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CRO

croupiroient dans leur ordure, si l’on n’avoit soin de les nettoyer.

Croupir, se dit figurément en choses morales, pour dire, languir honteusement dans l’oisiveté, dans la nonchalance, ou dans quelque état triste. Demeurer long-temps dans le même état. Languere in otio, languescere, inertia marcescere. Les pécheurs croupiroient toujours dans le péché, sans la grâce. Comment Dieu qui est si miséricordieux, a-t’il laissé si longtemps croupir les nations idolâtres dans l’ignorance de sa Loi de grâce. Tav.

Las de vous signaler, & de vaincre en tous lieux,
Allez, allez croupir dans un calme odieux. Breb.

Croupi, ie. part.

CROUPISSANT, ANTE. adj. Qui croupit. Stagnans, deses, piger. L’habitation dans les lieux marécageux n’est pas saine, à cause des eaux croupissantes qui y sont d’ordinaire.

☞ CROUPISSEMENT. s. m. État des différentes matières qui croupissent. Le croupissement des alimens dans les intestins.

CROUPON. s. m. Les Tanneurs, & ceux qui font commerce de gros cuirs, appellent ainsi les cuirs de bœuf & de vache tannés, lorsqu’ils n’ont ni tête ni ventre, comme qui diroit, cuir de croupe. Un croupon de bœuf.

CROUSTILLE. s. f. Petite croûte de pain. Crustula. Dans ce mot & les suivans, prononcez l’s, quoiqu’ils viennent de croûte, où l’on ne la prononce point, & mouillez les deux ll.

CROUSTILLER, v. n. C’est manger de petites croûtes en buvant, pour rester plus long-temps à table. Crustulæ frustum comedere, rodere. Ne voulez-vous pas croustiller avec nous ? Il est familier

CROUSTILLEUSEMENT. adv. D’une manière croustilleuse, boufonne, plaisante. Lepidè, facetè. Il fait, il dit toutes choses croustilleusement. Cela est populaire.

CROUSTILLEUX, euse. adj. Terme populaire & vieux, boufon, plaisant, qui fait rire. Lepidus facetus. Cet homme est croustilleux.

Croustilleux. Ce mot se prend encore pour extraordinaire, ridicule, impertinent. Ineptus, insulsus. On dit quelquefois dans le discours populaire & familier en se fâchant, ou en se mocquant d’un homme : Voilà un plaisant corps, ou croustilleux personnage.

CROÛTAC ou demi-DANTZIKHORS. s. m. Monnoie d’argent qui a cours à Dantzick, & en d’autres villes du Nord. Les croûtacs valent neuf gros, à prendre le gros pour 18 penins.

CROÛTE. s. f. Partie extérieure du pain, endurcie par la cuisson, & principalement par celle du four. On le dit aussi de plusieurs autres choses. Crusta. La croûte d’un pain, la croûte d’un pâté. La croûte fine est celle où il y a du beurre mêlé avec de la fleur de farine. La croûte bise est celle où l’on n’emploie que la grosse farine.

Croûte, se dit aussi de tout ce qui se séche, s’endurcit sur la surface de quelque chose. Il se fait sur le sel qu’on garde une croûte qui est fort dure & épaisse. La sécheresse avoit fait une croûte si dure sur la terre, qu’on avoit de la peine à la labourer.

On appelle aussi croûte en Chirurgie, cette gale qui vient sur les plaies, quand elles se cicatrisent ; & aussi ce qui vient sur les boutons, dartres & autres maladies de la peau. On dit d’un homme couvert de gale, que son corps n’est qu’une croûte.

Croûte. Terme de Conchyliologie. Voy. EPIDERME.

Croûte de sucre. Voyez Sucre.

Croûte, signifie aussi, en terme de Peinture, un tableau douteux, une copie qu’on voudroit faire passer pour original, & généralement tout tableau noir, écaillé, & donc le plus grand mérite est le plus souvent d’être fort ancien.

