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COU

COUDÉ, ÉE. adj. Qui est ployé, qui fait un angle, un coude. Angulatus, inflexus. Il y a beaucoup d’outils qui sont coudés.

COUDÉE, s. f. mesure dont usoient les Anciens, & surtout les Hébreux, qui étoit prise sur la longueur ordinaire du bras de l’homme depuis le coude jusqu’au bout de la main. Cubitus. Elle avoit en sa moyenne grandeur un pié & dix pouces de roi. La plus petite n’avoit qu’un pié & cinq pouces : & la plus grande, ou coudée géométrique, étoit de deux piés & deux pouces de roi. Le Père Mersenne fait la coudée hébraïque d’un pié, quatre doigts & trois lignes, par rapport au pié du Capitole. Héron fait la coudée géométrique de vingt-quatre doigts, & Vitruve fait le pié des deux tiers de la coudée, c’est-à-dire, de seize doigts. L’Arche de Noé avoit trois cens coudées de long, cinquante de large, & trente de haut ; & sa fenêtre étoit d’une coudée.

On dit figurément, avoir ses coudées franches ; pour dire, être au large, avoir liberté de bâtir, de s’étendre, de se promener, de tout faire sans être gêné, ni repris de personne. Laxo & liberiore uti loco, spatio. On le dit sur tout des libertés qu’on prend à la table, quand on a ses coudes sur la table, & quand on y est assis au large. On dit aussi, qu’un homme n’a qu’une coudée ; pour dire, qu’il est nain, qu’il est fort petit. Cubitalis.

COUDELATTE, terme de Charpenterie. Ce sont dans la construction d’une galère, des pièces de bois plus épaisses par les extrémités que par le milieu, & qui reçoivent une longue pièce de bois de quatre pouces en carré, qu’on appelle tapière.

COUDER, v. a. terme de Tailleur. Faire le coude d’une manche ; donner à la partie de l’habit qui couvre le coude, la forme qu’elle doit avoir. Cubito manicam aptare. Couder une manche de pourpoint, de juste-au-corps. Cette manche est bien coudée.

Couder se dit généralement des choses qu’on plie en forme de coude. Couder une barre de fer ; couder une branche de vigne, la coucher ou plier en angle obtus.

COUDOYER, v. a. heurter quelqu’un avec le coude. Pulsare aliquem cubito. Il coudoya ceux qui étoient assis autrès de lui. Ablanc. Je coudoie les plus proches pour me faire place. Id.

COUDRAIE. s. f. lieu planté de coudriers. Coryletum. En quelques lieux on l’appelle coudrette. On trouve couldrai s. m. dans C. Etienne. On ne le dit plus.

COUDRAN. s. m. composition de certaines herbes mêlées de plusieurs ingrédiens, dont se servent les bateliers de Paris pour empêcher que les cordes ne se pourrissent. On dit plus ordinairement goudron, qui n’est autre chose qu’une poix noire & liquide. Pix liquidi.

COUDRANNER, v. a. tremper une corde dans le coudran.

COUDRANNEUR. s. m. ouvrier qui trempe les cordes dans le coudran.

COUDRE. s. m. arbre qui porte des noisettes, Corulus. Voyez Coudrier.

COUDRE, v. a. Je couds, tu couds, il coud, nous cousons, &c. je cousis, j’ai cousu, je coudrai. Que je couse, que je cousisse, je coudrois. Joindre, assembler deux ou plusieurs choses avec du fil ou de la soie ou quelqu’autre chose semblable, passée dans une aiguille, ou dans quelqu’autre outil analogue à l’aiguille, poinçon, alêne, &c. suere, consuere. Coudre une chemise un habit, des boutons à un habit, des manchettes à une chemise. Les Cordonniers, les Bourreliers, cousent les cuirs avec les alènes. Les Chirurgiens cousent délicatement les plaies. Jupiter cousit le petit Baccus dans sa cuisse. Bens. On a dit autrefois couser à l’infinitif ; & de-là vient que quelques-uns disent encore je couserai, au futur ; mais mal.

