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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/33

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CAÏPHE — CAJETAN

non à Caïphe. Au chap.v, 17, il est parlé du grand prêtre qui, avec ceux de son parti, les sadducéens, fait jeter les Apôtres en prison ; au y. 27, le grand prêtre interroge les Apôtres devant Je sanhédrin réuni. Chap. vii, 1, le grand prêtre demande à Etienne, amené devant le sanhédrin, si tout ce qu’on lui reproche est vrai. Ce grand prêtre, qui n’est pas nommé, est-ce Caïphe ou Anne ? Il est certain que le grand prêtre en fonction était à cette époque Caïphe ; il est probable cependant que dans ces passages il s’agit d’Anne, puisque c’est à celui-ci que saint Luc donne le titre de grand prêtre. Act., iv, 6. — Caïphe fut déposé du souverain pontificat en l’an 36, par le légat de Syrie, Vitellius, qui, si l’on en croit une insinuation de Josèphe, aurait par cet acte voulu plaire aux Juifs. Ant. jud., XVII 1, iv, 3. Il n’est plus fait ensuite aucune mention de Caïphe, et l’on ignore quelle fut sa fin.

CAIRENSIS (CODEX). On désigne sous ce nom et par le sigle N a deux fragments d’un manuscrit grec pourpre oncial à lettres d’or, du VIe siècle, contenant un court passage de l’Évangile selon saint Marc, ix, 14-18, 20-22, et x, 23, 24, 29. Ce manuscrit mutilé appartenait au patriarche d’Alexandrie en résidence au Caire ; en 1850, le prélat russe Porphyre Uspenki collationna ces fragments et en publia le texte dans un livre dont le titre (en russe) est Voyage en Égypte et aux monastères de Saint-Antoine et de Saint-Paul de Thèbes, Saint-Pétersbourg, 1856. On ne sait ce que sont devenus depuis les fragments. Voyez Gregory, Prolegomena ad Novum Testamentum græcum, de Tischendorf, Leipzig, 1884, p. 384.

CAÏUS. Le texte grec du Nouveau Testament nomme quatre chrétiens appelés riïoç. La Vulgate a conservé pour trois d’entre eux la forme Gains (voir Gaïus) ; elle appelle le quatrième Caïus.


CAÏUS, chrétien de Corinthe. Seul avec Crispus, Caïus fut baptisé de la main de saint Paul. I Cor., i, 14. Dans l’épître adressée aux Romains, xvi, 23, l’Apôtre envoie à ceux-ci les salutations de Caïus, qui lui donna l’hospitalité, ainsi qu’à toute l’Église. C’est du moins ce qui ressort du texte grec ; la Vulgate dit : Salulat vos Caius hospes meus et universa Ecclesia. On ne peut supposer qu’il soit question ici de toute l’Église chrétienne, ou même de l’Église de Corinthe, qui envoient leurs salutations ; elles l’avaient déjà fait plus haut, xvi, 16. Saint Paul vivait donc dans la maison de Caïus, et il y réunissait la communauté de Corinthe, pour instruire les chrétiens et célébrer les saints mystères en sûreté. Quelques interprètes l’ont confondu avec un des autres Gaïus nommés dans le Nouveau Testament, mais il est impossible de savoir avec certitude ce qui en est.

CAJETAN (Thomas de Vio), ainsi nommé du nom de Gaëte ou Cajète, petite ville du royaume de Naples, où il naquit le 20 février 1469 (le 25 juillet 1470, d’après Capici). Entré à quinze ans chez les Dominicains de Gaëte (1484), il étudia la théologie à Bologne, où il fit des progrès rapides dans les sciences sacrées, et fut reçu docteur en théologie, en 1494, à l’assemblée générale de l’ordre tenue à Ferrare. Il enseigna la théologie pendant quelques années à Brescia, à Pavie et à Rome, et fut promu, en 1500, à la charge de procureur général de l’ordre. Élu général à l’âge de trente-neuf ans, sur la recommandation de Jules II (1508), et créé cardinal par Léon X (1517), il fut chargé par celui-ci d’une mission en Allemagne, pour faire entrer l’empereur Maximilien dans la ligue contre les Turcs et lui présenter l’épée bénite par le pape. Il devait aussi travailler à ramener Luther à l’obéissance. Son insuccès sur ce point ne l’empêcha pas d’être élevé, en 1519, au siège épiscopal de Gaëte. Après plusieurs autres missions accomplies sur l’ordre du pape, et notamment celle de légal en Hongrie d’Adrien VI (1523), il se fixa à Rome, où il commença seulement à s’appliquer spécialement à l’étude des Saintes Écritures. Préparé imparfaitement à ce genre de travaux, il y porta non seulement son inexpérience, mais encore ses habitudes d’esprit, ses tendances à l’originalité, son attrait pour les interprétations nouvelles et singulières. Méthode dangereuse, qui devait ouvrir la voie à de regrettables excentricités. Distrait pendant quelque temps de ces travaux, à l’époque de la prise de Rome par l’armée impériale (1527), fait prisonnier et racheté au prix d’une rançon de cinquante mille écus romains, Cajetan reprit sa vie d’études, qu’il n’interrompit plus jusqu’à sa mort (9 août 1531, selon d’autres 1535).

