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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/16

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CADÉMOTH — CÂDÈS

on doit supposer que ces villes étaient au nord du torrent, aujourd’hui Vouadi Modjib. D’un autre côté cependant, « le désert de Cadémoth » devait être en dehors du territoire amorrhéen. Deut., ii, 26-37 ; Num., xxi, 21-24. Faudrait-il donc distinguer la ville du désert, comme semblent le faire Eusèbe et saint Jérôme, Onomastica sacra, Gcettingue, 1870, p. 109, 270? C’est inutile, croyons-nous. On peut dire que la ville se trouvait près d’un des bras supérieurs de l’Arnon, vers l’est, l’ouadi Enkeiléh ou l’ouadi Baloua, par exemple, et qu’elle donnait son nom au désert environnant, confinant à l’est et au sud au désert syro-arabe ; à moins que les deux ne fussent ainsi appelés d’après leur situation dans la « contrée orientale » (hébreu : qédém). — On a voulu reconnaître Cadémoth dans les Listes hiéroglyphiques de Sésac, n° 25 ; M. Maspero croit avec raison qu’il est impossible de songer à cette identification. Cf. Zeitschrift fur ägyptische Sprache, 1880, p. 45.

A. Legendre.

CADÈS (hébreu : Qâdêš, « saint ; » Septante : Kάδης) ; ), nom de plusieurs villes de Palestine et d’un désert.

1. CADÈS, CADÈSBARNÉ (hébreu : Qâdêš, Gen., xiv, 7 ; xvi, 14 ; xx, 1 ; Num., xiii, 27 (hébreu, 28) ; xx, 1, 14, 16, 22 ; xxvii, 14 ; xxxiii, 36, 37 ; Deut., i, 46 ; xxxii, 51 ; Jud., xi, 16, 17 ; Ps. xxviii (hébreu : xxix), 8 ; Ezech., xlvii, 19 ; xlviii, 28 ; Qâdês Barnê'a, Num., xxxii, 8 ; xxxiv, 4 ; Deut., i, 2, 19 ; ii, 14 ; ix, 23 ; Jos., x, 41 ; xiv, 6, 7 ; xv, 3 ; Septante : Kάδης ; , comme en hébreu ; Iv aiytaîioîç, Eccli., xxiv, 18 ; Kάδης ; Bαρνή), comme en hébreu, excepté Num., xxxiv, 4, où on lit : Kάδης τοῦ Bαρνή), ville située à l’extrême limite méridionale de la Terre Promise. Num., xxxiv, 4 ; Jos., xv, 3 ; Ezech., xlvii, 19 ; xlviii, 28. C’est aussi le nom du désert environnant, Ps. xxviii (hébreu, xxix), 8, et une des stations les plus importantes des Hébreux dans leur marche de quarante ans vers le pays de Chanaan. Num., xiii, 27 ; xx, 1, etc. Après le Sinaï, c’est le point capital de ce long voyage à travers la péninsule arabique ; son emplacement est l’objet d’un problème intéressant à étudier et de nombreuses discussions qu’il nous faut résumer. Nous verrons plus tard s’il y a lieu de distinguer deux endroits de ce nom sur la route des Israélites ; disons tout de suite que Cadès et Cadésbarné sont certainement un seul et même lieu, comme il est facile de s’en convaincre en comparant Num., xiii, 27, avec Num., xxxii, 8 ; Deut., i, 19 ; ix, 23 ; Jos., xiv, 6, 7.

I. Noms. — Cadès s’appelait anciennement « la Fontaine de Misphat » ou « du Jugement » (hébreu : 'En MiSpât ; Septante : r, nr^i) t-î} ; -, ip{<rera ; ). Gen., xiv, 7. Cette appellation se rattache-t-elle au sanctuaire de quelque dieu, qui, longtemps avant Moïse, aurait rendu là ses oracles, ou à la juste sévérité de Dieu, qui s’y manifesta envers un peuple désobéissant et sans cesse en murmures ? Il n’y a rien dans le texte sacré qui favorise l’une ou l’autre de ces conjectures, émises par différents auteurs. Voir MisniAT. Il en est de même pour l’origine ou la signification des autres noms. L’hébreu קוש, qâdêš, signifie « saint », et a pour correspondant en arabe le mot arabe, qods. Mais il est difficile de savoir si cette dénomination se rapporte à un sanctuaire primitif, ou à la présence de l’arche d’alliance, ou aux événements dans lesquels Dieu « se sanctifia » (hébreu : yeqaddês) c’est-à-dire manifesta sa puissance aux Israélites, Num., xx, 13, en les comblant de bienfaits, malgré leur incrédulité et leurs révoltes, et en punissant Moïse et Aaron à cause de leur faute. Les différentes étymologies proposées pour Barné, ברנע, Barnê'a, c’est-à-dire « désert », ou « fils », ou « puits de l'Égarement », etc., sont discutables, et l’on ignore si le mot indiquait une ville dont le nom se serait uni à celui de Cadès, ou un personnage, comme semblerait le supposer la traduction des Septante, Num., xxxiv, 4, Kάδης τοῦ Bαρνή. Cf. H. Clay Trumbull, Kadesh-Barnea, in-8°, New-York, 1884, p. 24, 43 ; Keil, Numen, Leipzig, 1870, p. 292.

