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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/1194

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FORÊT — FORGERON


cette question. Les cèdres du Liban ont disparu. Des massifs plus ou moins épais revêtent encore certaines parties du Carmel, les collines de Galilée, le Thabor, et, au delà du Jourdain, les pentes du Djebel Hauran. On trouve dans la plaine de Saron, vers Qaisariyéh ou Césarée maritime, une forêt de chênes clairsemés, appartenant presque tous à l’espèce nommée quercus cerris et qxiercus crinita ; quelques-uns atteignent une dizaine de mètres de hauteur, mais beaucoup d’autres sont plus petits et ne s’élèvent guère au-dessus de la taille de hautes broussailles. C’est là tout le reste d’une forêt qui, à l’époque des croisades, est désignée sous le nom de forêt d’Arsouf, parce qu’elle se prolongeait, vers le sud, jusque dans les environs de cette ville. Cf. V. Guérin, La Saniarie, t. ii, p. 388. Mais la Judée surtout est dénudée ; tout se réduit à quelques bouquets d’arbres qu’on voit par ci par là. Il est sur que la main de l’homme a beaucoup détruit sans replanter, et que la dent des animaux a arrêté l’essor des pousses naturelles. Nous croyons cependant que le ya’ar hébreu n’a pas toute l’étendue de notre mot « forêt », et que la Vulgate a eu raison de le rendre indifféremment par sallus et silva ; il correspond plus souvent à notre « bois ». Les Hébreux ont sans doute utilisé les arbres pour les usages courants de la vie. Et pourtant, si, dans la plaine, la pierre faisait défaut pour bâtir leurs maisons, la montagne la leur offrait en suffisante quantité pour ne pas dépenser beaucoup en charpente. Ils étaient loin d’avoir le luxe de meubles que nous possédons maintenant. Ils brûlaient du bois dans le Temple, pour les sacrifices ; mais pour eux-mêmes, ils se servaient souvent comme combustible d’herbes sèches ou de paille, Matth., iii, 12 ; vi, 30 ; Luc, xii, 28, ou même d’excréments desséchés d’animaux. Ezech., iv, 12, 15. Ils n’ont donc pas dû faire de très grands ravages dans les parties boisées de Chanaan. Les musulmans qui leur ont succédé ont plus contribué à la dénudation du pays par leurs destructions et surtout par leur incurie.

Ainsi, sans croire que la Palestine ait jamais été une terre très boisée, on ne peut nier cependant que, comme certains autres pays, la Grèce, par exemple, elle n’ait beaucoup perdu sous ce rapport. N’est-ce point même du déboisement que provient, avec son aridité actuelle, la pauvreté qui la désole en beaucoup d’endroits ? On sait quel rôle important jouent les forêts dans le régime des eaux et la fécondité du sol. Elles ne sont pas seulement une parure pour la terre ; elles n’assainissent pas seulement l’air en y répandant de l’oxygène, tandis qu’elles absorbent le carbone ; mais elles ajoutent en même temps l’humus au sol, condensent les vapeurs atmosphérique ; , et régularisent la température. Les feuilles jaunies qui tombent à l’automne couvrent d’un lit épais l’herbe et la mousse ; mouillées par les pluies de l’hiver et du printemps, pénétrées par l’humidité d’une terre toujours ombragée, elles se décomposent et forment une nouvelle couche d’humus qui s’ajoute aux couches anciennes. De leurs vastes et profondes masses, quand elles-sont vertes, il se dégage sans cesse une abondante vapeur d’eau qui se répand aux alentours en rosées vivifiantes ; chaque feuille, en effet, est le siège d’une active évaporation, et les grands arbres sont des machines hydrauliques d’une puissance extraordinaire. En outre, quand une forte pluie tombe sur un bois, elle mouille d’abord toute la voûte du feuillage, puis elle descend progressivement et n’arrive par terre que goutte à goutte. Alors elle pénètre doucement dans le sol, qui s’en imprègne comme fait une éponge. Une partie de cette eau est absorbée par les arbres ; mais l’autre, plus considérable, s’infiltre peu à peu dans les couches plus profondes du terrain, finit par y rencontrer un fond imperméable, dont elle suit les pentes, pour s’échapper au dehors sous forme de sources. Celles-ci donnent naissance aux ruisseaux, aux rivières et aux fleuves.

