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DEN

Dénoué, ée. part.

DENQUI. Vieux mot qui signifioit de-là.

DENOY. s. m. Vieux mot qui, selon le Dictionnaire des Arts, signifioit refus. Il vient évidemment de noy. Voyez ce mot.

DENRE. Voyez DENDRE.

☞ DENRÉE, s. f. Ce mot signifie particulièrement les fruits, racines, légumes propres pour notre nourriture, comme artichauts, navets, carottes, &c. Esculenta. Mais, en généralisant son acception, on l’applique à tout ce qui se vend pour la nourriture, la subsistance & l’entretien des hommes & des animaux. Blé, vin, bois, paille, foin, avoine, &c. & l’on appelle menues denrées les premières, & grosses denrées, les secondes. Dans les villes bien policées, le magistrat met le prix, le taux aux denrées sujettes à la Police. Men.

Ce mot vient de denarata, qu’on a dit au lieu es denariata, fait de denarius, comme si c’étoit une chose qu’on voulût réduire en deniers, ou un revenu de deniers. Dans les Acta Sanct. April. T. III. p. 232. C. le P. Papebroch dit plus exactement que denariata, denrée vient de denarius, denier, & s’est dit pour deniérées ; & que ces mots, tant le Latin que le François, signifient des marchandises qui se vendent en détail, & dont l’on peut acheter à très-bas prix & comme pour un denier, que c’est pour cela qu’on les a appelées denariata, deniérées, c’est-à-dire, ce qu’on peut avoir pour un denier, comme poignée signifie ce qu’on peut tenir dans le poing, & que de deniérées s’est fait denrée. L’Auteur de l’histoire des miracles de Saint Gengulfe C. II. §. 11. dit duas deneraras ceræ, deux denrées de cire, ce qui, selon le P. Henschenius, signifie deux petites bougies d’un denier chacune. Acta Sanct. Maii T. II. p. 650. F. & p. 652. E. L’Auteur de la vie de S. Norbert contemporain de ce Saint, c’est-à-dire qui écrivoit au commencement du douzième siècle, dit c. 18. une denrée de vin, ou d’hydromel, denariatam vini vel medonis, c’est-à-dire, ce qui s’en donnoit pour un denier. Act. Sanct. Jun. T. I. p. 855. C. Du Cange dit que, dans la basse Latinité, on appelle toutes sortes de marchandises, denarata, denariata, & denairada, & qu’on appeloit même denariata terræ aut vineæ, une portion de terre ou vignes qui valoit un denier de revenu. Guichort dit qu’il pourroit bien venir du mot Hébreu הדר, hadar, entant qu’il signifie vendre, débiter, vendere, distrahere per urbem.

Denrée, se dit aussi en mauvaise part de la marchandise qui ne vaut rien. Merx. Ce marchand s’est défait de ses plus belles étoffes, il n’a plus chez lui que de la denrée, du rebut. Cet homme là n’a été payé qu’en denrées, en méchantes marchandises. On dit généralement en parlant d’un homme qui vend bien ce qu’il a à vendre, que cet homme vend bien sa denrée. Acad. Fr.

☞ DENSE. adj. de t. g. Densus. Terme de Physique. Dont les parties sont serrées. Ce mot est essentiellement relatif : & quoiqu’on dise absolument que l’or, le plomb, sont des corps denses, il est clair qu’alors même, on le dit relativement à d’autres corps. Il est opposé à rare. Les corps denses ont moins de pores, ou les ont plus petits que les autres. Un corps dense est un corps qui occupe peu d’étendue avec beaucoup de matière. Rohault. Les masses de deux liqueurs différentes ne seront pas comme leurs volumes, & la liqueur la plus dense aura à proportion de sa densité, une plus grande masse sous un volume égal. Ibid.

DENSITÉ. s. f. Terme de Physique. Qualité d’un corps dense. Densitas, spissitas, concretio. La pesanteur de l’or vient de sa densité.

