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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/441

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COLOMBE


les creux des rochers les plus élevés, loin du voisinage des hommes. Plusieurs vallées en ont pris le nom de oued el-Hamâm, « vallée des Pigeons, » particulièrement celle qui débouche dans le lac de Tibériade, près de l’ancienne Magdala. Il se trouve aussi des colombes en quantités énormes dans les gorges du Kelt, du Cédron, dans la région de la Quarantaine et dans le pays de Moab. Elles appartiennent à l’espèce columba livia, ou à la variété d’Égpyte, la columba schimperi, qui diffère à peine de la précédente. Ni l’une ni l’autre de ces deux variétés n’émigrent de Palestine, et l’on y trouve leurs œufs et leurs petits en toute saison de l’année. — Le ramier, columba palumbus, se rencontre en grande quantité dans les forêts de Galaad et sur le Carmel. Le colombin n’apparaît que l’été en Palestine, et encore en assez petit nombre. On l’aperçoit surtout dans les régions de Galaad et de Basan et dans le voisinage de Jéricho. Tristram, Fauna and Flora of Palestine, Londres, 1884, p. 119. Rien ne peut donner l’idée du mouvement des myriades de pigeons dans les ravins qu’ils occupent, du bruit qu’ils y font avec leurs ailes, de la précipitation avec laquelle ils décrivent leurs cercles en volant et de l’agitation qu’ils communiquent à l’air en le traversant dans tous les sens. C’est au point que, si de grands oiseaux viennent à passer tranquillement au-dessus de ces ravins, ils sont tout d’un coup retournés sur eux-mêmes comme par une rafale inopinée de vent violent. Wood, Bible Animais, Londres, 1884, p. 419. Pendant que les colombes prennent ainsi leurs ébats, la lumière est obscurcie dans le fond du ravin comme par un nuage épais, et la fiente y tombe semblable à des flocons de neige fondante. — Les pigeons domestiques sont élevés en très grand nombre dans tout l’Orient. « Aujourd’hui, en Syrie, le pigeon est le compagnon assidu de l’homme, en quelque lieu qu’il établisse sa demeure. Le scheikh du village fait preuve de richesse s’il possède un grand colombier séparé, construit en torchis ou en briques et recouvert d’un toit. Le colombier est rempli par des pots de terre, pourvus d’une large ouverture, et servant de nid chacun à une paire de pigeons. Les gens du peuple en élèvent dans leur maison même. Dans les villages qui entourent le Carmel, il y a dans les maisons, juste sous la partie du toit qui fait face à la porte, une rangée de petits réduits carrés pratiqués dans le mur pour les pigeons. Chaque trou a sa paire d’habitants qui, pour entrer ou sortir par la porte commune, volent par-dessus les têtes de toute la famille. y> Tristram, The natural history of tlie Bible, Londres, 1889, p. 212. Les pigeons sont ainsi comme les familiers intimes de la famille. On les a toujours sous la main, pour en faire ce que l’on veut. Il en devait être à peu près de même chez les anciens Hébreux.

II. Les colombes dans la Bible. — Les colombes sont, de tous les oiseaux, ceux qui sont mentionnés le plus fréquemment dans la Sainte Écriture.’1° La colombe de l’arche. — Vers la fin du déluge, Noé fait sortir une colombe de l’arche pour se rendre compte de l’état du sol. L’oiseau était choisi à dessein, parce qu’il ne se pose que sur les endroits secs et qu’il se nourrit de graines. La colombe revint, ce qui prouva que la terre n’était pas encore assez sèche, et qu’à sa surface il ne se trouvait encore rien qui put nourrir l’oiseau. Sept jours après, la colombe fut lâchée de nouveau et revint en portant une feuille nouvelle d’olivier. À la suite d’une troisième sortie, sept autres jours plus tard, la colombe ne revint plus et Noé jugea qu’il pouvait sortir de l’arche. Gen., viii, 8-12. La colombe se retrouve dans le récit chaldéen du déluge. Samasnapistim (Hasisadra) dit dans son récit à Gilgamès (lzdubar) : « Le septième jour, je fis sortir une colombe et la lâchai. La colombe alla et tourna : elle ne trouva pas de place de repos et revint. » Col. iii, 38, 39. Ce sont ensuite une hirondelle et un corbeau qui succèdent à la colombe. Cet épisode du déluge a quelque analogie avec ce que pratiquaient

les anciens navigateurs. Ils emportaient avec eux des oiseaux en mer, et les lâchaient quand ils voulaient connaître par leur vol la proximité et la direction de la terre. Pline, H. N., i, 24. Les Argonautes en particulier lâchèrent des colombes pour savoir s’ils pouvaient traverser les Symplégades, ccueils qui fermaient l’entrée du Bosphore. Apollonius de Rhodes, Argonautica, ii, 328.

