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disoit autrefois fémelin, qui le trouve dans Nicot, &c.

Féminin, se dit aussi de ce qui ressemble à la femme. Cet homme a le visage féminin. Les châtrés ont la voix féminine.

En Grammaire on dit, le genre féminin de plusieurs mots qui ont la terminaison féminine, qui est l’e muet, ou qui signifient des choses d’espèce féminine, de sexe féminin, comme brebis, chèvre, cavalle, barrière, tulipe : ce qui souffre pourtant beaucoup d’exceptions. La règle la plus sure pour connoître le genre féminin, est de voir si on joint à ces mots l’article la, qui est la marque du genre féminin. Nous n’avons point en François de genre neutre, comme il y en a en Grec & en Latin : tout est masculin ou féminin en François.

En poésie, on appelle vers féminins, ceux qui sont terminés par une rime féminine ; c’est-à-dire, par des mots qui finissent par un E muet & obscur, dont la prononciation est sourde, imparfaite, qui souffre l’élision devant une voyelle ; on l’appelle pour cela un vers féminin. Les vers féminins ont toujours une syllabe de plus que les vers masculins. Dans la rime féminine la dernière syllabe ne suffit pas pour la rime avec un autre mot. Il faut encore la convenance de la syllabe qui précède la dernière. Langage ne rime pas avec transfuge, quoique la dernière syllabe ge soit la même. Voyez le traité du Père Mourgues de la Poésie Françoise.

FÉMINISER, v. a. Ad fæmininum genus transferre, adscribere generi fæminino. ☞ Faire du genre féminin. On ne le dit qu’en parlant de certains mots, qui étoient originairement du genre masculin & qui sont devenus féminins. M. Furetiére prétend que le génie de notre langue est de féminiser les mots autant que l’on peut. Je n’ai point remarqué cela, & les exemples qu’il rapporte ne le prouvent point : affaire est en Latin féminin (res) ou du neutre, negotium. Ainsi il n’y a point d’affectation à faire affaire du féminin, & ce mot n’a point d’autre genre aujourd’hui. Navire n’est point du tout féminin ; foudre est du neutre en Latin, & en François nous le faisons masculin & féminin, selon les règles que nous verrons au mot de Foudre. Pour comète & planète, il est vrai que nous les faisons féminins, quoiqu’en Latin & en Grec ils soient masculins : la raison est que la terminaison est féminine, tant en François qu’en Latin ; outre que le mot Grec qui signifie étoile étant masculin, il n’est pas étonnant que les Grecs aient fait ces mots masculins, parce qu’ils sousentendoient en quelque sorte le mot ἀστήρ, au lieu que le mot d’étoile est féminin en François.

Féminisé, ée. part.

FEMME. s. f. Prononcez fame. On l’écrivoit autrefois ainsi. Voyez Ménage qui cite Carondas. ☞ La femelle de l’homme. Créature raisonnable que Dieu a donnée pour compagne à l’homme, qui conçoit & engendre des enfans par la conjonction avec lui. Femina. Dieu tira la femme de la côte d’Adam. Les femmes sont naturellement plus foibles & plus timides que les hommes. Saint Augustin appelle les femmes le sexe dévot ; c’est l’opinion du peuple : mais il y a plus d’apparence que dans cette prière, qu’on attribue à saint Augustin, & que l’Eglise récite à la sainte Vierge, on entend par ces mots, intercede pro devoto fæmineo sexu, des femmes consacrées à Dieu, & qui n’étoient pas assez bien désignées par les mots de Peuple & de Clergé (ora pro populo, interveni pro Clero.)

Il n’est pas bien honnête, & pour beaucoup de causes,
Qu’une femme étudie & sache plusieurs choses.
Former aux bonnes mœurs l’esprit de ses enfans,
Faire aller son ménage, avoir l’œil sur ses gens,
Et régler sa dépense avec économie,
Doit être son étude & sa philosophie.

