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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome III.djvu/248

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HÉBRAÏQUE (BIBLE) — HÉBRAÏQUE (LANGUE)

1. HÉBRAÏQUE (BIBLE). Voir Bible, t. I, col. 1776.

2. HÉBRAÏQUE (LANGUE). — La langue hébraïque est la langue que parlaient les anciens Hébreux et dans laquelle a été écrite la plus grande partie de l’Ancien Testament. À part un verset de Jérémie, x, 11, quelques chapitres de Daniel, ii, 4b-vii, 28, et d’Esdras, I Esd., IV, 8-vi, 18 ; vii, 16-26, qui sont en araméen, c’est en hébreu qu’ont été rédigés tous les livres protocanoniques de l’Ancien Testament, ainsi que plusieurs deutérocanoniques conservés seulement dans les traductions (Eccli. ; peut-être Dan., iii, 24-90), xiii, xiv ; I Mach.) et un certain nombre d’apocryphes (Énoch, les Psaumes de Salomon, etc.). — En dehors de ces écrits bibliques ou se rattachant à la Bible, il ne nous est parvenu que quelques inscriptions rédigées en hébreu : l’inscription de Siloé, découverte à Jérusalem en 1880 et remontant au VIIIe siècle av. J.-C. ; une vingtaine de sceaux en partie antérieurs à la captivité et ne contenant guère autre chose que des noms propres ; des monnaies du temps des princes machabéens. — Le nom de langue hébraïque n’est pas ancien dans la Bible ; il remonte aux environs de 130 av. J.-C., date à laquelle il est pour la première fois employé par le traducteur de l’Ecclésiastique (ἐν ἑαυτοῖς ἑβραϊστὶ λεγόμενα ; voir Hébreu 2, col. 515). La langue hébraïque a été appelée langue sacrée par les Juifs en opposition avec l’araméen qui est dit langue profane. Les savants désignent souvent l’hébreu biblique sous le nom d’ancien hébreu par opposition au néo-hébreu de la mischna. — L’hébreu est une branche de cette grande famille des langues sémitiques (voir Sémitiques [Langues]) répandues dans l’Asie occidentale, de la Méditerranée au Tigre et à l’Euphrate, des montagnes d’Arménie au sud de l’Arabie, portées par les Arabes jusqu’en Abyssinie et par les Phéniciens dans les îles et sur divers rivages (Carthage) de la Méditerranée. — Pour les savants qui divisent les langues sémitiques en quatre groupes : méridional (arabe, éthiopien), septentrional (dialectes araméens), oriental (assyro-babylonien), et intermédiaire (dialectes chananéens), c’est à ce dernier groupe qu’appartiennent, avec le phénicien, le punique, le moabite, etc., l’ancien hébreu et les dialectes néo-hébreu et rabbinique qui en sont issus.

I. Écriture. — I. alphabet et consonnes. — L’un des traits les plus caractéristiques dans les langues sémitiques est l’importance des consonnes. Ce sont les consonnes qui indiquent l’idée maîtresse du mot dont les voyelles ne servent qu’à marquer les nuances ou les points de vue secondaires. Toutes les fois par exemple que les trois lettres Q D Š seront groupées dans cet ordre, et quelles que soient les voyelles, on aura des mots renfermant l’idée de sainteté : QâDaŠ, « il a été saint ; » QâDôŠ, « saint ; » QôDéŠ, « sainteté, sanctuaire ; » QâDêŠ, « voué à la prostitution sacrée. » Il en est tout autrement dans nos langues, comme le prouvent les mots suivants qui ne diffèrent entre eux que par leurs voyelles. : PâLiR, PeLeR, PiLeR. PoLiR. Cette remarque nous permet de comprendre pourquoi l’alphabet hébreu pouvait ne renfermer que des consonnes. Lorsque l’hébreu était une langue parlée, il suffisait au lecteur expérimenté de connaître le sens principal exprimé par les consonnes ; le contexte et la teneur générale du passage déterminaient le sens secondaire qu’il devait exprimer au moyen de telles ou telles voyelles. — Il y a vingt-deux lettres dans l’alphabet hébreu ; toutefois, comme l’une de ces lettres correspond à deux articulations, on peut dire qu’il y a en tout vingt-trois consonnes. Leurs noms, d’origine phénicienne, désignent les objets avec lesquels leur forme primitive présentait des ressemblances. Nous reproduisons ici la forme des lettres, leurs articulations, leurs noms transcrits en caractères romains, la signification certaine ou simplement probable de ces noms. Enfin puisque les lettres hébraïques ont été employées comme chiffres, nous indiquons dans une dernière colonne leur valeur numérique.