2° Les colombes dans les sacrifices. — La colombe, soit de l’espèce livia, soit de l’espèce tourterelle, est le seul oiseau qui puisse être offert dans les sacrifices. La colombe apparaît d’abord dans un rite particulier prescrit par le Seigneur à Abraham, quand il voulut contracter alliance avec lui. Le patriarche dut immoler trois quadrupèdes d’espèces différentes, les diviser en deux et placer trois moitiés à gauche et trois à droite ; il immola également une tourterelle et une colombe, puis il plaça l’une à droite et l’autre à gauche, sans les diviser. Gen., xv, 9, 10. Les oiseaux ne furent pas divisés, d’abord à cause de leur petitesse, et aussi parce qu’étant à peu près semblables l’un à l’autre, ils se correspondaient aussi exactement que les deux moitiés des autres animaux. Abraham eut à passer entre les victimes ainsi disposées. Ce rite constituait un acte d’alliance et de contrat. Jer., xxxiv, 18, 19.

— Dans les sacrifices proprement dits, l’offrande de deux tourterelles ou de deux petils de colombes n’était indispensable qu’en deux circonstances : pour l’expiation de certaines impuretés corporelles, Lev., xv, 14, 29, et À la suite de la violation d’un vœu de nazirat. Num., vi, 10. Hors de ces deux cas, l’offrande de colombes remplaçait celle de victimes trop coûteuses pour ceux auxquels la loi imposait un sacrifice. Ainsi, quand un lépreux était pauvre, il pouvait se contenter de présenter après sa guérison un agneau destiné à être offert, et deux tourterelles ou deux petits de colombes, dont l’un devait être consumé en holocauste. Lev., xiv, 22, 30. Après un refus de témoignage, un contact impur ou un serment coupable, il fallait offrir un sacrifice expiatoire composé d’une brebis ou d’une chèvre, ou à leur défaut de deux tourterelles ou de deux petits de colombes. Lev., v, 7. Il en était de même pour la purification de la femme, quarante jours après la naissance d’un enfant mâle ; celle-ci devait offrir un agneau d’un an pour l’holocauste, et le petit d’une colombe ou une tourterelle pour le péché ; si elle était pauvre, elle remplaçait l’agneau par une tourterelle ou le petit d’une colombe, destinés l’un ou l’autre à l’holocauste. Lev., xii, 6, 8. Ces petits de colombes sont des benê-yônàh, des « fils de colombes », c’est-à-dire des oiseaux qui ne sont encore ni pères ni mères, et n’ont point d’oeufs à couver ni de petits à nourrir. Le Seigneur se contentait de ces modestes victimes que les Israélites avaient sans cesse sous la main, ou qu’ils pouvaient se procurer aisément avec une dépense insignifiante. Il faut remarquer que dans ces sacrifices où deux oiseaux sont requis, l’un est simplement offert et mis à mort, tandis que l’autre est consumé en holocauste. Ces colombes tenaient, en effet, la place d’un agneau ou d’un autre quadrupède dont il était fait deux portions dans le sacrifice : l’une que le feu consumait entièrement et qui représentait comme la part de Dieu dans le sacrifice, l’autre qui était réservée pour la nourriture des sacrificateurs. Une colombe eût été trop petite pour qu’on en fit deux parts. On offrait donc deux colombes, l’une destinée à l’holocauste, l’autre réservée aux sacrificateurs. — Quand la sainte Vierge présenta Notre -Seigneur au Temple, elle apporta l’offrande des pauvres, « une paire de tourterelles ou deux petits de colombes, » Luc, ii, 24, beaucoup moins sans doute par pauvreté véritable que par humilité et obéissance aux intentions secrètes du divin Enfant. — Pour la plus grande commodité de ceux qui avaient à offrir des sacrifices, et probablement aussi pour d’autres raisons moins avouables, les prêtres tolérèrent sous les portiques du Temple la présence de marchands qui vendaient des victimes. Une première fois, Noire - Seigneur