☞ On entend par densité ou par gravité spécifique d’un corps, la quantité de matière propre qu’il renferme sous tel volume. Le corps A sera plus dense que le corps B, si sous un égal volume il contient plus de matière propre, c’est-à-dire, s’il a plus de masse ou plus de poids que le corps B. & il sera moins dense ou plus rare, si sous un plus grand volume il n’a qu’un poids égal. Le fer est beaucoup plus dense que le liège, parce qu’un quintal de fer est renfermé sous un très-petit volume, tandis qu’un quintal de liège occupe un très-grand espace. De-là les Newtoniens concluent que la matière éthérée cartesienne est beaucoup plus dense que l’or. En effet un pied cubique d’or a beaucoup de pores qui sont vides, ou du moins qui ne sont pas remplis de la même matière que l’or. Un pied cubique de matière éthérée au contraire ne renferme, suivant Descartes, aucune espace qui ne soit rempli de matière éthérée.

☞ DENT. s. f. Dens, quasi edens, parce que les dents servent à manger. Petit os très-dur & très-compact, enchassé dans des loges particulières des gencives, qu’on nomme alvéoles, & qui sert aux hommes & aux animaux à briser, mâcher & broyer les alimens. L’homme & la plupart des animaux ont deux rangs de dents : l’homme a pour l’ordinaire 32 dents, 16 à la mâchoire supérieure, autant à la mâchoire inférieure.

☞ Les dents incisives, ainsi nommées parce qu’elles servent à couper les alimens, placées au nombre de quatre à la partie antérieure de chaque mâchoire sont appelées par quelques-uns premières ou dents de primeur, parce qu’elles paroissent les premières. Dentes priores, adversi. Quelques Médecins les appellent gélasines ou rieuses, ridentes, parce qu’on les montre quand on rit.

Il y a deux dents canines que le vulgaire appelle œillères, parce qu’une partie du nerf qui fait mouvoir les yeux, y est engagée, d’où vient le danger de les arracher. Dentes canini. Les dents incisives & canines n’ont qu’une racine ; les autres en ont deux, & quelquefois trois & quatre. Il y a dix dents mâchelières ou molaires. Celles de derrière s’appellent dents de sagesse, parce qu’elles viennent à l’âge de discrétion, vers l’âge de 20 ans. Maxillares, molares. Voyez Molaires. Les dents ont leurs veines & artères. Ce sont les seuls os qui croissent dans les animaux jusqu’à leur extrême vieillesse. M. de la Hire observe que l’émail des dents, qui est une substance bien différente de celle des dents, est la seule patrie des dents qui croît. On appelle dents de lait, les premières dents qui viennent aux hommes, & dont plusieurs tombent pour l’ordinaire. Denticuli, dentes lactei.

Quelques-uns sont nés avec toutes leurs dents, comme Marcus Curius Dentatus, & Cneïus Papirius Carbo. D’autres n’ont eu qu’une dent continue tout le long de la mâchoire, comme Pyrrhus, Roi des Epirotes, Prusias, fils du Roi de Bythinie. D’autres ont eu deux ou trois rangs de dents, comme quelques-uns l’ont dit d’Hercule. Les dents sont revenues à quelques-uns en vieillesse. Mentzelius, Médecin Allemand, dit qu’il a vu un vieillard à Clèves, en 1666 âgé de 120 ans, à qui les dents étoient revenues deux ans auparavant avec grande douleur, & qu’en même temps il se trouva un Anglois à la Haye à qui pareillement les dents étoient revenues en sa 118e année.

Un Médecin Danois, nommé Hagerup, a soutenu dans une thése que l’on peut entendre avec les dents. Sa preuve est que, si l’on met dans un clavecin un couteau, & qu’on le serre entre ses dents, on entend l’harmonie du clavecin, quoiqu’on ait les oreilles bouchées. De même les sourds ouvrent quelquefois la bouche pour entendre, & entendent effectivement. Mais on doit attribuer cet effet à la communication de l’oreille interne avec la bouche. Voy. Ouïe & Oreille. Martin Scochius dans son Traité du beurre, prétend qu’il n’y a point de meilleur moyen pour conserver les dents, & les avoir belles, que de les frotter tous les matins de beurre. Mais cet opiat n’est guère moins dégoûtant que celui des Espagnols, qui se les lavent tous les matins avec de l’urine. Pour le mal