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CHANSON — CHANT SACRÉ

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Notre -Seigneur a fait lui-même allusion aux chants des enfants qu’on entend encore aujourd’hui en Palestine comme dans tous les pays du monde. Matth., xi, 17 ; Luc, vii, 32. C’est le plus souvent dans les festins que l’on chanle, comme dans le grand repas que donne le père de l’enfant prodigue pour célébrer le retour de son fils. Luc, xv, 25. C’est aussi aux mariages, Jer., vii, 31 ; Ezéch., xxvi, 13 ; et dans les grandes réjouissances publiques, principalement après une victoire, II Par., xx, 27-28 ; Is., ix, 3 ; on improvise alors un chant sur l’événement qui vient de se produire, Jud., xv, 16-17 ; I Reg., xvin, 7 ; xxviii, 11, ou bien on le célèbre par un poème déjà connu. II Par., xx, 21. Le cérémonial des funérailles comportait des chants élégiaques ou des lamentations, usités encore aujourd’hui en Palestine, et faisant l’éloge du mort, comme nous en avons entendu, par exemple, à Nazareth. II Par., xxxv, 25 ; Eccle., xii, 5 ; Jer., ix, 17, 20 ; Amos, v, 16 ; Luc, vii, 32 ; Marc, v, 38 ; Luc, viii, 32 ; cf. Matth., ix, 23 ; II Reg., i, 19 27 ; iii, 33-34. On chantait également lorsqu’on dansait, I Reg., xviii, 6 ; xxi, 11 ; Luc, xv, 35, etc. ; pendant la moisson, ls., îx, 3, les vendanges et lorsqu’on foulait les raisins pour faire le vin. Jud., IX, 27 ; Is., xvi, 10 ; xxv, 6 ; Jer., xxxi, 4-5 ; Xlviii, 33. Dans toutes ces circonstances, une partie au moins de ces chants étaient des chansons profanes.

3° Il nous est resté dans l’Écriture quelques débris de chants profanes. Il faut ranger sans doute dans cette catégorie le chant de Lamech, le plus ancien de tous. Gen., IV, 23. — Nous avons des morceaux de chants militaires sur les victoires remportées contre les Moabites, Num., xxi, 14-15 ; sur la défaite de Séhon, roi d’Hésébon, Num., xxi, 27-30 ; l’acclamation à David, vainqueur de Goliath. I Reg., xviii, 7. — Le livre des Nombres, xxi, 17-18, nous a conservé sans doute un de ces chants que chantaient les. Israélites en travaillant au creusement d’un puits. — L’Ecclésiastique, ix, 4, fait une allusion aux chanteuses des rues. Isaïe fait de même, xxiii, 1516, et il cite dans ce passage, ꝟ. 16, quelques vers d’une chanson tyrienne. — Pour le chant religieux, voir Chant sacré, Chantres du Temple, Chef des chantres.

F. Vigouroux.

CHANT SACRÉ. Le chant et le jeu des instruments, jouissance indispensable des peuples de l’Orient, ont servi de tout temps. à rehausser l’éclat des’cérémonies religieuses, des sacrifices, des fêtes publiques et privées, des festins, des funérailles. Voir Fr. Chabas, VEgyptologie, juillet 1874, p. 49. Cf. Photius, Biblioth., ccxxxix, t. ciii, col. 1200-1208. Il en fut de même dans l’antiquité hébraïque. Le chant se joignait à toutes les fêtes (voir Chanson), mais principalement aux solennités de la religion ; et dés le séjour dans le désert il fit partie du culte sacré. Exod., xv, 20 ; Num., x, 10. Cf. Jud., xxi, 21.

Les anciennes nations suppléaient aux monuments écrits par des traditions orales et chantées. Deut., xxxi, 19. Aussi le chant fut-il cultivé dans les écoles des prophètes.

I Reg., x, 5 ; xvx, 20 ; IV Reg., iii, 15 ; Eccli., xliv, 5. Targum sur I Par., xv, 22, 27. Eusèbe, Prsep. Evang., xi, 5, t. xxi, col. 852, nous apprend que ces sages de la nation instruisaient leurs disciples au moyen de sentences, d’énigmes, de récits rythmés, de chants et de refrains mesurés en vers. Aussi dans le langage de la Bible les termes de « voyant ou prophète » et Ceux de « musicien ou chantre » sont-ils souvent pris l’un pour l’autre. I Par., vi, 33 ; xxv, 2, 3, 5. Cf. Quintilien, Insiit. orat., x, 9, 10. C’est dans ce sens que Clément d’Alexandrie, Strom., vi, 11, t. IX, col. 309, appelle David « musicien et prophète », àiW.tùv y.ai îrpo ?r ; -£j<i)v. Des écoles prophétiques, les traditions musicales passèrent aux ministres du culte, lorsque David, en préparant la construction du Temple, organisa les offices des lévites.

