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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, III.djvu/692

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ENC

☞ ENCAVURE. s. f. Terme de Médecine. Nom que l’on a donné à une maladie particulière des yeux, qui n’est autre chose qu’un ulcère assez profond à la cornée. Cavitas.

ENCEINDRE. v. a. Entourer, environner, enfermer une ville, un bois, un champ, de murailles, de haies, de fossés, de filets, d’hommes armés, pour en boucher les avenues. Cingere. Il coûtera beaucoup à enceindre cette ville de murailles. L’Ordonnance des Eaux & Forêts oblige ceux qui ont des bois auprès de ceux du Roi, de les enceindre de fossés. Dans une chasse générale du loup, on enceint un bois de paysans armés. On ne dit guère enceindre d’hommes, de soldats.

Enceint, einte. part. Cinctus. On évite de se servir du féminin, qui est comme déterminé & consacré à une autre signification, qui va suivre.

ENCEINTE, adj. f. Femme enceinte, femme grosse d’enfant. Gravida, prægnans, fœta. On surseoit l’exécution des femmes condamnées, quand elles se trouvent enceintes.

☞ M. Perrault, par une métaphore un peu trop hardie, a appliqué ce mot aux branches d’arbres qui contiennent les embryons des fruits, qui sont développés par les sucs nourriciers.

Ce suc, dès qu’on la coupe, (la branche) aussitôt rabattu
Aux branches d’alentour partage sa vertu ;
Répare abondamment leurs forces presque éteintes,
Et grossit tous les fruits dont elles sont enceintes. Perrault.

Ce mot vient de incincta, comme qui diroit sans ceinture, parce que les femmes grosses ne doivent point être gênées dans leurs habits, ni porter de ceintures. C’est-là l’étymologie ordinaire. On peut aussi faire venir enceinte du Latin inciens, selon M. Ménage. Je m’étonne que ce savant homme dise que nos Anciens appellent ainsi une femme grosse, & qu’il remarque que ce mot est encore en usage en plusieurs Provinces de France, & que d’Ablancourt & M. Patru s’en sont servis. Il veut faire entendre par-là que ce mot n’est plus en usage. Il l’est cependant autant qu’il ait jamais été. On disoit autrefois & on écrivoit encheinte.

ENCEINTE, s. f. Clôture qui ferme une ville, une maison, un champ ; quelquefois circuit, tour, étendue. Ambitus, circuitus. L’enceinte de la ville de Nanquin est de vingt milles d’Italie. Il est fait dans l’enceinte de la maison. Pat. L’enceinte des tranchées pouvoit tenir dix mille hommes. Ablanc. Il se trouva renfermé dans l’enceinte d’une famille paisible & pieuse. Fléch.

Enceinte, en termes de fortification, est le contour, la circonférence du rempart d’une place fortifiée, soit qu’elle soit composée de bastions ou non. C’est aussi le composé des ouvrages qui l’environnent, tels que sont les remparts, les fossés, les demi-lunes, les ravelins, les ouvrages à corne, les couronnes, &c. La simple enceinte renferme un rempart, un fossé, une esplanade. La 2e comprend le chemin des rondes couvert d’un parapet. La 3e enceinte, ou basse enceinte, est ce qu’on appelle autrement fausse braie. Ozan.

Enceinte, se dit aussi, en termes de Chasse, lorsqu’on tend des toiles, ou qu’on poste des chiens ou des chasseurs autour d’un bois, ou d’un lieu où l’on veut chasser. On dit aussi, Faire ses enceintes, saltus indagine cingere, prendre ses cernes, quand on fait divers ronds autour des plus fraîches voies & allures de la bête, pour s’assurer où elles aboutissent, & de-là conclure l’endroit où elle est embûchée.

ENCEINTURER. Vieux mot, qui signifioit, Engrosser, rendre enceinte. Mehun, au Codicille.

Vierge qui, du corps, Dieu ton fils enceinturas. Borel.

Les Italiens disent dans la même signification incingere, pour ingravidare.

ENCELADE. s. m. Un des Géants qui firent la guerre à Jupiter.

