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1935

ESDRAS (PREMIER LIVRE D’)

1930


deux livres qui étaient primitivement unis, et qu’un travail d’école a plus tard plus ou moins heureusement séparés. Cf. Nôldeke, Histoire littéraire de l’Ancien Testament, trad. franc., Paris, 1873, p. 79 ; M. Vernes, Paralipomènes, dans l’Encyclopédie des sciences religieuses, t. x, Paris, 1881, p. 189-191. Cette conclusion peut paraître spécieuse ; elle ne s’impose pas. La parenté littéraire des Paralipomènes et du premier livre d’Esdras s’explique suffisamment par la communauté d’auteur. La répétition du décret de Cyrus se comprend, puisque cet acte de liberté est la conclusion nécessaire des Chroniques et le point de départ du retour des captifs. Esdras l’a cité incomplètement la première fois ; parce qu’il voulait en rapporter le texte intégral dans un autre ouvragé. R. Cornely, Hist. et critica inlroductio in utriusque Testamenti libros sacros, t. ii, 1° pars, Paris, 1887, p. 329. Cf. J.-P.-P. Martin, Introduction à la critique générale de l’Ancien Testament. De l’origine du Pentateuque, t. ii, Paris, 1887-1888, p. 16-23.

II. Argument et. division du livre.— Le premier livre d’Esdras raconte l’histoire du retour et de l’établissement en Judée, d’abord sous la conduite de Zorobabel, puis sous celle d’Esdras lui-même, d’un certain nombre de Juifs captifs en Chaldée. Il commence par le décret de Cyrus, qui, en 536 avant J.-C, permit aux Israélites, transportés en Chaldée par Nabuchodonosor, de retourner dans leur patrie et de rebâtir le Temple de Jérusalem. Il relate les suites heureuses de ce décret de liberté et conduit son récit jusqu’au delà de là septième année du règne d’Artaxerxès LongueMain. Il embrasse donc une période d’environ quatre-vingts ans ; mais il est loin de rapporter tous les faits qui se sont produits dans ce laps de temps. Le récit ne contient que les événements les plus importants de cette période et concerne presque exclusivement la reconstruction du Temple au milieu des plus grandes difficultés et la restauration de la ville et du culte divin. Il se divise tout naturellement en deux parties principales, dont les événements sont séparés par un intervalle de cinquante-neuf ans. La première, i-vi, comprend le retour des Juifs sous la conduite de Zorobabel et leurs travaux pour reconstruire le Temple, de 536 à 516 avant J.-C. La seconde, vii-ix, raconte le départ d’une nouvelle caravane de Juifs rapatriés, la septième année d’Artaxerxès Longue -Main (457), et les efforts d’Esdras, leur chef, pour remettre en vigueur les prescriptions de la loi mosaïque et réorganiser le culte dans le Temple restauré.

III. Analyse du livre. — première partie. Retour en Judée, sous la conduite de Zorobabel, d’une première caravane de Juifs exilés, et reconstruction du Temple de Jérusalem, i, 1-vi, 22. — 1° Voyage de la caravane, entrepris sous les auspices de Cyrus et heureusement réalisé, I, l-’H, 70. — 1. Édit de Cyrus, roi des Perses, permettant la rentrée des Juifs en Palestine et la reconstruction du Temple de Jérusalem, i, 1-4. — 2. Départ d’une colonie de Juifs pour la Terre Sainte, 5-6. — 3. Cyrus fait rendre aux partants les vases et objets sacrés que les Çhaldééns avaient enlevés du Temple de Jérusalem, 7-11. — 4. Liste des Juifs qui revinrent à Jérusalem avec Zorobabel, ii, 1-70 : hommes du peuple, 2-35 ; prêtres, 36-39 ; lévites, 40-42 ; Nathinéens, 43-54 ; fils des serviteurs de Salomon, 55-58 ; Juifs, laïques ou prêtres, qui ne purent indiquer d’une manière certaine leur lignée, 59-63 ; nombre total des rapatriés, 64-67 ; leur heureuse arrivée en Palestine, 68-70. — 2* Reconstruction du Temple, commencée sans retard et bientôt suspendue à cause de la jalousie des Samaritains, iii, 1rv, 24. — 1. Érection de l’autel des holocaustes, reprise du sacrifice perpétuel et célébration de la fête des Tabernacles, m, 1-5. — 2. Commencement des fondations du Temple, 6-13. — 3. Opposition que les Samaritains font à la reconstruction du Temple, iv, 1-5. — 4. Leurs manœuvres auprès des rois de Perse pour empêcher la

