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BREBIS

bis, de telle sorte que, quand la laine est longue, celle-ci a plutôt l’air décolorée qu’à deux couleurs. » Tristram, Nat. Hist., p. 144. C’est à raison de cette couleur blanche de la laine des brebis que les dents de l’épouse sont comparées à « un troupeau de brebis qui montent de la piscine », Cant, vi, 5, et que la laine est assimilée à la neige. Ps. cxlvii, 16. Le séjour habituel des troupeaux en plein air favorisait le développement de cette blancheur éclatante de la laine.

II. Les grands troupeaux de brebis chez les Hébreux.

Le mot ṡéh, qui désigne la brebis ou l’agneau en particulier, se rapporte aussi à l’espèce en général, Exod., xxxiv, 19 ; Lev., v, 7 ; xii, 8 ; xxii, 23, 28 ; xxvii, 26 ; Deut., xiv, 4 ; Jud., vi, 4 ; I Reg., xv, 3 ; xxii, 19 ; mais parfois il sert à indiquer le troupeau de petit bétail, spécialement de brebis. Gen., xxx, 32 ; I Reg., xvii, 34 ; Ezech., xlv, 15. Jérémie, l, 17, compare Israël à un «ṡéh dispersé que les lions pourchassent », et Ezéchiel, xxxiv, 17, 20, 22, dit que le Seigneur fera le discernement « entre ṡe̊h et ṡéh ». — Le mot ṣ’ôn désigne habituellement les troupeaux de brebis et de chèvres, Gen., xxvii, 9 ; xxxviii, 17 ; Lev., i, 10 ; Num., xxxii, 24 ; Ps. viii, 8 ; Jer., l, 8, et une fois les troupeaux de brebis seules que l’on tond. I Reg., xxv, 2.


613. — Troupeau de brebis en Egypte.
Tombeau de Ghizéh. ve dynastie. D’après Lepsius, Denkmäler, Abth. ii, B1, 51.

Les patriarches, ancêtres des Hébreux, ont été possesseurs de nombreuses brebis. Les Livres Saints mentionnent spécialement à ce titre Abel, Gen., iv, 2 ; Abraham, Gen., xii, 16 ; xxiv, 35 ; Lot, Gen., xiii, 5 ; Isaac, Gen., xxvi, 14 ; Laban, Gen., xxix, 9 ; Jacob, qui fit présent de deux cents brebis à son frère Esaû, Gen., xxxii, 5, 14 ; xlv, 10 ; les Sichémites, Gen., xxxiv, 28, et les fils de Jacob, Gen., xxxvii, 13 ; xlvi, 32. Quand ceux-ci passèrent en Egypte, ils y virent des troupeaux de brebis (fig. 613, 614), comme dans les pays qu’ils quittaient. « Les brebis, sau, se trouvent déjà sur les monuments de la xiie dynastie. Un propriétaire, comme nous l’apprend l’inscription d’un tombeau de la grande pyramide, possédait à lui seul un troupeau de trois mille deux cent huit têtes de bétail. Le dieu Num ou Khnum (fig. 22, col. 179) apparaît en une multitude d’endroits avec une tête de bélier. » Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 5e édit., t. i, p. 439. Si donc « les Égyptiens détestaient tous les pasteurs de brebis », Gen., xlvi, 34, leur aversion ne portait que sur les pasteurs étrangers, sur les Sémites en particulier, d’où étaient sortis ces rois pasteurs ou Hyksos qui alors régnaient sur l’Egypte. Apapi, qui appartenait à cette dynastie étrangère, fit au contraire bon accueil à Jacob et à ses fils.

Quand ils durent quitter la terre de servitude sous la conduite de Moïse, qui avait lui-même gardé les brebis de Jéthro, Exod., iii, 1, les Hébreux possédaient de grands troupeaux. Exod., x, 9. En Palestine, les Hébreux ne cessèrent jamais d’en élever un grand nombre, Deut., viii, 13, comme du reste tous leurs voisins. On le voit par l’histoire de Job, qui possédait d’abord sept mille, puis quatorze mille brebis. Job, i, xlii, 3 ; 12. Il convient encore de signaler les troupeaux de brebis d’Isaï, père de David, I Reg., xvi, 11 ; de Nabal, descendant de Galeb, propriétaire de trois mille brebis, I Reg., xxv, 2 ; de David, qui avait un fonctionnaire spécial préposé à ses troupeaux de brebis, I Par., xxvii, 31 ; de Salomon, Eccle., ii, 7, et d’Ézéchias. II Par., xxxii, 29. Le roi Mésa payait au roi d’Israël un tribut de cent mille agneaux. IV Reg., iii, 4. L’élevage de pareils troupeaux de brebis était du reste une nécessité pour les Hébreux, en vue de l’alimentation et surtout des sacrifices. Les Orientaux mangent peu de viande, mais le lait forme une partie importante de leur nourriture ; la laine leur sert à se vêtir. Quant aux sacrifices, Josèphe, Bell. jud., VI, ix, 3, dit que de son temps on n’immolait pas moins de deux cent cinquante-six mille cinq cents agneaux, rien que pour la Pâque. Thomson, The Land and the Book, Londres, 1875, p. 331, écrit à ce sujet : « L’Orient a toujours été et est encore la terre-nourricière des brebis, comme la vallée du Mississipi est celle des porcs. Job possédait quatorze mille têtes de bétail, et Salomon en offrit cent vingt mille en sacrifice, à la dédicace du temple. Ces chiffres, comparés à ce qui se voit actuellement dans ce pays, ne paraîtront nullement incroyables. Tous les ans, il arrive, du nord, des troupeaux en telle multitude, qu’il y a de quoi confondre l’imagination. En 1853, la route de l’intérieur n’était pas sûre ; ils passaient tous sur le littoral. Pendant les mois de novembre et de décembre, toute la côte en fut couverte ; ils venaient de la Syrie septentrionale et de la Mésopotamie. Les bergers qui les conduisaient ressemblaient parfaitement, je crois, par le costume, les mœurs, le langage, à ceux d’Abraham et de Job. De loin, ces troupeaux sont exactement comme les troupeaux de porcs qu’on voit se diriger vers Cincinnati ; leur marche est aussi lente et leurs allures semblables. Les bergers « mettent un intervalle entre chaque troupeau », Gen., xxxii, 16, et ils les font avancer lentement, comme le faisaient les bergers de Jacob et pour la même raison. Si on les presse trop, les brebis périssent. Même avec les plus grands soins, beaucoup succombent. Plutôt que de les abandonner sur le bord de la route, les bergers les tuent et les vendent aux pauvres, s’ils ne les mangent pas eux-mêmes. Les troupeaux vont ainsi diminuant sans cesse, à mesure qu’ils avancent vers le sud, parce qu’on profite de toutes les occasions pour en vendre. Aussi tout le pays en est-il fourni. Quel ne devait donc