Cajetan, devenu justement célèbre par ses opuscules théologiques, ses controverses avec les luthériens, surtout par ses commentaires sur la Somme de saint Thomas, mérite moins de renom pour ses travaux scripturaires, bien que parmi les exégètes de son temps il occupe incontestablement un des premiers rangs. Ses ouvrages exégétiques embrassent tous les livres de l’Ancien Testament, excepté le Cantique des cantiques et les Prophètes (il commenta cependant les trois premiers chapitres d’Isaïe), et ceux du Nouveau Testament, sauf l’Apocalypse, parce que, comme il le dit lui-même, le sens littéral, le seul auquel il s’attachât, ne lui était pas clair. Dans le commentaire sur les Psaumes, composé le premier, à Rome, en 1527, et publié à Venise en 1530, il se plaint que presque tous ceux qui ont commenté ce livre avant lui sont demeurés dans les interprétations mystiques, sans se préoccuper du sens littéral. In Psalmos. Epist. ad Clément. VII. Il y parle des secours qu’il a mis à profit, savoir : la version de saint Jérôme sur l’hébreu, qu’il a comparée avec celle des Septante et avec quatre versions modernes faites sur l’hébreu. De plus, Cajetan, assez peu versé dans la connaissance de l’hébreu et du grec, ce qu’il avoue lui-même, recourut à deux hébraïsants, l’un juif, l’autre chrétien, pour la traduction des livres écrits en hébreu. In Psalm. Præf., Opera, Lyon, 1639, t. iii, p. 1. Sa méthode de traduction était d’abord de chercher à résoudre lui-même les difficultés à l’aide des dictionnaires, puis il interrogeait ces savants, recevait d’eux les différentes traductions possibles, soit en latin, soit en langue vulgaire, et choisissait celle qui lui paraissait s’harmoniser le mieux avec le contexte. Il se servit de même d’un helléniste pour la traduction des Septante et du texte grec du Nouveau Testament. Ce procédé de traduction fit que Cajetan s’éloigna en de nombreux passages de la version de saint Jérôme. Pour le Nouveau Testament en particulier, il dit, dans la préface de son commentaire sur saint Matthieu, qu’il corrige la Vulgate quand la pensée s’éloigne du grec ; mais qu’en dehors de là il a conservé le texte de saint Jérôme, alors même que la traduction lui a paru défectueuse, excepté pour l’Évangile de saint Jean et l’Épître aux Romains, dans lesquels il a corrigé toute traduction défectueuse, à cause de l’importance et de la difficulté de ces deux livres. Præf. in Matthæum, Opera, t. iv, p. 1. Pour apprécier justement ces travaux, il faut se rappeler que l’exégèse, qui avait été. morale au temps des Pères et mystique au moyen âge, devenait au XVIe siècle, une exégèse théologique et même critique. C’est avec le sentiment de cette évolution que Cajetan fit ses traductions et ses commentaires, sans parler de l’influence qu’eut certainement sur ses opinions la préoccupation des tendances et des besoins de la société savante de son temps.

Dans l’année 1527 furent imprimés les commentaires sur l’Évangile de saint Matthieu, qu’il pense avoir été écrit en grec, comme l’avait dit Érasme, et sur saint Marc. Les commentaires sur les deux derniers Évangiles parurent l’année suivante, 1528, et furent suivis, en 1529, des commentaires sur les Actes, les Épîtres de saint Paul et les épîtres catholiques. Cajetan, comme Érasme, doute de la canonicité de l’Épître de saint Jacques et de la première