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MÉROM (EAUX DE)


pas agi de même ? — Si le pays qui avoisine le lac Houléh offrait quelques dangers pour la retraite, la plaine qui s’étend sur ses bords, principalement vers le sudouest, présentait aussi de grands avantages ; c’est, dans ce district montagneux, un des rares champs de bataille où les princes confédérés pouvaient faire mouvoir leurs chariots de guerre. Il ne faut pas oublier d’ailleurs qu’ils étaient sur leur propre terrain, qu’ils en connaissaient les. moindres déniés et pouvaient ainsi plus facilement échapper à la poursuite des Israélites, étrangers jusquelà à. cette contrée ; la route de Danias à la mer devait leur être particulièrement familière. — En suivant l’opinion d’Eusèbe et de saint Jérôme, le combat aurait eu lieu vraisemblablement dans la plaine appelée Sahel Arrabéh, au-dessous de Dothaïn (Tell Dothân). Mais, en admettant, sur l’autorité de ces auteurs, l’existence d’un village nommé Merrus, il est permis de penser que l’affinité entre ce nom et celui de Merom n’a rien de bien convaincant. Ensuite le champ de bataille est bien éloigné de la capitale de Jabin, chef de la confédération, et de celles des autres alliés : Asor, peut-être Khirbet Harrah, en tout cas certainement située à l’ouest et non loin du lac Hûléh ; Maàon, Khirbet Madîn, à l’ouest de Tibériade ; Sémeron, Semuniyéh, à l’ouest de Nazareth ; Achsaph, Kefr Yâsif, au nord-est de Saint-Jean d’Acre. Voir la carte de la Galilée, t. iii, col. 88. — F. de Hummelauer, Josue, Paris, 1903, p. 239, 272, s’appuyant sur une restitution du texte assez problématique, place Mérom près de Sémeron (Semuniyéh).

III. Description. — La région qui porte le nom de ardh el-Hûléh est une dépression qui s’étend depuis Tell el-Qadi au nord jusque vers le Djisr Benât Ya’kub, « le pont des filles de Jacob, » au sud. Elle est bordée à à l’est et à l’ouest par deux murailles parallèles de montagnes ; d’un côté, celles du Bjôlân, de l’autre, celles de Nephthali. Voir fig. 265. Elle sert de bassin de drainage à tontes les eaux qui descendent des hauteurs environnantes. Aussi n’est-elle, en somme, qu’un immense marais, solidifié à sa partie supérieure par le dépôt graduel des détritus des collines voisines, mais humide et bourbeux à mesure qu’on descend vers le sud, où elle se creuse en forme de cuvette, pour former le lac dont nous parlons. Il est probable que, dans les temps préhistoriques, elle était complètement couverte d’eau. Maintenant encore la saison pluvieuse fait varier les dimensions du lac. Cependant, entre celui-ci et les hauteurs occidentales, s’étend un terrain assez vaste, propre à la culture, où des champs de blé et des pâturages sont séparés par de grands espaces laissés en friche, couverts de roseaux et de carex. La terre, d’un noir rougeâtre, paraît très fertile. Elle est rendue humide par de nombreuses sources qui jaillissent de tous côtés à la surface du sol ; les deux plus importantes sont l’aîn el-Meïlahah et Vaïn el-Beldtah. Dans la plaine sont groupées les tentes des Arabes Ghaûarinéh, quelquefois remplacées par des huttes allongées, quadrangulaires, couvertes en chaume des joncées, et servant d’habitations à quelques familles sédentaires.

Le lac Hûléh a la forme d’une poire ou d’un triangle, dont la base serait au nord et le sommet au sud. Voir figi 266. Élevé seulement de deux mètres au-dessus de la mer Méditerranée, il a de cinq à six kilomètres de long, et, en moyenne, autant de large, pendant la période des basses eaux ; en hiver et au printemps, il déborde souvent à une grande distance. Sa profondeur varie de trois à cinq mètres. L’eau en est très limpide, mais malsaine à cause des détritus organiques qu’elle renferme. Elle nourrit des poissons en très grande quantité ; à sa surface nagent des pélicans, des canards, et surtout de nombreuses grèbes. Le rivage, dont il est très difficile’d’approcher, est formé par un grand nombre de petits ilôts couverts de roseaux élevés et de magnifiques touffes de papyrus, hautes de deux à

trois mètres. Sur ces bords, où l’eau n’est pas profonde, des milliers de poissons s’agitent entre les feuilles énormes des nénuphars (Nuphar lutea) et des nymphéas (Nymphéa alba). Les épais fourrés de roseaux et de papyrus qui entourent le lac deviennent une vraie forêt sur le terrain qui l’avoisine au nord. Là, ce sont des marécages parsemés de petits lacs, où il est impossible de s’aventurer, et à travers lesquels le Jourdain trace son cours sinueux. Voir fig. 267. Un Anglais, M. Macgregor, monté sur une périssoire, a pu le suivre et, après avoii parcouru le lac en tous sens, en a dressé la carte très exacte que nous reproduisons. Cf. Macgregor, The Rob Roy on the Jordan, Londres, 1869, p. 278-305. Les papyrus [Papyrus anliquorum), appelés Babir par les

Ichelbs

266. — Le lac Houléh.

D’après Macgregor, The Rob Roy, p. S.

Arabes, sont ici très beaux. « Le joli lac Hûléh est la limite orientale de l’aire de dispersion de cette remarquable cypéracée africaine qui se rencontre en Syrie, près de Jaffa, et en Sicile, à Syracuse et à Palerme, où elle a été très probablement importée par les Grecs et les Romains. En Asie, elle ne se trouve nulle part au delà du lac Houléh. Ce fait de géographie botanique est intéressant à signaler, car il concorde en tous points avec ceux que fournit la zoologie. Les Chromis, si nombreux dans les eaux du lac de Tibériade, sont des poissons africains qui paraissent avoir accompagné dans leurs migrations les papyrus de la vallée du Nil, ainsi que les crocodiles émigrés dans le fleuve Zerka, près de Césarée. Chromis et papyrus ne se voient absolument plus de l’autre côté de l’Anti-Liban, dans les bassins de l’Oronte, du Tigre et de l’Euphrate, qui présentent cependant des (Conditions climatériques à peu près analogues à celles de la vallée du Jourdain. » Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du monde, t. xliv, p. 341.