Croûte. On nomme cuir en croûte, le cuir de vache, de cheval & de veau, qui a été plané, coudré & tanné, & qu’on a fait secher, après l’avoir tiré de la fosse au tan.

On appelle aussi, Parchemin en croûte, ou parchemin en cosse, celui qui n’a point été raturé sur le sommier par le Parcheminier.

Croûte veloutée. Terme d’Anatomie. Willis, dans la Pharmaceutice rationalis, prétend que la croûte veloutée, qu’on prend seulement pour l’épiphyse de la tunique nerveuse, est véritablement une tunique particulière assez épaisse de sa nature & on peut l’appeler proprement une tunique glanduleuse, à cause du grand nombre de glandules dont sa superficie extérieure est couverte.

On dit d’un avare, qu’il ne mange que du pain & des croûtes, pour dire, qu’il fait très-petite chère. On dit aussi, que croûte de pâté vaut bien pain. Pour dire, qu’on portera la peine de quelque chose, on dit proverbialement qu’on en aura les croûtes à ronger.

CROÛTELETTE. s. f. Synonyme à Croustille, moins usité. Crustula.

CROÛTIER. s. m. Ce mot se dit dans le même sens que Brocanteur qui ne se charge que de mauvais tableaux, & qui voudroit vendre ses copies pour des originaux. Ce Peintre n’est qu’un vrai Croûtier.

CROÛTON. s. m. Morceau de croûte de pain. Crusta, Crustula. Manger un croûton.

CROWN, ou COURONNE. Monnoie d’argent d’Angleterre.

CROY, ou CROUY. Car c’est ainsi que l’on prononce. Bourg situé proche le Monastère de Saint-Médard dans le Soissonnois. Croviacum, Croniacum, Croiciacum. Valois. Notit. Gall. C’est de ce Bourg que la Maison de Crouy tire son nom. Henri IV. l’érigea en Duché l’an 1598, en faveur de Charles de Croy Duc d’Arschot. Voyez Imhoff, Not. Imp. L. V. C. 13. sur la Maison de Croy.

CROYABLE. adj. m. & f. Digne d’être cru, qui mérite d’être cru. Credibilis. Il se dit des personnes & des choses. C’est un Auteur grave, & qui est fort croyable quand il dit quelque chose. Cet Orateur a reçu tant d’applaudissemens, que cela n’est pas croyable. Tout cela n’est pas croyable.

Ce que je viens d’entendre, ô Ciel, est-il croyable ! Molière.

☞ Le mot de croyable s’applique aux choses qui ne sont pas évidentes par elles-mêmes, ni évidemment déduites de leur cause ou de leur effet, mais dont la vérité est établie par d’autres preuves. On ne dit pas qu’il est croyable qu’on croit que la neige est blanche, que le tout est plus grand que sa partie, mais on dit que cela est évident. On voit, on connoît que cela est ainsi.

☞ CROYANCE. s. f. Ce mot signifie proprement la persuasion où l’on est de la vérité d’une chose, d’une proposition quelconque. Le consentement que l’esprit donne à quelque chose. Considéré comme synonyme à foi, il en diffère par sa généralité. Le mot de foi pris seul, exprime la persuasion où l’on est des mystères de la religion. La croyance des vérités révélées constitue la foi. Christianæ fidei capita. Bien que croyance & créance soient deux choses différentes, on prononce toujours créance ; à la fin on n’écrira plus autrement ; c’est déjà l’opinion de plusieurs, & j’y souscris. Vau. Peu de personnes écrivent présentement croyance. La délicatesse de la prononciation a passé dans l’orthographe. Corn. Ces Auteurs ont mal vu la destinée des mots croyance & créance. On écrit croyance & créance, suivant les cas. Les prudens du siècle se font un honneur de ne rien croire, pour se distinguer du vulgaire, & ne pas hazarder leur croyance. Tall. Dans la plupart des Chrétiens l’envie de croire tient lieu de croyance : la volonté leur fait une espèce de foi par les desirs, que l’entendement leur refuse par ses lumières. S. Evr. Parmi les Novateurs, chacun s’est fait un tribunal à soi-même,