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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome I.djvu/479

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ARABAH — ARABE


quence de prendre la route de l’est, envoya des messagers au roi d'Édom pour obtenir soit bénévolement, soit à prix d’argent, la permission de traverser son territoire. En effet, plusieurs des grandes vallées qui coupent les monts de Séir offraient une voie naturelle pour passer dans le pays de Moab. Comptant sans doute sur une réponse favorable à leur requête, faite au nom de l’amitié fraternelle, les chefs de l’armée Israélite traversèrent la plaine d’Arabah et vinrent camper en face du mont Hor. C’est alors qu’Aaron lut, par ordre de Dieu, conduit sur ce sommet désormais célèbre, pour y subir le trépas mystérieux qui devait bientôt couronner aussi sur le mont Nébo la vie de Moïse luimême. Seulement le grand prêtre, plus coupable que son frère, n’eut pas comme lui la consolation de contempler même de loin la Terre Promise : ses regards mourants n’eurent pour horizon que le désert sans fin, la longue et stérile vallée de l’Arabah et les montagnes d'Édom. Num., xx, 14-17, 22-30.

Cependant le roi des lduméens ne voulut pas écouter la prière des enfants de Jacob. À l’annonce de leur approche, il réunit toutes ses troupes pour leur barrer le passage. Num., xx, 18-21. Force fut donc à ceux-ci de descendre vers le sud, afin de contourner les montagnes dont l’entrée leur était interdite, et de remonter ensuite par le nord-est jusqu’au pays de Moab. Mais ce nouveau et difficile voyage lit éclater une révolte. Lé peuple, fatigué, murmura contre Dieu et Moïse : « Pourquoi, disait-il, nous avoir fait sortir de l’Egypte, pour que nous trouvions la mort dans un désert où nous manquons de pain et d’eau ? » Num., xxi, 4-5. Le tableau que nous avons tracé explique ces plaintes des Hébreux. Dieu, pour les punir, les livra à la morsure brûlante de serpents et reptiles venimeux, qui abondent dans la presqu'île du Sinaï et la plaine d’Arabah. Cf. D r G. H. von Schubert, Reise in das Morgenland, Erlangen, 1840, t. ii, p. 406. C’est dans ce désert que Moïse éleva le serpent d’airain. Num., xxl, 6-9. La plupart des critiques supposent que les enfants d’Israël, arrivés vers le sud, prirent, pour effectuer leur passage vers la frontière orientale, VOuadi el-Ithm, qui contourne entièrement le massif de l’Iduinée, en reliant l’Arabah à la route qui monte vers le pays des Moabites. M. le duc de Luynes fait des réserves à cette hypothèse, Voyage d’exploration à la nier Morte, t. i, p. 209.

Après la conquête de l’Idumée par David, II Reg., viii, 13-14 ; I Par., xviii, 12-13, la grande vallée d’Arabah dut servir de route commerciale entre la Palestine et le golfe Élanitique, vers Asiongaber, dont Salomon fit une ville maritime du premier ordre. C’est dans cette ville que fut préparée la flotte du grand roi, et de là qu’elle partit pour Ophir, III Reg., IX, 20 ; là aussi que Josaphat équipa ses navires pour la même destination. III Reg., xxii, 49.

Il y eut donc un temps où le commerce entretenait au milieu de ces solitudes le mouvement et la vie. Rome, maîtresse de ces contrées, y porta son génie grandiose et pratique : des postes militaires étaient échelonnés sur la route de l’Arabah, près de VOuadi Tlah, qui, au nord, commande une bifurcation importante vers le pays d'Édom et la mer Rouge, près de VOuadi Haseb, à VAïn Melihéh, à VOuadi Gharundel, à VOuadi Tourban. Cf. duc de Luynes, ouvr. cité, p. 252, 254, 256, 259.

IV. Bibliographie. — L. Burekhardt, Travels in Syria and tlie Holy Land, in-4o, Londres, 1822, p. 360-412 ; L. de Laborde et Linant, Voyage de l’Arabie Pélrée, in-f°, Paris, 1830, p. 50 et suiv., nombreuses planches et cartes ; J. de Bertou, Voyage depuis les sources du Jourdain jusqu'à la mer Rouge, extrait du Bulletin de la Société de géographie, 2e série, t. xii, avec deux cartes ; E. Robinson, Biblical Researches in Palestine, 3 in-8o, Londres, 1856, t. ii, p. 183-187 ; W. H. Bartlett, Forty days in the désert, in-8o, Londres, 1862, p. 100 et suiv. ; Stanley, Sinai and Palestine, in-8*, Londres, 1866, p. 84 et suiv.j K. H. Palmer, The désert of the Exodus, 2 in-8o,

