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CUI

respect (qu’ont les Orientaux) pour les saints mystères. L’opinion commune des Grecs est que la coutume en fut établie par S. Jean Chryrostôme ; & quoique cette Tradition ne soit pas certaine, au moins l’antiquité de cette pratique est incontestable, puisque les Nestoriens & les Jacobites la conservent pareillement, ce qui fait voir qu’elle est plus ancienne que les schismes de ces deux sectes. Tous les Auteurs qui en ont parlé, conviennent que la communion donnée de cette manière a été introduite pour prévenir l’effusion du calice, précaution fort inutile, qui ne peut venir dans l’esprit à ceux qui ne croïent pas qu’il contienne autre chose que du vin, & que les Protestans n’ont jamais prise. Le nom de λαϐίς, qui signifie une pincette, & qui fait allusion au charbon que le Chérubin prit sur l’autel pour toucher les lèvres d’Isaïe, fait assez voir l’opinion qu’ils en ont, aussi bien que la conservation qu’ils en font, dans laquelle, selon le Rituel du Patriarche Gabriel, il est dit qu’elle servira à contenir les membres ou les parties du Corps de Jesus-Christ. Renaudot.

Les Cuillers des Turcs sont de bois, avec un manche long d’un demi-pied pour le moins, & ils n’en-usent guere que pour s’empêcher de se brûler les doigts. Aussitôt qu’ils le peuvent, ils se servent d’une main pour cuiller & pour fourchette, & du creux de l’autre pour assiette, avec laquelle en même temps ils portent le manger à la bouche. Du Loir. p. 168.

On appeloit autrefois cuiller un morceau de fer qui embrassoit le bout de l’essieu des roues de devant d’un carosse. Une cuiller du carosse se rompit.

Cuiller à canon, en matière d’Artillerie ; c’est une feuille de cuivre arrondie de différente grosseur, qui sert à retirer la gargousse d’un canon.

Cuiller à brai, est une grande cuiller de fer pour prendre le brai chaud.

Cuiller de Pompe, c’est un instrument de fer acéré, & tranchant, avec lequel on creuse les pompes.

Cuiller, Coquille longue, ou poisson à têt dur. Rond. Concha longa.

Cuiller, ou Cuillier, Instrument de Chirurgie. C’est une petite cuiller d’argent dont on couvre l’œil, quand on fait l’opération de la fistule lacrymale. Col de Villars.

Cuiller, ou Cuillier, Oiseau semblable au héron, hormis qu’il a le bec en forme de cuiller, ou de spatule. On l’appelle autrement Palle ou Spatule. Voyez Palle.

Cuiller, aux Pelottes. Les cuillers des Fondeurs en sable ne ressemblent que par leur long manche aux cuillers des Plombiers, & par le nom qu’elles ont conservé, à cause qu’on s’en sert pour porter les pelottes de cuivre dans le creuset où le métal est en fusion.

CUILLERÉE. s. f. Plein une cuiller, cochlear cumulatum. Ce malade n’a pris qu’une cuillerée de gelée, de bouillon. Il ne faut qu’une cuillerée de vinaigre pour faire une chopine d’oxycrat.

Cuillerée. Herbe, Cochlearia. Pomey.

CUILLERON. s. f. La partie creuse de la cuiller attachée au manche, & qu’on met dans la bouche, quand on mange. Cochlearis pars cava. Il y a des cuillerons en ovale, comme ceux qui servent à table, d’autres ronds, comme ceux de la cuisine ; d’autres avec un bec, comme ceux des Ciriers, &c.

☞ On se sert de ce terme en Botanique pour désigner les parties qui ont la forme d’une cuiller. Feuille creusée en cuilleron.

CUIPOUNA, s. m. Nom d’un arbre qui croît au Brésil. Il y en a de plusieurs espèces. Le suc de l’écorce de celui qui porte des fleurs jaunes, exprimé & mêlé avec de l’eau claire, déterge & incarne les ulcères invétérés. Ray, Hist. Plant.

☞ CUINE. s. f. Terme de Chimie. Vaisseau de terre, servant à distiller de l’eau forte.

☞ CUIR, s. m. On le dit en général de la peau de l’animal, corium, pellis. On dit qu’un homme a le cuir dur, rude. L’âne a le cuir dur & épais. Avoir des sérosités entre cuir & chair. Aqua intercus, aquam intercutem.