II. Situation. — 1° D’après l’Écriture. — L’emplacement de Cadès est une question des plus controversées. Pour la bien comprendre, et avant d’examiner les opinions émises à ce sujet, il est nécessaire de fixer les points géographiques que la Bible détermine à elle seule. Cadès paraît pour la première fois au chap. xiv, 7, de la Genèse, dans le récit de la première campagne militaire racontée par nos Saints Livres. Après avoir frappé « les Chorréens ou Horréens des montagnes de Séir » ou d'Édom, c’est-à-dire de la chaîne qui s'étend entre la mer Morte et le golfe Élanitique, « jusqu'à 'Êl-Pâ'rân, » probablement le port d’Aïla ou Élath, Deut., ii, 8, au fond du même golfe, Chodorlabomor et ses alliés, remontant vers le nord, « vinrent jusqu'à 'Ên-MiSpat, qui est le même [lieu] que Cadès. » Puis « ils ravagèrent tout le pays des Amalécites », ou plutôt la contrée qu’occupa plus tard cette tribu et qui comprenait la partie septentrionale de la péninsule sinaïtique, de la frontière d’Égypte au sud de la Palestine et sur les confins de l’Arabie Pétrée. Voir Amalécites, t. 1, col. 428. Enfin ils défirent « les Amorrhéens qui habitaient Asason - Thamar » ou Engaddi, sur le bord occidental de la mer Morte. Voir Amorrhéens, t. i, col. 503. De ce passage il ressort que Cadès avait à l’est les monts de Séir, au sud Élath, dans un voisinage immédiat les Amalécites, et au nord les Amorrhéens.

Cadès sert ensuite à déterminer l’emplacement de Béer-lalfaï- roi, ou « le Puits du Vivant qui me voit », près duquel l’ange de Dieu trouva Agar, la servante de Sara, fuyant vers l’Egypte. Gen., xvi, 14. Or ce puits, d’après l'Écriture, était « dans le désert, près de la source qui est sur le chemin de Sur », Gen., xvi, 7 ; « dans la terre du midi » ou le Négéb, Gen., xxiv, 6 2 ; « entre Cadès et Barad, » Gen., xvi, 14. Sur indique la partie nordouest du désert arabique qui confine à l’Egypte. Béerlahaï-roî se trouvait donc sur l’ancienne route qui d’Hébron conduisait au pays des Pharaons en passant par Bersabée, c’est-à-dire dans la direction du nord-est au sud-ouest ; il était entre Cadès à l’est et Barad (inconnu) à l’ouest. D’où nous pouvons conclure que Cadès ne devait pas être loin de la route d’Hébron en Egypte. C’est le chemin que dut prendre Abraham, lorsque, partant de Mambré, il vint « habiter dans la terre du midi, entre Cadès et Sur, et séjourna quelque temps à Gérare », au sud de Gaza. Gen., xx, 1. Malgré le vague de l’indication, nous comprenons ici la contrée bornée à l’est par le désert de Cadès et au sud-ouest par celui de Sur.

Le Deutéronome, i, 2, marque la distance qui séparait l’endroit dont nous parlons de la montagne du Sinaï. Il était à « onze journées de marche du mont Horeb, par la route du mont Séir », non pas, croyons-nous, celle qui longe le massif, par l’Arabah ; mais simplement celle qui conduit de ce côté, indiquant la direction du nord-est. Il est malheureusement difficile de savoir quelles furent les étapes des Hébreux pendant ce voyage. La liste des stations, Num., xxxiii, 16-36, est diversement interprétée. Plusieurs auteurs croient que Bethma, Num., xxxiii, 18, aujourd’hui l’ouadi Abou Relmât, était près de Cadès, si ce n'était la ville elle-même. Dans ce cas, l'Écriture ne mentionnerait entre le Sinaï et Cadès que les trois stations les plus importantes. Num., xxxiii, 16-18. Ce qu’il y a de certain, c’est que les Israélites arrivèrent là après avoir traversé le désert de Pharan, Num., x, 12, « grand et terrible désert, » Deut., i, 19, dans lequel Cadès est ellemême placée. Num., xiii, 27. Il s’agit ici de la région que les Arabes appellent eux-mêmes Bâdiet et-Tîh, ou « désert de l'Égarement », et qui s'étend au nord jusqu’au Négeb ou Palestine méridionale, à l’est jusqu'à la vallée profonde de l’Arabah, à l’ouest jusqu’au désert de Sur, et au sud jusqu’au massif du Sinaï. C’est un plateau calcaire, désolé, presque sans végétation et sans habitants, qui occupe près de la moitié de la péninsule.