Une tradition vulgaire des Mahométans, laquelle a grand crédit parmi eux, est, que les femmes n’entreront point en Paradis. d’Herb. Les Marcionites permettoient aux femmes de baptiser, dit saint Epiphane, hær. 42, c. 4. Les Montanistes admettoient les femmes à la Prêtrise & à l’Episcopat. Tillem. S. Épiph. hær. 49. c. 2. Le P. Louis Jacob a fait un livre, intitulé la Bibliothèque des femmes. Carpzovius, Hahnius, Strychius & George Melchior Ludolf, ont fait des Traités de Droit & de Politique sur les femmes de qualité. Ménage a donné un Traité des femmes philosophes. C’est un petit livre très-maigre, & qui se sent fort de la vieillesse de l’Auteur. De Vign. Marv. Mademois. Schurman, fille savante, a fait un petit Traité sur ce problème : Num feminæ Christianæ conveniat studium litterarum, Si l’étude convient à une femme Chrétienne ? Erasme a traité ce sujet dans une de ses lettres à Budée. Louis Vivès, dans son Institution de la femme Chrétienne, a fait un Chapitre exprès où il traite la même question.

Rien ne pèse tant qu’un secret ;
Le porter loin est difficile aux Dames ;
Et je fais même sur ce fait
Bon nombre d’hommes qui font femmes.

Femme, se dit quelquefois de tout le sexe féminin, sans distinction de femmes & de filles. La chasteté est la gloire & le partage des femmes. Le Mai. Un homme ne sait jamais bien vivre à moins que les femmes ne s’en soient mêlées. Le Ch. de M. La conversation avec les femmes doit être un peu flatteuse, & avoir je ne sais quoi de retenu. Id. Je vais entrer dans un âge où je ne serai plus guère femme, & auquel je pourrai faire des amitiés sans qu’on en puisse médire. M. Scud. La fortune est femme ; elle se plaît à être importunée, pour ne pas dire forcée. S. Real. C’est principalement auprès des femmes qu’on apprend à être agréable. S. Evr.

Ci gist qui de femme n’eût rien
Que d’avoir donné la lumière
A quelques enfans gens de bien.

Salomon dit, que de mille hommes il en a trouvé un bon, & de toutes les femmes pas une. Prudemment il ne faut point déclamer contre les femmes avant 60 ans, nous sommes trop exposés à leur vengeance. Pourquoi faire profession de ne point estimer les femmes, quand on sent qu’on peut les aimer ? Ch. d’H. La vraie science d’une femme, c’est d’être belle ; l’étude & les livres ne servent qu’à la rendre insupportable. P. Com. En ce sens on dit, il y avoit trente personnes, tant hommes que femmes. Il y a cent mille habitans dans cette ville, sans les femmes & les petits enfans. Un Tailleur pour femmes, est celui qui habille les femmes : en ce cas les filles y sont comprises. Il y a aussi des Cordonniers pour femmes, &c.

Bonne femme, outre sa signification ordinaire, veut dire encore une femme âgée ; & quelquefois aussi l’on appelle de la sorte une femme de peu, une paysanne. Acad. Fr.

Un Auteur anonyme, mais Protestant, fit sur la fin du XVIe siècle une petite dissertation, dans laquelle il prétend prouver que les femmes ne sent pas hommes, c’est-à-dire, animaux raisonnables, Disputatio perjucunda qua Anonymus probare nititur, Mulieres homines non esse. Il tâche de prouver aussi ce qui s’enfuit naturellement de son principe, qu’elles ne seront point sauvées, qu’il n’y a point de bonheur éternel, ni d’autre vie pour elles. Toutes ses prétendues preuves sont tirées de l’Ecriture ou fondées sur l’Ecriture. Le but de cet Auteur n’est pas tant après tout de dégrader les femmes, & de les réduire à la condition de bêtes, que de montrer le ridicule & le faux du principe & de la méthode des Protestans, & principalement, dit-il, des Anabaptistes, dans les matières dogmatiques, qui est de s’en tenir à l’Ecriture seule, & de expliquer cha-