ALPHABET HÉBREU
forme. articulation. nom
en hébreu
transcription. sens. valeur
numérique.
11. א ’, esprit doux אָלֶף Aleph. Bœuf. 101
12. ב b בֵּית Beth. Maison. 102
13. ג g, toujours dur. גּימֶל Ghimel. Chameau. 103
14. ד d דָּלֶת Daleth. Porte. 104
15. ה h הֵא Hê. Fenêtre. 105
16. ו v וָו Vav. Crochet. 106
17. ז z זַיִן Zaïn Arme. 107
18. ח ḥ, aspiration très forte חֵית Ḥêth. Rempart. 108
19. ט t טֵית Têth. Serpent. 109
10. י y, consonne יוֹד Yôd. Main. 110
11. ך, כ k כָּף Kaph. Creux de la main. 120
12. ל l לָמֶד Lamed. Aiguillon. 130
13. ם, מ m מֵם Mêm. Eau. 140
14. ן, נ n נוּן Nun. Poisson. 150
15. ס s סָמֶךְ Samek. Appui. 160
16. ע ‘, esprit rude עַיִן Aïn Œil. 170
17. ף, פ p פֵּא Pê. Bouche. 180
18. ץ, צ ts צָדֵי Ṣadê. Harpon. 190
19. ק q קוֹף Qoph. Nuque. 100
20. ר r רֵישׁ Rêsch. Tête. 200
21.
שׂ s שִׂין Ṡin.
Dent.
300
שׁ ch שׁין Šin.
22. ת תָּו Tav. Signe. 400

Remarques. — 1. Cinq de ces lettres ont une forme différente à la fin des mots ; ce sont les lettres צ, פ, נ, מ, כ, qui deviennent ץ, ף, ן, ם, ך. — Le Ṡin et le Šin ne diffèrent entre eux que par le point diacritique placé à gauche pour la lettre Ṡin (שׂ), à droite pour la lettre Sin (שׁ).

9 8 7 6 5 4 3 2 1

— 2. L’hébreu s’écrit de droite à gauche (בראשית ברא) et non de gauche à droite comme s’écrivent nos langues européennes. Jamais on ne commence un mot à la fin d’une ligne pour le continuer au début de la ligne suivante : on laissera plutôt un espace blanc à la fin de la ligne. Certaines lettres toutefois peuvent se dilater pour remplir cet espace blanc : ת, ם, ל, ה, א, peuvent devenir ﬨ, ﬦ, ﬥ, ﬣ, ﬡ. i — 3. Au point de vue de la prononciation, la plupart des lettres hébraïques ont leur équivalent dans nos langues. Les gutturales, ע, ח, ה, א, présentent seules une difficulté notable ; l’א se fait sentir par une articulation très légère semblable à l’esprit doux du grec ; le ה correspond à notre h aspiré, le ח au ch allemand très fort ; quand au ע, c’est une articulation toute particulière aux Orientaux (gh ou rg). Parmi les sifflantes ז, שׁ, שׂ, ץ, ס, ז correspond à notre z, ס à notre s ; שׂ a un son un peu plus dur ; le צ est intermédiaire entre s dur et ts. — 4. Les lettres