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CANA DE GALILEE


jours d’avril 1799, arrêtèrent l’avant - garde de l’armée turque allant de Damas sur Saint-Jean-d’Acre, et préparèrent la bataille du Mont-Thabor. La route militaire de Tibériade à la mer a certainement été de tout temps par le sud de la plaine de Zabulon, en dominant celle d’Esdrelon. Le seul argument sérieux en faveur de Khirbet Qana, et qui a provoqué depuis Robinson, Biblical Researches, 1856, t. ii, p. 347-349, un mouvement d’opinion contre Kefr-Kenna, c’est que celui-là aurait été désigné jusque dans ces derniers temps sous le nom de Qana el-Djélil. Or l’universalité de cette dénomination est tellement contestable, qu’il n’a pas été possible, pas plus à M. Victor Guérin, Galilée, t. i, p. 475, témoin scrupuleux et autorisé s’il en fut, qu’à ceux qui sont venus après lui, de la retrouver sur les lèvres d’un véritable habitant du pays.

Le plus sage demeure donc, pour retrouver avec pro 43. — Urne dite de Cana. Musée d’Angers.

habilité l’ancienne Cana de l’Évangile, d’interroger la tradition ancienne et de nous y tenir d’autant plus fermement, qu’elle s’accorde avec les indications topographiques suggérées par l’Évangile ou par Josèphe. Le plus ancien itinéraire où Cana se trouve mentionnée est celui de sainte Paule, tracé par saint Jérôme : « Cito itinere pereurrit Nazareth, nutriculam Domini, Cana et Capharnaum, etc. » Itiner., édit. Tobler, t. i, p. 38. Il ne précise rien, mais il semble supposer que Cana était sur la route directe de Nazareth à Capharnaûm. Théodose, De Terra Sancta, Itiner., édit. Tobler, t. i, p. 71, se contente de dire que de Diocésarée (Séphoris) à Cana de Galilée, ou à Nazareth, il y a une égale distance, cinq milles. Il peut y avoir erreur dans le chiffre, car c’est trois milles qu’il faut lire, mais le résultat acquis est l’égalité des distances ; or cette égalité est parfaite s’il vise Kefr-Kenna, elle n’existe plus s’il s’agit de Khirbet Qana. Séphoris se trouve, en effet, au sommet d’un triangle équilatéral dont Nazareth et Kefr-Kenna formeraient la base. Antonin le Martyr devient plus explicite. Itiner., édit. Tobler, t. i, p. 93. Il se rend de Ptolémaïde à Séphoris en suivant sans doute la grande voie militaire, et de Séphoris au bout de trois milles, ce qui est la distance exacte, il arrive à Cana, où le Seigneur avait assisté aux noces. Là même où Jésus s’était assis, le pieux voyageur écrit les noms de ses parents. Ce lieu avait été déjà transformé en église, puisqu’il s’y trouvait un autel où Anto-Jliii offrit une. des deux amphores encore conservées par

les fidèles, et où l’eau, une fois de plus, venait de se changer en vin à l’occasion de sa visite. Après cela il courut se laver, en signe d’actions de grâces, dans la fontaine de Cana. Près de deux siècles plus tard, vers 726, saint Willibald, étant allé de Nazareth à Cana, y trouve une grande église ; mais il n’y a plus qu’une des deux amphores vénérées par Antonin le Martyr. La piété des empereurs d’Orient et des princes d’Occident avait disputé aux pauvres paysans de Palestine ces illustres reliques. Il passe un jour à Cana et va de là au Thabor. Itiner., édit. Tobler, t. ii, p. 260. Ce pèlerin a donc vénéré lui aussi à Kefr-Kenna, et non à Khirbet-Qana, le souvenir du premier miracle de Jésus. L’église qu’on y voyait était probablement celle que Nicéphore Callistc, H. E., viii, 30, t. cxlvi, col. 113, suppose avoir été bâtie par sainte Hélène.

Au temps des croisades, la tradition devient peu à peu

44. — Tète de Bacchus de l’urne dite da Cana. Musée d’Angers.

indécise. Peut-être le texte erroné d’Eusèbe, où Cana d’Aser était confondue avec Cana de Galilée, donna-til quelques inquiétudes aux plus lettrés, et chercha-t-on au nord de la plaine de Zabulon un site moins éloigné de la tribu d’Aser. Quoi qu’il en soit, Sœvulf, vers 1103, place Cana à six milles au nord de Nazareth, sur une montagne. On n’y voit plus, assure-t-il, qu’un monastère dit de l’Arehitriclin. L’orientation de Khirbet Qana est certainement bien marquée au nord de Nazareth, mais la distance est fausse, car il y a neuf milles. Kefr-Kenna est à trois milles nord-est. Phocas, Descript. Terrx Sanctse, Patr. gr., t. cxxxiii, col. 933, dit que Cana était, de son temps, un château fort sans importance, dans les collines qui se groupent du côté de Nazareth. Il semble indiquer Kefr-Kenna. Jean de Wurzbourg suit son exemple et trouve Cana à quatre milles de Nazareth et à deux de Séphoris. Descript. Terrse Sanclæ, édit. Tobler, p. 112. Toutefois, en copiant la relation du moine Brocard, Marino Sanuto, vers 132 1, place catégoriquement Cana à Khirbet Qana actuel. Sécréta fidelium, à la suite des Gesta Dei per Francos, Hanau, 1611, p. 253 et carte n. La petite ville, dit-il, s’échelonne sur une montagne haute et ronde, au nord, et elle domine la piaine de Séphoris du côté du sud. On y montre sous terre la salle du festin devenue une crypte, après tous les bouleversements qui ont transformé le pays. De l’église, il ne dit rien ; mais le trouble apporté dans la tradition primitive,