ENCENIES. s. f. pl. Mot Grec, qui signifie Restauration, rénovation. Encænia. C’étoit une fête que célèbroient les Juifs le 25 du 9e mois, pour la Dédicace, ou plutôt en mémoire de la Purification du Temple faite par Judas Machabée, après qu’il eut été pillé & pollué par Antiochus Epiphane. On célébroit encore deux autres Encenies : la Dédicace faite par Salomon, & celle qui fut faite par Zorobabel au retour de la captivité. Ce mot est, dans le Grec & le Latin, du pluriel ; & c’est pourquoi je crois qu’il faut aussi le faire du pluriel en François, & mettre une s au bout, encenies, les encénies. Ce mot n’est pas assez usité dans notre langue, pour consulter là-dessus l’usage, qui pourroit être contraire à la règle, comme en bien d’autres choses. Mais jusqu’à ce que l’usage le détermine, il faut suivre la règle & l’analogie.

Ce mot vient du Grec ἐγκαίνια, formé de la préposition ἐν, & de καινός, qui signifie nouveau. On trouve aussi dans les Pères, dans l’Histoire Ecclésiastique, encænia, pour la Dédicace des Eglises Chrétiennes. S. Augustin témoigne que, de son temps, ce mot-là étoit même passé aux choses profanes, qu’on disoit encæniare, lorsqu’on prenoit un habit neuf, &c.

Nos derniers Traducteurs de la Bible, ne se sont point servis du mot Encénies en S. Jean X. 22. où il en est parlé. Ceux de Port Royal ont mis la fête de la Dédicace. M. Simon les a suivis. Le P. Bouhours a dit, On solennisoit à Jérusalem le renouvellement du Temple. Il est certain que ce n’étoit point la Dédicace du temple, & que le mot encénie signifie renouvellement, & non point Dédicace. Mais aussi le renouvellement du temple peut se prendre pour le rétablissement du temple, rebâti ou réparé par les Juifs après le retour de la captivité ; & ce n’est point cela : c’est l’expiation, la purification du temple profané, une seconde consécration du temple. Renouvellement est cependant mieux encore que Dédicace.

ENCENQUETA. s. f. Vieux mot. Aveuglement. Il vient de cæcitas, aveuglement, ou de cæcutire, avoir les yeux éblouis, ne voir pas bien.

ENCENS, f. m. Thus incensum. Résine aromatique & odoriférante. Elle sort d’un arbre qui a les feuilles semblables au poirier, selon Théophraste : il croît en la région de Saba en l’Arabie Heureuse, surnommée par les anciens, Thurifère. On l’incise aux jours caniculaires, pour en faire sortir la résine. L’encens mâle, qui est le meilleur, est rond, blanc & gras au-dedans. On lui a donné le nom de mâle, pour distinguer les grosses & belles larmes d’avec les communes : il est aussi appelé oliban. L’encens femelle est mou, plus résineux & moins bon que le précédent. L’encens est d’un grand usage dans la Médecine : il échauffe, desséche & resserre. On s’en sert dans diverses maladies de la tête & de la poitrine, dans le vomissement, la diarrhée & la dyssenterie. On l’emploie aussi extérieurement, pour fortifier le cerveau. Il est bon pour les plaies.

L’écorce d’encens est l’écorce de l’arbre d’où l’encens découle : elle a les mêmes qualités que l’encens. Il y a une autre écorce qu’on apporte des Indes, & qui est aussi appelée écorce d’encens, thymiama, ou encens des Juifs, parce que les Juifs s’en servent souvent dans leurs parfums.

La manne d’encens, sont les miettes ou petites parties qu’on ramasse dans les sacs l’encens a été mis & porté, & qui vient des grains qui se froissent les uns contre les autres. Il y a aussi la suie d’encens, qui en est une préparation.

On a brûlé de l'encens dans les temples de toutes les Religions, pour faire honneur aux Divinités qui y ont été adorées. Les premiers Chrétiens ont été martyrisés, parce qu’ils n’ont point voulu donner de l’encens aux Idoles. On donne aussi de l’encens dans les cérémonies Ecclésiastiques, aux per-