II recueillit, nous dit Josèphe, Ant. jud., VII, xii, 3, les hymnes anciens, en même temps qu’il en composa de nouveaux (voir Psaumes), et il établit l’ordre des chants

sacrés pour les fêtes et les cérémonies religieuses, I Par., xxill, 5, 30 ; Eccli., xlvii, 9-12. Les titres des cantiques, le contexte, ou encore le témoignage des autres livres de l’Écriture, déterminent l’usage liturgique de certains psaumes. Par exemple, le Psaume xxiv (Vulgate, xxiii), qui fut composé vraisemblablement pour le transport de l’arche, est un chant de procession ; les Psaumes xevi (xcv) et cv (civ) paraissent se rapporter à l’établissement de l’arche dans le Tabernacle, I Par., xvi, 8-34 ; le Psaume lxviii (lxvii), à la prise de Rabbath, II Reg., xii, 26 ; le Psaume xxx (xxix), à l’inauguration de l’emplacement du Temple. II Reg., xxiv, 25. On voit également que les Psaumes iv, xx (xix), i.xvi (lxv) se joignaient à l’offrande des sacrifices. D’ailleurs il ne se faisait pas dans le Temple la moindre oblation qui ne fut accompagnée du chant des Lévites. 1 Par., xxiii, 30, 31. Le Psaume cxli (cxl) était réservé pour l’offrande du soir, le Psaume xci (xc) et le Psaume m font encore partie de la prière du soir au rituel juif. Enfin sept psaumes étaient assignés à chacun des jours de la semaine pour être chantés au sacrifice du matin. C’étaient pour le premier jour le Tsaume xxiv (xxm), pour le deuxième jour le Psaume xlviii (xlvii), pour le troisième jour le Psaume lxxxii (lxxxi), pour le quatrième jour le Psaume xciv (xcm), pour le cinquième jour le Psaume i.xxxi (lxxx), pour la veille du sabbat le Psaume xcm (xcii), et pour le jour du sabbat le Psaume xcii (xci). Thamid, 7, 4. Voir Mousaph, ou Prière additionnelle du sabbat, fin. Les titres attribués à ces psaumes par les Septante, en dehors du texte hébreu, confirment exactement les indications des livres juifs. Le Psaume xxxviii (xxxvii) est pareillement affecté par les Septante au jour du sabbat. Les Juifs emploient encore le Psaume lxxxi (lxxx) pour le premier jour de l’année (RoS haSanah), et les psaumes du Hallel, Cxm (cxii)-cxviii (cxvii), aux fêtes de Pâques, de la Pentecôte, de la Dédicace, des Tabernacles et aux néoménies ; mais, avant de faire partie du Hallel, le Psaume cxvi (cxiv-cxv) était destiné à servir uniquement au repas de l’Agneau pascal, et le Psaume cxviii (cxvii) devait servir spécialement a la fête des Tabernacles. Plusieurs des psaumes sus-mentionnés sont postérieurs à David ; au surplus, les indications fournies par les titres grecs ou hébreux ne sont que d’une antiquité relative. Quoi qu’il en soit, le service quotidien établi par David dura dans son ensemble jusqu’à la captivité, II Par., xxxv, 15 ; Nébémie le reconstitua pour le second temple, I Esdr., iii, 10 ; vii, 7 ; II Esdr., vil, 45 ; xii, 45, et le même ordre persévéra dans le temple d’Hérode. Le chant des hymnes sacrés eut la principale place dans les cérémonies de la religion d’Israël ; le culte du vrai Dieu ne le céda pas en cela aux religions étrangères.

Le peuple prenait part au chant en répondant aux strophes par le « refrain », ou en poussant des acclamations, ferû’âh, Ps. xxxm (xxxii), 2, 3 ; lxxxix (lxxxviii), 15, prises en dehors du texte chanté, telles que l’Amen ou l’Alleluia (voir ces mots, t. i, col. 369 et 475). I Par., xvi, 36 ; Ps. evi (cv), exi (cx)-cxviii (cxvii), cxxxv (cxxxiv), cxlv (cxliv)-cl, titre. Cf. Eusèbe, Comment, in Psahnos, t. xxiii, col. 66-75. II faut indiquer aussi le refrain ou l’acclamation "non c¥.yb’3,

Quoniam in seternuni misericordia ejus, du Psaume cxxxvi (cxxxv) ; cf. I Par., xvi, 41 ; II Par., v, 13 ; vii, 6 ; XX, 21 ; I Esdr., iii, 11 ; le iy.înz y.ai ûnep’j^ovre a-jrôv e !  ; . to’jç aîûva ; , Laudate et superexaltate eum in sœcula, du cantique des Enfants, Dan., iii, 57-88 ; le Quoniam sanclus est, N’.n n/iip’2, du Psaume xCix (xcvm). Enfin

le chant était accompagné d’une manière analogue à celle qui est représentée sur les monuments antiques (fig. 192), par le jeu bruyant des instruments de musique, les claquements des mains et les divers mouvements de la danse religieuse. Voir Danse.