restauration de la ville de Jérusalem, 6-16. — 5. Réponse d’Artaxerxès, qui interdit toute reconstruction, 17-22. — 6. Interruption des travaux commencés, 23-25. — 3° Reprise et achèvement de la construction du Temple, v, 1-vi, 22. — 1. Encouragés par les prophètes Aggée et Zacharie, les Juifs reprennent leurs travaux sans demander l’autorisation du roi, v, 1-2. — 2. Le gouverneur Thathanai en réfère à Darius, 3-17. — 3. Darius permet, par un rescrit, de poursuivre la reconstruction du Temple, vi, 1-12. — 4. Les Juifs achèvent les travaux et font la dédicace solennelle du nouveau Temple, 13-18. — 5. Célébration de la fête de la Pàque, 19-22. — deuxième partie. Esdras ramène une seconde caravane d’Israélites et poursuit l’œuvre de la restauration religieuse de la Judée, vu, 1-x, 44. — 1° Retour d’Esdras et de ses compagnons de Babylone à Jérusalem, vii, 1-vni, 36. — 1. Généalogie d’Esdras, vii, 1-5. — 2. Récit du voyage, 6-10. — 3. Édit d’Artaxerxès, conférant à Esdras une autorité suprême pour régler en Palestine toutes les affaires religieuses et civiles, 11-26. — 4. Action de grâces qu’Esdras rend à Dieu pour cet édit, 27-28. — 5. Liste des Juifs qui revinrent avec Esdras, viii, 1-14. — 6. Préparatifs du départ, 15-30.

— 7. Voyage et arrivée à Jérusalem, 31-36. — 2° Annulation des mariages illicites que beaucoup d’Israélites, précédemment revenus de la captivité, avaient contractés en Palestine, ix, 1-x, 44. — 1. Les chefs du peuple révèlent à Esdras l’existence de ces mariages, ix, 1-2.. — 2. Tristesse et prière d’Esdras, 3-15. — 3. Ordre qu’il donne de répudier les femmes étrangères, x, 1-17. — 4. Liste des coupables, 18-44 : parmi les prêtres, 18-22 ; les lévites, 23-24, et les laïques, 25-43.

IV. Unité pu livre malgré la diversité des sources.

— À la première lecture, le livre d’Esdras, dans son état actuel, paraît n’être qu’une compilation qui groupe plus ou moins heureusement des morceaux différents d’origine, de nature et de langue. On y trouve des documents officiels, des lettres de gouverneurs, des firmans royaux, dont quelques-uns sont reproduits dans leur langue originale, le chaldéen. On y remarque deux écrivains qui parlent à la première personne et se donnent comme les témoins oculaires des événements successifs qu’ils racontent. L’un rapporte des faits qui se sont passés au début du règne de Darius, ’fils d’Hystaspe, en 521, 1 Esdr., v, 4 ; l’autre, ce qui est advenu la septième année d’Artaxerxès LongueMain, en 457, I Esdr., vii, 28. Enfin le style et la rédaction ne sont pas partout uniformes et offrent des disparates. On en a conclu que l’ouvrage entier manquait d’unité et n’était qu’une indigeste compilation.

— La conclusion est certainement exagérée, car l’unité du livre peut se concilier avec la diversité des sources consultées ou des documents employés par l’auteur. Celui-ci a pu introduire dans son récit des pièces officielles qu’il avait sous la main, ou même des narrations étrangères qui répondaient à son but et qu’il agençait dans sa propre composition. L’emploi de documents différents n’est donc pas de soi un indice de.la diversité des auteurs dans le premier livre d’Esdras. Seul l’examen des morceaux détachés peut donner la solution du problème et servir à déterminer exactement la nature de la composition de cet écrit.

Les critiques, qui admettent généralement la multiplicité des documents employés dans le premier livre d’Esdras, ne sont pas parvenus à s’entendre sur leur nombre et leur étendue. Les uns procèdent avec modération et aboutissent à des conclusions qui ne manquent pas de vraisemblance ; les autres multiplient à plaisir les morceaux et font de l’ouvrage entier une mosaïque de pièces disparates et mal agencées. De Wette, Lehrbuch der historisch-kritischen Einleitung in die kanonischen und apokryphischen Bûcher des Alten Testaments, Berlin, 1817, p. 218-219, distinguait deux documents, insérés dans la première partie du livre. L’un est la liste des Juifs revenus avec Zorobabel, ii, 1-70. L’autre, iv, 8-