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JÉSUS-CHRIST

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lence et l’obscurité, ce n’est donc ni par ignorance, ni par impuissance, mais uniquement parce qu’il le veut. /II. LA VIE cachée. — Après son retour de Jérusalem, Jésus vécut soumis à ses parents. Luc, ii, 51. Il continua à recevoir dans la famille l'éducation qui se donnait habituellement. Voir Éducation, t. ii, col. 1595-1598. Il apprit par conséquent un métier et choisit naturellement celui de son père adoptif, qui était charpentier. Voir Charpentier, t. ii, col. 601. On le connut plus tard sous le nom de « fils du charpentier » et « charpentier » lui-même. Matth., mi, 55 ; Marc, vi, 3. Il exerça ce métier jusqu'à l'âge d’environ trente ans, où il commença son ministère public II suit de là que lui, qui avait à s’occuper des affaires de son Père, y travaillait de la sorte, ainsi qu’au salut des hommes, aussi efficacement qu’il eût pu faire par des œuvres plus éclatantes.

— Bien qu’appelé « premier-né » de Marie, Luc, ii, 7, Jésus fut son fils unique. Ceux que les évangélistes appellent « frères de Jésus » ne sont que ses cousins. Voir Frère, t. ii, col. 2403-2405. — Pour suppléer au silence des évangélistes sur l’enfance et la vie cachée du Sauveur, des auteurs du premier siècle ont imaginé des récits plus circonstanciés, le « Protévangile de Jacques % l' « Évangile de saint Thomas », l' « Évangile arabe de l’enfance ». Sur la valeur de ces récits, voir Évangiles apocryphes, t. ii, col. 2115-2116. — Cf. Lagrange, Le récit de l’enfance de Jésus dans saint Luc, dans la Revue biblique, 1895, p. 160-185 ; Chauvin, L’enfance du Christ, Paris, 1901.

IV. Ministère public.

La durée exacte du temps que Jésus-Christ a consacré à la prédication de son Evangile ne nous est pas connue, bien que la parabole du figuier stérile, Luc, xiii, 7, donne à penser que cette durée a été probablement d’un peu plus de trois ans. Cf. Knabenbauer, Evang. sec. Lucam, Paris, 1896, p. 411, et t. ii, col. 735. Aussi, dans ce résumé de la vie publique du Sauveur, nous abstiendrons-nous de suivre l’ordre chronologique des faits, tel qu’il a pu être établi pour une période évangélique de trois ans et demi. On trouvera les faits disposés dans cet ordre à l’article Évangiles (Concorde des), t. ii, col. 2099-2114. Nous préférons les grouper en tenant surtout compte des milieux dans lesquels Notre-Seigneur a porté la bonne nouvelle, ce qui nous permettra de justifier les différences que l’on remarque entre les procédés d'évangéhsation que décrivent les synoptiques et ceux que l’on constate dans les récits de saint Jean.

I. L’INAUGURATION DE LA PRÉDICATION ÉVANGÉLIQUE.

— Pendant la première période de sa vie publique, le Sauveur se présente dans les divers milieux qu’il se propose d'évangéliser, mais sans donner encore à sa prédication tout son essor. Il ne veut pas interrompre brusquement le ministère de Jean-Baptiste ; c’est seulement après l’emprisonnement du Précurseur que lui-même commencera à prêcher sa doctrine. Matth., iv, 12 ; Marc, 1, 14.-1° La prédication de saint Jean-Baptiste. — « En ces jours-là, » c’est-à-dire à une époque indéterminée avant l’apparition de Notre-Seigneur au milieu des foules, le Précurseur prêchait la pénitence. Il invitait les hommes à se préparer à la venue de quelqu’un qui serait plus grand que lui, et vis-à-vis duquel il se jugeait indigne de remplir même le rôle d’esclave. Matth., iii, 11 ; Marc, i, 7 ; Luc, iii, 15. Voir Jean-Baptiste, col. 1157.Il baptisait dans l’eau du Jourdain. Voir Baptême, t. i, col. 14341435. Mais en même temps il avertissait que le Messie baptiserait dans le Saint-Esprit. Voir Lagrange, Bethanie ou Bethabara, dans la Revue biblique, 1895, p. 502-512.