Ce mot vient de consuere. Nicod. D’autres le dérivent de l’hébreu cout, qui signifie du fil. Ou plutôt il vient de cusare, qui se trouve dans la même signification au deuxième Livre des miracles de S. Bertin, C. 5. Cet ouvrage est du commencement du dixième siècle. De cusare on a fait cousre, & ensuite coudre.

Coudre se dit figurément des passages d’Auteurs, des histoires, & autres choses qu’on ajoûte ☞ dans les ouvrages d’esprit, qu’on adapte les uns aux autres pour en former un tout. Quelques passages cousus ensemble, formoient tout son discours. J’aurois toujours des mots pour les coudre au besoin. Boil. assuere. Juste Lipse a fait un livre de Politiques, où il n’a mis que des particules pour coudre les partages des Auteurs. Desmarêts a dit dans les Visionnaires. Il ne faudroit qu’y coudre un morceau de Roman.

☞ On dit figurément & familièrement qu’il faut coudre la peau du renard avec celle du lion ; pour dire, joindre la ruse à la force, la finesse avec la prudence. Consociare.

☞ Et en parlant d’une affaire désespérée, d’un mal arrivé, ou prêt d’arriver, on dit dans le même style qu’on ne sait plus quelle pièce y coudre, c’est-à-dire quel remède y porter.

Cousu, ue, part. pass. & adj. Sutus, consutus.

En termes de Blason, on appelle un chef cousu, quand il est de métal sur métal, ou de couleur sur couleur. Il est expliqué à Chef. Quelques-uns l’étendent aux autres pièces honorables de l’Ecu.

Cousues (Finesses) de fil blanc. Voyez Finesse et Fil.

☞ En termes de Manège, on dit d’un cheval maigre & efflanqué, qu’il a les flancs cousus.

☞ Et dans le langage ordinaire d’un homme exténué, qu’il a les joues cousues. Un homme cousu d’écus, qui a beaucoup d’argent comptant. Cousu de coups, couvert de blessures.

☞ On dit aussi d’un homme dont le visage est fort marqué de petite vérole, qu’il en a le visage tout cousu. Un habit cousu sur quelqu’un, qui prend bien la taille, bien juste. Bouche cousue. Ne dites mot, gardez le silence. La plupart de ces expressions figurées ne sont que du style familier,

COUDREMENT. s. m. Les Tanneurs disent : mettre les cuirs en coudrement pour signifier, les mettre étendus dans la cuve avec de l’eau chaude & du tan, pour les rougir ; ce qui s’appelle les brasser, ou coudrer, pour leur donner le grain.

COUDRER, v. a. ou brasser les cuirs. C’est les remuer, en tournant pendant un certain temps dans la cuve avec le tan & l’eau chaude pour les rougir.

COUDRETTE ou COULDRETTE. s. f. vieux mot. Coudraie. Lieu planté de coudriers. Coryletum. Il se dit encore en quelques endroits.

COUDRIER ou COUDRE. s. m. arbre qui porte des noisettes, & qu’on appelle autrement Noisettier. Corylus. Voyez Noisettier.

On trouve dans l’île de la Guadeloupe un arbre que les habitans nomment coudrier, à cause qu’il jette dès sa racine plusieurs branches qui s’étendent comme celles de cet arbrisseau. Ses feuilles sont semblables à celles du laurier-thym, rudes par dessous & lisses par dessus. A l’extrémité de ses branches il porte de petites queues longues comme le doigt, fort menues, & toutes environnées de petits fruits blancs & rouges, fort délicats, & de la grosseur des groseilles rouges, dont ils ont presque le goût. Ses feuilles ont une propriété merveilleuse pour la guérison des vieux ulcères. Le dessus de ces feuilles les nettoie, les rend vermeilles, & mange les chairs baveuses ; & quand ils sont dans cet état, le dessous de la même feuille achève en fort peu de temps de les guérir.

COUDROT ou CAUDROT, Ville de France en Gascogne, sur la Garonne, entre la Reole & Saint Macaire.

COUÉ, ÉE. adj. vieux terme de Chasse, qui se dit des animaux à qui on n’a point ôté la queue. Caudatus. Son composé & contraire est écoué. Caudâ truncus. On appelle les Anglois coués, parce qu’en 509, ceux de Dorchester attachèrent des grenouilles par dérision au derrière de celui que le Pape Gré-