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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome III.djvu/782

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JESUS-CHRIST


aux mêmes détails, sous peine de voir le silence des uns érigé en contradiction irréductible contre le récit des autres. En disant formellement qu’« après sa passion il s’est montré à eux par beaucoup de manifestations (xsx(/, ripioi ;, « témoignages probants » ), leur apparaissant pendant quarante jours », Act., i, 3, saint Luc montre assez clairement que les récits évangéliques de la résurrection sont loin d’être complets. Les divergences signalées dans les récits, apparition d’un ange ou de deux anges, assis ou debout dans le tombeau ou hors du tombeau, etc., sont sans importance. N’est-il pas naturel que dans une scène aussi mouvementée et aussi merveilleuse, les principaux acteurs aient changé maintes fois d’attitude, et que les témoins aient reproduit les faits tels qu’ils se déroulaient sous leurs yeux au moment où ils en étaient le plus vivement frappés ?

— 5° Notre-Seigneur n’apparaît à aucun de ses ennemis. Ils n’en sont pas dignes et il n’a pas à leur imposer une foi dont ils n’ont pas voulu quand ils avaient tous les éléments désirables pour croire. D’ailleurs ceux qui ne croyaient ni à Moïse ni aux prophètes auraient encore trouvé des raisons pour conclure contre l’apparition d’un mort ressuscité. Luc, xvi, 31. — 6° Au lieu d’aller au-devant de l’idée d’une résurrection de leur Maître, les Apôtres font les plus grandes difficultés pour l’admettre. En voyant le tombeau vide, Madeleine croit à un enlèvement du corps, Pierre garde le silence, Jean seul commence à croire ; mais c’est des Écritures, et nullement de la promesse du Sauveur, que semble lui venir la pensée de la résurrection. Joa., xx, 6-9. Les saintes femmes se rappellent les paroles de Noire-Seigneur, mais seulement quand les anges ont appelé leur attention sur ce point. Luc, xxiv, 7, 8. Quand elles-mêmes racontent aux Apôtres qu’elles ont vu le Seigneur vivant, on traite leur récit de folie et on ne les croit pas. Luc, xxiv, 11.0n ne croit guère davantage le récit des deux disciples d’Emmaus. Marc, xvi, 13. Aussi Notre-Seigneur apparaissant aux onze dans le cénacle leur reproche-t-il leur incrédulité et la dureté de leur cœur. Marc, xvi, 14. À son tour, Thomas récuse le témoignage de tous les autres et veut voir et toucher pour croire. Joa., xx, 25. Enfin, en Galilée, il semble que, des disciples ne croyaient pas encore à la réalité de la résurrection, malgré toutes les assurances qu’avaient pu donner les témoins oculaires. Matth., xxviii, 17. Loin donc de trouver des prédispositions dans l’esprit des Apôtres et des disciples, la croyance à la résurrection s’y est heurtée au contraire à une opposition qui n’a cédé que devant une irréfutable démonstration. — 7° La résurrection de Jésus-Christ n’a pas été purement idéale. Le Sauveur s’est laissé voir et toucher, Luc, xxiv, 39, 40 ; Joa., xx, 20, 27 ; il a mangé sous les yeux de ses Apôtres, Luc, xxiv, 42, 43 ; il a fait les actes d’un vivant, Joa., xxi, 5, 6, 9-13 ; Luc, xxiv, 15-17, 25-31, tout en gardant à son corps glorieux le privilège d’échapper aux lois de la matière. Luc, xxiv, 31 ; Joa., xx, 19, 26 ; Luc, xxiv, 51. — 8° Le fait de la résurrection n’a pas été discrètement conservé dans le souvenir de quelques disciples. Il a été publié dans tout l’univers comme l’événement principal de toute l’histoire évangélique et le fondement même de la foi chrétienne. Act., i, 22 ; ii, 24, 31 ; iii, 15, 26 ; iv, 2, 10, 33 ; v, 30 ; x, 40, 41 ; xiii, 30, 34, 37 ; xvii, 3, 18, 31 ; xxvi, 23. Saint Paul dit même que « si le Christ n’est pas ressuscité d’entre les morts, notre foi est vaine ». I Cor., xv, 14, 17. — La résurrection, historiquement indéniable, met donc le sceau à la démonstration de la divinité du Sauveur. Il avait prédit qu’il ressusciterait ; il est ressuscité ; il a ainsi confirmé la vérité de toutes ses paroles : donc il est vraiment le Fils de Dieu. Cf. Hooke, De vera religione, dans le Cursus theol. de Migne, 1853, t. iii, col. 44-64 ; Sherlock, Les témoins de la résurrection de J.-C, dans les Démonst. évang.

de Migne, 1843, t. vii, col. 527-594 ; West, Observations sur l’histoire de la résurrection de J.-C., ibid., t. x, col. 1023-1172 ; Freppel, Confér. sur la divinité de Jésus-Christ, Paris, 1873, p. 211-232 ; Lescœur, La science et les faits surnaturels contemporains, Paris, 1897, p. 10-23, 94-102.