Cambridge, 1871, t. ii, p. 429-461, 517-529 ; duc de Luynes, Voyage d’exploration à la mer Morte, 3 in-4o et 1 vol. de planches, Paris, t. i, p. 213-317 ; Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, 1884, p. 434 ; E. Hull, Mount Seir, Sinai and Western Palestine, in 8°, Londres, 1889, p. 75-84, 85-107, 178-184, gravures et cartes ; Chauvet et Isambert, Syrie et Palestine, Paris, 1887, p. 38 et suiv. Pour la géologie, voir le t. m de l’ouvrage de M. le duc de Luynes, dû à M. L. Lartet ; E. Hull, Memoir of the Geology and Geography of Arabia Petresa, Palestine, in-4o, Londres, 1889 ; pour l’histoire naturelle, H. Chichester Hart, À naturalist’s journey to Sinai, Petra and south Palestine, dans Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1885, p. 252 et suiv. M. Vignes, lieutenant devaîsstau, aujourd’hui vice-amiral, a dressé une grande carte de l’Arabah au 240000e, avec les cotes d’altitude, Paris, 1865, une feuille grand-aigle ; réduction dans l’ouvrage de M. le duc de Luynes. A. Legexdre.

1. ARABE (hébreu : K Ârâbî, Is., xiii, 20 ; Jer., iii, 2 ; 'Arbî, II Esdr. (Neh.), ii, 19 ; vi, 1 ; pluriel : 'Arbîm, II Par., xvii, 11 ; xxi, 16 ; xxii, 1 ; xxvi, 7 ; II Esdr., iv, 1 (LXX et Vulg., 7) ; Septante : "Apaêes ; dans les Machabées : "Apet^, I Mach., xi, 17 ; "Apaêic, v, 39 ; xi, 39 ; xii, 31 ; II Mach., v, 8 ; xii, 10, 11 ; dans le Nouveau Testament : "Apetéeç, Act., ii, 11), nom ethnique des tribus nomades qui habitaient l’Arabie. Il a, dans l'Écriture, un sens qu’il est nécessaire de préciser, et les populations qu’il désigne ont avec les Hébreux, au point de vue ethnographique et historique, des rapports dont il est utile d’offrir un aperçu.

I. Nom. — Ce nom, qui n’apparaît dans la Bible qu'à l'époque d’Isaïe, xiii, 20, n’a pas l’extension qu’on lui donne aujourd’hui. Il n’indique ni tous les peuples issus de la grande famille arabe, ni tous les habitants de la péninsule arabique, mais les tribus qui, campées à l’est et au sud-est de la Palestine transjordanique, occupaient les contrées situées au nord et jusque vers le centre de l’Arabie proprement dite. On le trouve avec le même sens restreint et local dans les inscriptions assyriennes, et il correspond aux Arabes ExTjvmjci, « vivant sous la tente, » que Strabon, XVI, i, 27, place au sud de la Mésopotamie. C’est la même signification que lui attribuent Josèphe, Ant. jud., i, xii, 4 ; XIV, i, 4, et le Nouveau Testament. Act. ii, 11 ; Gal., i, 17.

Dans les textes les plus anciens, Is., xiii, 20 ; Jer., iii, 2, il est synonyme d' « habitant du désert », suivant l'étymologie qu’on lui assigne généralement : 'ârab, « aride, stérile ; » d’où 'âràbâh, « plaine déserte. » Cf. Gesenius, Thésaurus lingux heb., p. 1066. Appliqué d’abord aux nomades des régions qui se déroulent entre l’Euphrate et la mer Morte, le mot 'ârâbi a pu s'étendre, dans la suite des temps, aux populations de la presqu'île arabique, dont l’aspect, en beaucoup de points, est bien celui de Varabak ou « désert ». Dans les monuments littéraires on trouve (illil, 'ârâb, avec le sens d' « Arabes nomades », par opposition à £ ! £, 'arab, qui indique « les habitants des villes ». Cf. Freytag, Lexicon arabico-latinum, Halle, 1830, t. iii, p. 129-130. L’Arabe biblique a donc pour survivant le Bédouin actuel, dont le nom a d’ailleurs une dérivation toute semblable : <£sl>N, bedàoui, vient de j^J, « désert, » Freytag, Lexicon, t. i, p. 98,

d’où *, >.>to, bâdiet, nom que portent certaines contrées, comme bâdiet es -Sam, « désert de Syrie ; » bàdiet etTih, « désert de l'Égarement. » Les Égyptiens, distinguant les Arabes du sud de ceux du nord, appelaient les premiers Punliù, « habitants du Punt, » et les seconds, c’est-à-dire les nomades, Sasû, « les pillards ; a racine ne™, sâsàh, « piller, exercer le brigandage. »

Avant Isaïe, les Arabes étaient désignés par l’exprès-