Dans ces conditions, on comprend comment les vieux massifs d’arbres de la Palestine contribuaient de toutes façons à sa beauté physique, en la parant de verdure, en alimentant les fontaines, si précieuses et relativement rares dans ce pays, brûlé pendant six mois par le soleil. Voir Fontaine. Nous ne voulons pas dire par là que la désolation actuelle de la Terre Sainte ait pour unique cause le déboisement. Il y en a d’autres, en particulier la négligence et le manque d’industrie des habitants. Mais il est permis de croire que la dénudation a eu de très pernicieux effets. Les forêts cependant avaient-elles une influence sur le régime des pluies, qu’elles auraient rendues plus fréquentes et plus abondantes ? Quelquesuns le croient. Ainsi on a constaté que, à Nazareth, qui est au sein d’une contrée mieux boisée, il tombe plus d’eau qu’à Jérusalem, dont les environs sont dénudés, et qui pourtant est à une altitude supérieure. Il y a peut-être lieu de distinguer. La pluie d’hiver ou première pluie, qui se déverse en torrents inconnus à nos climats, n’a pas dû diminuer. Mais il est probable que celle du. printemps était autrefois plus abondante qu’aujourd’hui. Beaucoup de nuages légers qui passent en venant de l’ouest étaient arrêtés par le bois et se répandaient en pluie sur le haut pays. Voir Pluie. — Pour ce qui concerne l’influence des montagnes boisées sur le régime des eaux en Palestine, et l’état actuel du pays au point de vue des massifs d’arbres qui existent encore, on peut voir L. Anderlind, Der Einfluss der Gebirgsiualdungen im nôrdlichen Palàstina auf dieVermehrung der ivàsserigen Niederschlàge daselbst, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. viii, 1885, p. 101-116.

A. Legendre.
    1. FORGERON##

FORGERON (hébreu : hârâs barzél, « ouvrier du fer ; » Septante : tIxtow o-cSrjpou ; Vulgate : faber ferrarius ; hébreu : fiârds nekosét, « ouvrier du cuivre ou airain ; » Septante : tIxtiov ^a).xoû, -/aXxeij ;  ; Vulgate : ssrarius) (fig. 676). Les ouvriers qui travaillaient le fer et ceux qui travaillaient l’airain étaient les mêmes. La Genèse, iv, 22, mentionne l’art de travailler le cuivre et le fer dès le temps des premiers patriarches. Tubalcaïn en fut l’inventeur. L’Ecclésiastique, xxxviii, 28, décrit le travail du forgeron. « Il est assis près de l’enclume et considère le morceau de fer. La vapeur du feu lui brûle la chair, et il tient bon contre la chaleur de son fourneau. La voix du marteau frappe sans cesse son oreille, et son œil est fixé sur le modèle de l’ustensile qu’il fabrique. Il met son cœur à achever son ouvrage, et il veille à le rendre parfait. » Le forgeron commençait donc par amollir le fer au feu et le façonnait ensuite sur l’enclume (pâ’as ; Septante : ay.jj.wv ; Vulgate : incus), à l’aide du marteau (hébreu : halemût, maqqabâh, pattii ; Septante : o-yjpri ; Vulgate : malleus). Le pattiS servait surtout à polir le fer déjà frappé sur l’enclume, c’était donc un marteau moins gros, avec lequel l’ouvrier frappait à petits coups. Is., xli, 7. Le feu de la forge était entretenu à l’aide du soufflet (hébreu : mâjoual.i ; Septante : çuur/riri ; » ; Vulgate : sufflatorium). Jer., vi, 29. — Les forgerons fabriquaient des armes et des chars. I Reg. (Sam.), viii, 12, Is., xuv, 12 ; lv, 16. C’est pourquoi les Philistins interdirent l’exercice de cette profession chez les Israélites. I Reg. (Sam.), xiii, 19. Nabuchodonosor, pour la même raison, emmena en captivité tous les forgerons. Jer., xxiv, 1. Ils travaillaient aussi à la fabrication des idoles. Isaïe, xli, 7, décrit les différentes phases de ce travail : « Le sculpteur encourage le fondeur, celui qui polit au marteau encourage celui qui frappe sur l’enclume. Il dit de la soudure : Elle est bonne, et il fixe l’idole avec des clous pour qu’elle ne branle pas. » Cf. Is., XL, 19 ; Bar., vi, 45. On trouve aussi des ouvriers en fer et en airain occupés à réparer le Temple. II Par., xxiv, 12. C’est à l’aide d’un marteau de forgeron que Jahel enfonça un clou dans la tête de Sisara. Jud., v, 26. Par métaphore, Zacharie, i, 20, annonce que quatre forgerons briseront les cornes, c’est-à-dire