un Gradué, ou rempli par le Patron, en ce cas encore la collation devient nécessaire & involontaire. La collation nécessaire entre deux Patrons qui conferent alternativement, remplit le tour de celui qui est forcé à conférer. La collation des Bénéfices fait partie des fruits de l’Evêché vacant en Régale ; & elle appartient au Roi, qui les confére de plein droit, de même que l’Evêque auroit fait. Voyez Fleury.

Collation, en termes de Palais, signifie la représentation & confrontation d’une copie à son original, pour voir si elle est conforme, & l’acte qui en rend témoignage, que donne la personne publique qui a pouvoir de le faire. Collatio exscriptorum cum archetypis. Ainsi on met au bas d’une copie, collation a été faite de cette copie à son original, par moi Notaire soussigné ; ce fait, rendu. Quand le Notaire déclare qu’il a en la minute entre les mains, la collation vaut un original, pourvû que toutes les parties intéressées aient été appelées à la collation.

Collation est aussi le repas qu’on fait les jours de jeûne, au lieu de souper, & où l’on ne doit manger que des fruits. Cænula. Le P. Lobineau remarque, dans son Hist. de Bret. L. XXII, p. 847, qu’autrefois on ne mangeoit point de pain à la collation en Carême ; mais seulement quelques confitures & des fruits desséchés, & que cette coutume duroit encore en 1513. Le Cardinal Humbert, dans sa réponse à Nicetas, au milieu du onzième siècle, dit que les Latins observoient exactement le jeûne du Carême, & ne souffroient pas que personne le rompît, s’il n’étoit grièvement malade. Il ajoute qu’il n’étoit pas même permis, comme chez les Grecs, de prendre des fruits & des herbes les jours de jeûne après le repas unique que l’on faisoit ; ce qui montre que les collations ont commencé chez les Grecs vers le onzième siècle.

Collation est encore le repas qu’on fait entre le dîner et le souper, que les enfans appellent goûter, Merenda, ou un petit repas qu’on fait en passant à la hâte. Voulez-vous faire une petite collation ? En Languedoc & en Poitou, collation signifie le déjeûner.

Collation est pareillement un ample repas qu’on fait au milieu de l’après-dinée ou la nuit. Il y aura chez le Roi bal, ballet, & collation ; lautæ epulæ. On a servi une collation où il y avoit de la viande & des fruits, qu’on appelle autrement un ambigu. La nuit on l’appelle à la ville réveillon, à la Cour un médianoche.

Remarquez que quand ce mot est employé dans la signification d’un léger repas, on ne prononce les deux ll que comme une seule.

Ce mot vient de collatio, dont les Latins ont usé en cette signification, en parlant des sobres repas ecclésiastiques faits aux jours de jeûne, à l’issue des conférences qu’on faisoit dans les Monastères après Vêpres, avec des harangues à l’honneur du Saint dont on solemnisoit la Fête. Pasquier. Par la même raison du Cange le dérive de collocutio, ou conférence : car on prétend qu’originairement la collation n’étoit qu’une conférence de piété qui se faisoit dans les Monastères : dans la suite on introduisit la coutume de faire apporter quelques rafraichissemens ; & par l’excès où l’on porta ces sobres repas, le nom de l’abus est demeuré, & celui de la chose même s’est perdu. Ce mot s’est depuis étendu à tous les autres repas qu’on fait depuis dîner.

Collation lustrale. Impôt qui se levoit dans l’Empire Romain sur les marchandises. Collatio lustralis. Gratien exempta les Clercs marchands de la Collation lustrale. Fleury. On dit aussi, contribution lustrale.

☞ COLLATIONNER, v. a. ne se dit point dans le sens de conférer un bénéfice, si ce n’est dans cette phrase, où par une mauvaise allusion, on dit que l’ordre de Citeaux dîne bien, mais collationne mal, pour faire entendre que les Abbayes de cet ordre ont de gros revenus, mais n’ont pas la collation des bénéfices qui en dépendent.