V. LE CARACTÈRE DE JÉSUS-CHRIST.

Si Jésus-Christ est vraiment le Fils de Dieu, on doit trouver dans sa vie des vertus morales et un héroïsme du bien qui répondent à l’idée qu’on peut se faire d’un Dieu incarné, vivant à la manière des hommes. C’est précisément ce que l’Évangile permet de constater, au delà même de ce qu’on pouvait attendre.

Sa sainteté.

En lui, d’abord, est la sainteté parfaite,

a) Il peut, sans que personne ne relève le défi, dire dans le Temple : « Qui de vous me convaincra de péché ? » Joa., viii, 46. Les démons eux-mêmes sont forcés de reconnaître en lui le « Saint de Dieu ». Marc, i, 24 ; Luc, iv, 34. Sans doute, ses ennemis l’accusent d’être un « samaritain », d’être possédé du démon, Joa., viii, 48, d’être un « pécheur », Joa., ix, 24, un blasphémateur, Matth., xxvi, 65 ; Marc, xiv, 64, un violateur du sabbat, Joa., IX, 16, un « malfaiteur », Joa., XVIII, 30, un perturbateur, Luc, xxill, 5, un « séducteur ». Matlh., xxvii, 63. On sent bien que ce sont là des calomnies dictées par la haine. Quand Pilate le condamne, c’est en disant : « Je suis innocent du sang de ce juste, » Matth., xxvii, 24, et quand les membres du sanhédrin réclament sa mort, c’est en répétant la sentence qu’ils ont déjà proférée à leur tribunal : « Nous avons une loi, et d’après cette loi il doit mourir, parce qu’il s’est fait Fils de Dieu. » Joa., xix, 7. Le seul reproche que ses ennemis les plus acharnés ont pu lui adresser a donc été de s’être attribué ce qui lui appartenait, la divinité. — b) La sainteté du Sauveur n’est pas seulement négative. Elle se manifeste en lui par les plus sublime vertus. C’est d’abord une attention de tous les instants pour honorer son Père et procurer sa gloire. Il s’y applique dès son enfance. Luc, ii, 49. Il lui rend vraiment le culte « en esprit et en vérité », Joa., iv, 23, que ce Père réclame. Il se tient vis-à-vis de lui dans une dépendance absolue. Joa., v, 20, 30 ; vii, 16, 17 ; xii, 49, 50 ; xiv, 10. Il fait en tout sa volonté, Joa., v, 30, viii, 29 ; c’est là sa nourriture, Joa., lv, 34, même quand cette volonté lui impose les plus durs sacrifices. Matth., xxvi, 42 ; Joa., xviii, 11. Il honore son Père, Joa., viii, 49 ; il fait respecter sa maison, Joa., ii, 16 ; il peut lui dire en toute assurance à la fin de sa vie : « Je vous ai glorifié sur la terre, » Joa., xvii, 4, car c’est à lui qu’il a rapporté fidèlement toute sa prédication et tous ses miracles. Il ne cesse de le prier, Marc, i, 35 ; vi, 46 ; Luc, iii, 21 ; v, 16 ; vi, 12 ; ix, 18, 28 ; xi, 1 ; xxii, 32, 41 ; Matth., xxvi, 36, 39, 42, 44, et apprend aux hommes à le prier sous le nom de « Père ». Matth., VI, 9. Il lui rend grâces de tontes ses bontés. Matth., xi, 25 ; xiv, 19 ; xv, 36 ; Marc, viii, 6 ; xiv, 23 ; Luc, xxii, 17 ; Joa., vi, 11 ; xi, 41, 42, etc. En un mot, il l’aime, comme un tel fils peut aimer un tel père. Joa., xiv, 31. Sa grande douleur est de se sentir abandonné de lui pendant sa passion, Matth., xxvii, 46 ; Marc, xv, 34 ; sa grande joie est de pouvoir remettre son âme entre ses mains. Luc, xxiii, 46.

Amour de Jésus pour les hommes.

Il dépasse

tout ce qui s’est jamais vu sur la terre, puisque c’est cet amour qui a poussé le Fils de Dieu à se faire homme, avec le plein agrément du Père. Joa., iii, 16. Pendant trente ans, le Sauveur manifeste cet amour en prenant pour lui la pauvreté, le travail et les obligations communes aux plus humbles des hommes. Puis, quand l’heure est venue pour lui de se manifester au monde, il se dépense pour l’instruction et le salut de tous, et en toute vérité « passe en faisant le bien et en guérissant tous ceux qui étaient sous l’empire du démon ». Act., x,