On le dit plus ordinairement de la peau des animaux, séparée de la chair qu’on corroie, & qu’on prépare pour servir à divers usages, particulièrement à faire des bottes, des souliers, à couvrir des carosses, des meubles, des livres, &c. Corium. Tous Marchands sont obligés de porter leurs cuirs à la Halle aux cuirs. Les cuirs de Hongrie sont faits de peaux de Bœuf & de cheval ; ceux de Russie, de peaux de Vaches, ceux de Maroc ou de marroquin, de mouton. Le cuir d’un âne est le meilleur pour faire du chagrin. Il y a plusieurs sortes de Marchands de cuir. Les Tanneurs vendent les gros cuirs passés à la tannerie. Les Corroyeurs préparent le cuir avec des des graisses pour le rendre plus maniable. Les Peaussiers vendent des peaux de mouton de toutes sortes de couleurs, des peaux pour faire des gants, & des peaux de truie pour couvrir des coffres & des livres d’Eglise. Les Mégissiers préparent les peaux de mouton, & en ôtent la laine. Il y a aussi des Marchands de marroquin, de vache de Russie, & de mouton de Limoges, qui n’ont point de grain de l’autre côté. On appelle cuirs verts, les cuirs qui n’ont aucune préparation, & tels qu’ils sortent de dessus le corps. Les Romains se servoient dans les commencemens de monnoie de cuir. Philippe de Commines dit qu’après les levées faites pour la rançon du Roi, on fut obligé de se servir en France d’une monnoie de cuir, où il y avoit seulement un petit clou d’argent. Un Arrêt du conseil de 1649, attribue deux muids de sel aux Tanneurs de Paris pour la fabrique des cuirs de Hongrie. M. de la Mare, dans son Traité de la Pol. L. V. T. XX. C. 10. traite ce qui regarde la salaison & la conservation, la vente & le débit des cuirs des abatis de Bouchers.

Cuir vert. Cuit crud, ou Cuir frais. Ce sont certains cuirs qui ne sont point apprêtés, & qui se mettent sur les écoutilles de la sainte Barbe, de crainte du feu ; on en couvre aussi les hunes.

Cuir de Poule. C’est un nom que les Gantiers donnent à une sorte de petit cuir très-mince & très-léger, qu’ils emploient à faire des gants de femmes pour l’été.

Cuir doré. On appelle ainsi des peaux de mouton passées en basanne, sur lesquelles sont réprésentées en relief diverses sortes de grotesques relevées d’or ou d’argent, de vermillon ou autres couleurs. On en fait des tapisseries.

Cuir bouilli. C’est une préparation de cuir, qui par les réglemens de Police, n’appartient qu’aux Gainiers & Bourreliers qui font bouillir le cuir avec plusieurs gommes, résines & colles, dont ils font un secret entr’eux. Corium decoctum, coctum.

☞ Ce mot vient du Latin corium, qui, si l’on en croit Rochefort, s’est dit pour Carium, de caro chair, parce qu’il couvre la chair.

On dit figurément & proverbialement. Rire entre cuir & chair. Jurer entre cuir & chair, pour dire, Rire, Jurer en soi-même, sans oser éclater, sans en faire rien paroître au-dehors. On dit aussi, Faire du cuir d’autrui large courroie ; pour dire, faire largesse aux dépens d’autrui. Ce proverbe est tiré du Latin, De alieno corio ludere. Etre libéral du bien d’autrui. On appelle ironiquement & populairement un Savetier, un Orfèvre en vieux cuir. On appelle un visage de cuir bouilli, un visage extrêmement laid.

CUIRASSE. s. f. Arme défensive faite d’une lame de fer fort battu, qui couvre le corps depuis le cou jusqu’à la ceinture ; tant par devant que par derriere, & qui doit être à l’épreuve au moins du pistolet. Lorica. Les Piquiers sont armés d’un pot & d’une cuirasse ; c’est un bon corps de cuirasse qui est à l’épreuve. Les Cavaliers ne prirent une cuirasse que vers l’an 1300. Le Gendre.

Quelques-uns croient que ce mot a été dit par corruption de cucurasse, parce qu’elle couvre le corps. D’autres le dérivent de cuir, ou de coriaceus, parce