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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome III.djvu/76

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GAZOPHYLACIUM — GÉANTS


au nombre de treize, répondant à autant de destinations différentes : 1. demi-sicles de l’année courante ; 2. demisicles de l’année échue ; 3. colombes et tourterelles ; 4. holocaustes ; 5. bois ; 6. encens ; 7. or et argent pour’les ustensiles du Temple. Les six autres, portant l’inseription « à volonté », recevaient ce qui restait à offrir quand on avait donné le nécessaire pour les sacrifices : 8. surplus d’un sacrifice expiatoire ; 9. surplus d’un sacrifice pour le délit ; 10. surplus des sacrifices pour certaines impuretés légales ; 11. surplus du sacrifice de nazirat ; 12. surplus du sacrifice des lépreux ; 13. surplus des offrandes volontaires. L’argent des sept premiers troncs, particulièrement des 3 et 4, était employé par les prêtres sans qu’on eût à s’en occuper ; ils immolaient autant de victimes que l’indiquaient les sommes remises. L’argent des six derniers troncs servaient à offrir des holocaustes. Schekalim, vi, 5 ; Gem. Yqma, 55, 2. — 3° Trois fois l’an, quinze jours avant les trois grandes fêtes, on tirait du trésor trois coffres d’argent pour solder les différents objets nécessaires aux sacrifices de ces fêtes et payer les personnes qui remplissaient Certains offices accessoires. Ce qui restait dans le trésor, après qu’on en avait retiré ces trois coffres, était employé à différents travaux d’entretien et de réparation au Temple, aux aqueducs du sanctuaire et même aux tours’et aux murs de la ville. Gem., Ketuboth, 106, 2. Les sommes qui n’avaient pas été dépensées à ces travaux servaient à acheter du viii, de l’huile et de la farine pour les offrandes des particuliers, auxquels on les vendait avec un profit pour le trésor. Cf. Reland, Antiquitates sàcrse, Utrecht, 1741, p. 47-50. — 4° La scène décrite dans l’Évangile, Marc, xii, 41-44 ; Luc, xxi, 1-4, nous montre les riches versant leurs offrandes avec ostentation dans le trésor. On pouvait se rendre compte dé l’abondance des dons qu’ils apportaient, et, pareils aux hypocrites qui faisaient sonner de la trompette pour avertir qu’ils allaient distribuer leurs aumônes, Matth., vi, 2, ils prenaient soin que la foule, nombreuse aux abords du gazophylacium, n’ignorât rien de leurs libéralités. Notre-Seigneur met l’humble aumône de la veuve au-dessus de leurs dons orgueilleux.

H. Lesêtre.
    1. GÉANTS##


GÉANTS, hommes d’une stature extraordinaire. La Sainte Écriture parle plusieurs fois d’hommes auxquels les versions donnent le nom de géants, et qui portent en hébreu des appellations diverses.