☞ COLLATIONNER, signifie conférer un écrit avec l’original, comparer deux écrits ensemble, pour vérifier s’ils sont semblables, s’il n’y a rien de plus ou de moins dans l’un que dans l’autre. Collationner à l’original, sur l’original, sur les registres. Exscripta exempla ex archetypo recognoscere, scripti fidem as rationem archetypi expendere. Plusieurs anciens titres ne sont que des vidimus, & des copies collationnées. Maintenant on n’ajoute point de foi aux copies qu’on n’a pas collationnées, parties présentes ou appelées.

Collationner, en fait de Librairie, est, vérifier s’il ne manque point de feuilles à un livre, soit par les signatures ou la reclame à l’égard des cahiers, soit par les chiffres à l’égard des feuillets. Explorare foliorum fidem.

☞ En termes d’Imprimerie, c’est vérifier sur une seconde épreuve si toutes les fautes marquées sur la précédente épreuve ont été corrigées.

Collationner signifie aussi faire ce petit repas qu’on appelle collation. Cænulam, merendam sumere. Il est difficile de souper, quand on a bien collationné.

☞ Alors ce verbe est neutre, & s’emploie absolument sans faire sentir les deux ll.

☞ COLLATIONNÉ, ÉE. part. Il a les significations du verbe actif. Copie collationnée à, sur l’original. Écrit collationné. Collatus.

COLLAUDER, vieux v. a. Louer. Collaudare.

COLLE. s. f. Ce qui sert à joindre, à attacher du papier, du parchemin, du cuir sur du bois, sur de la pierre, ou autre matière semblable. Gluten, glutinum. La colle ordinaire se fait avec de la farine détrempée & cuite avec de l’eau. Elle sert aux Relieurs, Imagers, Selliers, Cordonniers, Vitriers.

Ce mot vient du Grec κόλλα (kolla). Nicod.

La colle de gand se fait avec des rognures de gand ou de parchemin bien trempées dans l’eau, & bouillies, qui sert particulièrement aux Doreurs sur le bois, & qui peut servir de vernis.

Colle forte, est celle qui se fait avec des piés, des peaux, des nerfs, des cartilages de bœuf, qu’on fait macérer quelque temps, puis bouillir fort long temps jusqu’à ce que le tout devienne liquide. Taurinum glutinum. On la passe au travers d’un gros linge, & on la jette sur une pierre platte où elle se congèle ; & on la coupe par morceaux. On l’appelle en quelques lieux colle de cerf ; & Mathiole dit qu’il s’en fait de cuir de toutes sortes de bêtes à quatre piés. La meilleure est celle qui vient du taureau, qui est blanche & claire, & qui se fait à l’Île de Rhodes. Elle sert aux Menuisiers pour coller & joindre leur bois, ou les ornemens de gros carton. Il est défendu par plusieurs statuts d’Artisans, d’employer de la colle forte faite avec des rognures ou parures de cuir.

Il y a aussi de la Colle à miel, dont se servent les Doreurs, qu’ils appellent bature. On la prépare en mêlant du miel dans de l’eau de colle avec un peu de vinaigre.

Colle à Pierre. Les Marbriers appellent ainsi une espèce de mastic, dont ils se servent pour rejoindre les marbres, qui se sont cassés, ou écornés. Ils la composent ordinairement de poudre de marbre bien broyé, de colle forte, & de poix, en y ajoutant quelque couleur, qui la rende semblable aux marbres qu’on veut rejoindre.

Colle de Poisson, est une colle de couleur blanche qui se fait d’une sorte de poisson qui est des plus gros, cartilagineux, & qui n’a point d’os, excepté à la tête : il est de la longueur de vingt-quatre piés, & du poids de quatre cens livres. Icthyocolla. On en prend la peau, l’estomac, les intestins, les aîles & la queue ; on les fait cuire ensuite sur un petit feu jusqu’à la consistance de bouillie ; après