, — 2° Le baptême de Jésus. — Venu de Galilée, Jésus se présenta un jour au baptême de Jean. Celui-ci protesta . qu’il avait plutôt à recevoir le baptême de Jésus qu'à lui donner le sien. Mais le Sauveur déclara qu’il y avait là un < actedejustice à accomplir. Pendant que Jean le baptisait, la voix du Père désigna Jésus comme son « Fils bien-aimé »,

et le Saint-Esprit descendit sur lui. Matth., iii, 13-17 ; Marc, i, 9-11 ; Luc, iii, 21-23. À ce signe, Jean reconnut que Jésus, dont il n’ignorait pas la mission divine et le caractère messianique, allait commencer à se présenter publiquement comme le Messie. Joa., i, 33. Cf. Knabenbauer, Evang. sec. Matth., Paris, 1892, t. i, p. 136. De plus, en recevant le baptême de Jean, Jésus honorait le ministère du Précurseur et donnait à entendre que, s’il prenait sa place, ce n'était pas pour évincer un concurrent, mais pour continuer et parfaire une œuvre que Jean n’avait eu que la grâce de préparer. Cf. Bornemann, Die Taufe Chnsti durch Johannes, Leipzig, 1896. — 3° La tentation au désert. — L’Esprit qui était descendu sur Jésus le conduisit immédiatement au désert où, à la suite d’un jeûne de quarante jours, le démon vint le tenter. L'œuvre de la rédemption commençait ainsi par une lutte avec Satan, comme avait commencé jadis l'œuvre de la déchéance. Le but du tentateur était de se renseigner sur la personnalité qu’il avait devant lui. En quel sens Jésus avait-il été appelé « Fils bien-aimé » de Dieu ? N'était-il pas le Messie ? En succombant à la tentation, Jésus eût naturellement rassuré Satan. Mais, au contraire, il repoussa ses offres et rappela des textes de l'Écriture qui opposaient au tentateur une fin de non-recevoir, sans pourtant lui fournir aucune lumière décisive sur la question qu’il avait intérêt à résoudre. Quand, plus tard, Notre-Seigneur fit à ses Apôtres la coniidence de ce qui s'était passé entre lui et Satan, il dut, pour se mettre à leur portée, raconter la tentation sous une forme des plus concret^. Mais on croit communément que la suggestion diabolique n’atteignit que l’imagination du Sauveur, sans pouvoir du reste ni inquiéter l’esprit, ni troubler la conscience, ni produire le moindre ébranlement dans la volonté. Impuissant, ce jour-là, à obtenir la solution qui l’intéressait, le démon interviendra souvent dans le cours de la vie publique du Sauveur, afin de poursuivre son enquête. Matth., iv, 1-11 ; Marc, I, 12-13 ; Luc, iv, 1-13. Cf. A. G. Ammon, Tentator Satanas confutalus a D. N. J. C, dans le Thésaurus de Hase et Iken, Lejde, 1732, t. ii, p. 159-174 ; L. Fillion, Évangile selon saint Matthieu, 1878, p. 82-87. — 4° Le témoignage de JeanBaptiste. — Cependant les membres du sanhédrin avaient délégué plusieurs des leurs auprès de Jean pour l’interroger. Celui-ci déclara qu’il n'était ni le Messie, ni Elie, ni le prophète (6 K^ofr^i^c), Deut., xviii, 15, mais qu’il préparait la voie à celui qui devait venir. Quand Jésus reparut sur les bords du Jourdain, il le désigna comme « l’agneau de Dieu » et montra qu’il reconnaissait en lui le Messie. C’est alors que s’attachèrent à Jésus ses cinq premiers disciples, Jean, André, Simon-Pierre, Philippe et Nathanæl, appelé aussi Barthélémy. La mission de Jean touchait ainsi à son but : il avait annoncé la enue imminente du Messie, préparé les âmes par la pénitence à le recevoir, baptisé et enfin montré le Rédempteur en personne. Joa., i, 19-51. — 5° Les noces de Cana. — Ainsi présenté aux Israélites par son Précurseur, Jésus se rendit immédia tement dans la Galilée, qui allait devenir le théâtre le plus habituel de ses prédications et où il avait dessein d’inaugurer son œuvre messianique. Il assista à des noces à Cana et y lit son premier miracle, en changeant l’eau en vin. Voir Cana, t. ii, col. 110. Le résultat fut que « ses disciples crurent en lui », c’est-à-dire commencèrent résolument à le regarder comme le Messie, non plus seulement sur la. parole de Jean, mais sur la constatation de sa puissance surnaturelle. Joa., ii, 1-12. — 6° Le premier séjour à Jérusalem. — Après un court séjour à Caphafnaum, le Sauveur monta à Jérusalem, à l’occasion de la Pâque, et se rendit au Temple. Voir P. Aucler, Le Temple de Jérusalem au temps de N.-S. J.-C, dans la Revue biblique, 1898, p. 193-206. D y fit acte d’autorité en chassant les marchanda qui s'étaient