I. Les nefîlîm.

1° On lit dans un récit de la Genèse, vi, 4, qui se rapporte à l’époque antérieure au déluge : « Les nefîlîm étaient sur la terre en ces jourslà, et aussi après que les fils d’Elohim s’unirent aux filles des hommes et qu’elles leur engendrèrent : ce sont là les gibborîm (les forts), qui autrefois furent hommes de renom. » L’étymologie du mot nefîlîm n’est point assurée. Gesenius, Thesaurus, p. 899, tire ce nom de nâfal, « tomber. » Les nefîlîm seraient, non pas, comme pensent quelques hébraïsants, ceux devant qui l’on tombe, par crainte ou par faiblesse, mais ceux qui tombent sur les autres par violence et avec la supériorité de leur force. Cf. Gen., xliii, 18 -..hitnappêl’alênu, « tomber sur nous. » Ce sens est adopté par Aquila : èittm’irrovTEç, et Symmaque : (itaîoi. D’autres rattachent nefîlîm à pdlâ’, « distinguer, » d’où le niphal, « être remarquable, grand, étonnant. » Ces étymologies ne s’imposent pas, et ni les Septante : ylfavx(, ni la Vulgate : gigantes, ne paraissent s’en être inspirés. Dans la mythologie, les géants étaient des hommes sauvages et d’énorme stature que Zeus détruisit, Odyss., vii, 59, 206 ; x, 120, des fils de Gœa, personnification de la terre, Hésiode, Theog., 185, des fils de la terre et du Tartare, qui se révoltèrent contre Jupiter, voulurent escalader le ciel, furent foudroyés et ensevelis sous l’Etna. Ovide, Metam., i, 152, v, 319 ; Fast., v, 35 ; Cicéron, De nat. deor., ii, 28, 70 ; ’Lucrèce, iv, 139 ; v, 118, etc. Les deux versions se ser vent donc ici, comme dans d’autres passages, d’un’terme mythologique pour rendre, par analogie, un mot hébreu qui exprime une idée positive et historique. Il suit decette interprétation que les nefîlîm constituaient une race d’hommes remarquables par leur force, peut-être leur stature plus haute que celle des autres hommes, et la domination qu’ils exerçaient sur le monde de leur temps. Saint Jérôme, In Is., vi, 14, t. xxiv, col. 219, remarque que les Gentils appelaient « géants » ceux qui sont nés de la terre, tandis que nous donnons ce nom àceux qui accomplissent des œuvres terrestres. Dans les livres postérieurs de la Bible se retrouvent quelques allusions à ces êtres antédiluviens. Dans le cantique qui termine le livre de Judith, xvi, 8, il est dit que l’ennemi a été terrassé par une femme, non par les fils des Titans, viol TtTÔvtùv, filii Titan, ni par les hauts géants, û<lii]Àoi Fifavreç. Les Titans étaient, selon la mythologie, issus de Titan, fils d’Uranus, et de la terre. Révoltés contre Saturne, frère aîné de leur père, ils furent foudroyés par Jupiter et précipités dans le Tartare. C’étaient donc des êtres analogues aux géants, et le livre de Judith évoque probablement, sous ces noms d’emprunt, le souvenir des nefîlîm d’autrefois. Le livre de la Sagesse, xiv, 6, désigne plus clairement les orgueilleux géants, ûitepriçoivoi Y’YawEc, superbi gigantes, qui périrent dans les eaux du déluge. Cf. III Mach., ii, 4. Ces textes supposent que les nefîlîm formaient une race forte, audacieuse, orgueilleuse et en révolte contre Dieu ; mais rien n’indique en eux, comme caractère saillant, l’idée de stature énorme que nous attachons au mot « géants ». Du texte de la Genèse, vi, 4, on peut tirer d’importantes conclusions. Tout d’abord, les nefîlîm préexistaient sur la terre à l’union des « fils de Dieu » et des « filles de l’homme », puisque le texte dit formellement qu’il y en eut aussi, vegam, après cette union. Ces nefîlîm étaient-ils descendants de Seth ou de Caïn ? Probablement des deux. Rien ne laisse supposer en effet que le crime de Caïn ait causé une dégénérescence physique dans sa race. L’union des « fils de Dieu » avec les ci filles de l’homme » semble au contraire avoir apporté une certaine modification dans l’état de l’humanité, car les fils qui sortirent de cette union ne furent pas des nefîlîm, comme leurs ancêtres, dont beaucoup existèrent encore jusqu’au déluge, mais seulement dès gibborîm, « des forts. » Ces derniers se firent un nom. L’auteur sacré ne dit pas à quel titre. Il est possible qu’ils aient cherché la célébrité, en posant pour des hommes plus avisés, plus entreprenants que leurs pères, en faisant de l’oubli de Dieu une condition de bonheur et de progrès, enfin en contractant des unions avec la partie maudite, mais peut-être plus industrieuse, du genre humain. Josèphe, Ant. jud., i, iii, 1, les appelle « des fils déshonorés, qui, se fiant à leur valeur, méprisèrent toute honnêteté ». C’est seulement à raison de leur audace contre Dieu qu’il les compare aux rcyavue ; des Grecs. — 2° Au livre des Nombres, xiii, 33, apparaît pour la seconde et dernière fois le nom de nefîlîm. Voici en quelles circonstances. Moïse avait envoyé en avant, dans le pays de Chanaan, des espions chargés de l’explorer. Ceux-ci s’avancèrent jusqu’à Hébron, et en rapportèrent une grappe de raisins si considérable que deux hommes la portaient sur une perche. Caleb et Josué, Seuls parmi les envoyés, déclarèrent au retour que les Israélites pouvaient parfaitement se rendre maîtres du pays. Mais lesautres dirent : « Le pays dévore ses habitants. Tous ceux que nous y avons vus sont des hommes de haute taille. Là, nous avons vu des nefilîm, fils d’Énac (issus) de nefîlîm, et nous étions à nos yeux comme des sauterelles, et nous l’étions à leurs yeux. » Pour interpréter ce texte, il faut d’abord se souvenir que les espions hébreux ne pouvaient connaître les nefilîm d’avant le déluge que par ouï-dire. Si la restriction du déluge à une partie seulement de l’humanité était scientifique-