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COM

frere & sœur, ils n’avoient point de commerce ensemble, ils ont été plusieurs années ensemble sans avoir aucun commerce. Dans ces exemples, commerce s’entend d’un commerce légitime, & ce mot placé, comme il est, ne présente à l’esprit aucune idée de débauche ; c’est donc à tort que quelques Critiques se sont scandalisés de cette expression du Nouveau Testament traduit par le P. Bouhours : Marie sa mere ayant été mariée à Joseph se trouva enceinte par la vertu du S. Esprit, avant qu’ils eussent commerce ensemble, comme si le mot de commerce blessoit les oreilles chastes, & devoit passer pour une impropriété & un terme deshonnête.

Commerce se dit encore en Philosophie de la correspondance mutuelle de l’ame & du corps, c’est-à-dire, de l’action de l’ame sur le corps, & du corps sur l’ame. Ce commerce peut être conçu de deux sortes, comme physique ou moral. Commerce physique de l’ame & du corps, c’est, comme je l’ai dit, l’action mutuelle du corps & de l’ame l’un sur l’autre. Le commerce moral est celui qui seroit, s’il n’y avoit que des causes occasionnelles, c’est-à-dire, si c’étoit Dieu qui, à l’occasion de certains mouvemens du corps, produisît en l’ame certaines perceptions ou sentimens, & à l’occasion de certaines perceptions, certains mouvemens dans le corps. Ce commerce moral est une chimère dangereuse en matière de Religion & de mœurs, & qui détruit absolument la volonté, la liberté, le mérite & le démérite, & toutes les vertus & les mœurs.

Commerce. s. m. Jeu de cartes qui se joue avec le grand jeu complet, & depuis trois personnes jusqu’à huit ou neuf. L’as est la première carte, & les autres suivent à l’ordinaire : on en donne à chacun trois. Chacun met devant soi un pareil nombre de jetons appréciés à ce qu’on veut. Chacun vise à avoir tricon, séquence, ou le point ; car ce sont les uniques choses qui gagnent. Le tricon l’emporte sur tout, la séquence après, & le point le dernier. Pour parvenir à cet avantage, on commerce avec le Banquier, c’est-à-dire, celui qui a fait, en changeant une de ses cartes contre une du talon qu’il vous délivre, & lorsqu’on a trouvé ce que l’on cherche, on déclare qu’on s’y tient. Ce jeu se joue quelquefois d’une manière bien plus compliquée, mais quelquefois moins.

COMMERCER, v. n. Faire commerce. Habere commercium. Ce Banquier commerce d’argent. Ce Marchand ne commerce que d’épicerie, que de soies, &c. Commercer aux Indes, dans le Levant.

COMMERCI. Ville de Lorraine, capitale d’une Seigneurie de même nom. Commercium, Commerciacum. La Seigneurie de Commerci est dans le Duché de Bar. La ville de Commerci est sur la Meuse.

COMMERE, s. f. Celle qui a tenu avec quelqu’un un enfant sur les fonts de Baptême. Quæ puerum de sacro fonte suscepit ; Matrina. Celui qui a été le parrain d’un enfant, est le compere de celle qui en est la marraine, & réciproquement la marraine est la commere de celui qui en a été le parrain. Le pere & la mere de l’enfant sont comperes & commeres de ceux qui ont été parrains ou marraines de leurs enfans. Il y a alliance spirituelle entre le pere de l’enfant & la commere qui a servi de marraine ; ils ne se peuvent marier sans dispense. Le Pape Etienne appelle souvent dans ses lettres le Roi Philippe son compere & la Reine Bertrade sa commere, & les deux Princes leurs fils ses enfans spirituels ; ce qui fait croire qu’il fut leur parrain, & montre que ces noms consacrés par la Religion étoient alors des titres d’honneur ou du moins qu’ils n’étoient point du style bas & familier, comme aujourd’hui.

Commere. Ce mot, aussi-bien que celui de compere, se dit dans les apologues, des animaux entre lesquels on suppose de l’union & de l’amitié.

L’onde étoit transparente ;
Ma commere la carpe y faisoit mille tours
Avec le brochet son compere. La Font.

Commere se dit aussi d’une femme de basse condition qui fait l’entendue, qui parle de tout à tort & à travers, & qui veut savoir toutes les nouvelles du quartier. Mulier jactuosa, jactabunda, ostentarix, alicujus inter suos suasque nominis. Connoissez-vous cette femme ? c’est une commere, une vraie commere. On dit aussi, d’une femme, c’est une bonne commere ; pour dire, qu’elle est hardie & rusée, qu’elle va à ses fins sans se mettre en peine de rien.

On dit proverbialement, tout va par compere & par commere ; pour dire, que c’est la faveur & la recommandation qui font tout.

COMMETTAGE, s. m. terme de Cordier. Réunion de plusieurs fils, de plusieurs torons ou cordons par le tortillement.

COMMETTANT, s. m. Terme de Commerce & de Pratique. Celui qui donne à un autre commission de faire quelque chose. Son commettant lui a donné ordre d’acheter telles marchandises.

Commettant se dit aussi en termes de Négociations.

☞ COMMETTEUR, s. m. terme de Corderie. Celui qui commet. Voyez Commettre, terme de Corderie.

COMMETTRE, v. a. ☞ qui a plusieurs acceptions. Il est synonyme à faire : mais alors il ne le prend qu’en mauvaise part, & ne se dit que de ce qui est péché, crime ou faute. Commettre un crime, une faute, une mauvaise action. Faire est plus général, & se dit des actions bonnes & mauvaises. On ne peut pas dire commettre une bonne action. Facinus, scelus, flagitium committere, admittere ; scelere obstringere. Il a commis une méchante action, un crime, une faute légère, une irrévérence dans l’Eglise. C’est commettre une incivilité que, &c. commettre un assassinat.

Commettre signifie aussi, confier quelque chose à la prudence, à la fidélité de quelqu’un. Aliquid prudentiæ, fidei alicujus committere, credere, concredere. Cet homme est habile, on peut commettre à ses soins les choses les plus importantes. Il a commis la conduite de son fils aux soins, à la vigilance de ce Gouverneur. On lui a commis le soin de cette affaire.

Commettre signifie aussi, employer à quelque recouvrement, préposer pour quelque affaire. Rem aliquam alicui committere, mandare, demandare, præponere aliquem alicui rei. Ce Financier a commis plusieurs personnes en plusieurs Bureaux pour la recette des droits du Roi. Il a été commis pour avoir soin, &c.

Commettre signifie encore, donner pouvoir d’exercer une charge de Judicature, ou autre charge, en la place d’un Titulaire. Vicarias alicujus partes alteri tradere. On a interdit un tel Bailli & on a commis un tel pour l’exercice de sa charge. S’il néglige de se faire recevoir, on commettra à sa place. Un Intendant a pouvoir de commettre & de subdéléguer. Commettre quelqu’un à une charge, à un emploi. On ne le dit que des personnes.

Commettre se dit aussi au Palais, du pouvoir qui est donné par les Juges à des Officiers particuliers de leurs Corps, ou à des étrangers, de faire le rapport ou l’instruction d’une affaire. Curam, negotium mandare, demandare. Le Pape commet des Prélats du Royaume pour juger des appellations qui lui sont dévolues, pour faire la fulmination de ses Bulles. Les Présidens commettent des Conseillers pour faire des informations, des instructions à la barre des adjudications, pour voir des procès, les examiner, & en faire le rapport. Ils commettent des Juges de la Province pour faire des visites, des descentes, des arpentages, pour